Debout entre deux chaises

Debout? Assis, entre deux chaises, dit le dictionnaire, pour signifier une position incertaine, instable périlleuse.

 Et je pense à notre pape. Car j’entends murmurer autour de moi. Pauvre François! Pour les uns, il est trop hésitant dans ses décisions, trop timoré dans ses réformes, trop indulgent à l’égard de ceux qui le critiquent. Et justement: ceux-là l’estiment imprudent dans ses velléités de changement, fossoyeur des meilleures traditions, responsable des reculs de la foi et de la pratique religieuse dans la chrétienté.

Et voilà notre François assis entre deux chaises très remuantes. Sur sa droite, on gémit devant ses audaces délétères, voire suicidaires. Sur sa gauche, on s’impatiente devant la lenteur des progrès souhaités. Tenir bon entre ces polarisations de plus en plus exacerbées n’est pas une sinécure. A moins de se retrouver assis par terre parce qu’il n’y aurait même pas une chaise vide disponible entre les deux autres.

Mais en réalité, le pape ne serait-il pas debout entre ces chaises, plutôt qu’assis dans le confort d’un juste milieu introuvable? Oui, debout, en état de marche, en posture pascale.

«Il faut écouter toutes les brebis afin de mieux les connaître»

Autrement dit: avec l’Evangile comme lumière éclairant la marche de l’Eglise, avec le concile Vatican II comme feuille de route pour l’aventure ecclésiale dans les vicissitudes de notre temps, avec la priorité aux petits et aux pauvres, sans rejeter ni négliger les autres. Et même avec les beaux risques de la liberté face aux grands de ce monde.

D’ailleurs, regardez-le cheminer, notre brave François. Il boîte, il tangue, mais il marche. Il avance lentement, mais sûrement. Observez bien:  son regard cherche la croix à contempler en silence, tandis que ses yeux se ferment pour capter les énergies pascales, avant qu’il ouvre ses mains sur les petits du peuple qui l’entourent et souvent l’acclament. Ceux-là ont compris qu’un bon pasteur doit à la fois guider le troupeau, encourager les brebis qui traînent les pieds et surtout accompagner celles qui peinent.

Aucune chaise pour se reposer au bord de la route! Il y a seulement le rude courage d’aller de l’avant, à la rencontre du seul Bon Pasteur. Et pour cela, il faut écouter toutes les brebis afin de mieux les connaître; il faut partager avec les autres bergers pour éviter les pièges de la solitude autoritaire; il faut surtout faire confiance à l’Esprit qui souffle où il veut, mais toujours dans la direction de Jésus, celui qui nous conduit tous ensemble vers le Père.

Le 4 octobre, c’était la saint François d’Assise. Bonne fête, Saint Père. Bonne fête! Debout et en marche!

Claude Ducarroz

6 octobre 2021

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