Lausanne: Jean-Marie Cettou, curé de ville heureux

Membre des Béatitudes, le Valaisan Jean-Marie Cettou, 58 ans, est le curé de la paroisse Ste-Thérèse à Lausanne. Il fête cette année ses 25 ans de sacerdoce. Rencontre avec un prêtre heureux qui évoque son ministère en milieu urbain.

Bernard Litzler pour cath.ch

A la cure de Ste-Thérèse, Jean-Marie Cettou accueille à la grande table. C’est là qu’il habite depuis 2017. Souriant et disponible, il évoque le début de sa cinquième année comme curé en terre vaudoise. Son secteur pastoral? L’Ouest lausannois, du quartier résidentiel de Montelly au jeune quartier de la Bourdonnette. Il y travaille avec deux religieuses de la communauté des Béatitudes et des laïcs.

L’engagement des jeunes

En venant de Venthône, près de Sierre, le passage s’est fait facilement: «Je connaissais Lausanne, notamment avec le Jubilé de la Miséricorde, les missions de rue, etc.». Il a été surpris par la force d’engagement, spontanée, des jeunes. «Ils passent facilement d’une église à l’autre, sans complexe. Il y a l’aumônerie de l’Université, Taizé, les JMJ, Jeunesse en Mission, l’Armée du Salut. Cela donne un esprit de fraternité très présent», confie-t-il.

A cet égard, la ville est avantageuse: «Les propositions sont peu suivies par rapport à la population, reconnaît-il. Mais dans la fécondité de ce qui est célébré, c’est très profond». Par exemple, l’adoration eucharistique vécue chaque semaine par le groupe Adoray, des jeunes universitaires, à Ste-Thérèse. «C’est surprenant. La semaine de la rentrée, ils étaient de nouveau une cinquantaine…».

Aidé de paroissiens, Jean-Marie Cettou met en place l’autel pour la messe qu’il donne à l’occasion des olympiades d’Ouchy | © Bernard Litzler

Par contre, la ville méconnaît les sépultures. «C’est une souffrance, même si on s’y fait. Dans les villages, en Valais, il y a la notion de consolation. Il y a une cohésion. Et on pose des gestes solides pour se relever de la séparation. C’est une difficulté lorsque les personnes ne se connaissent plus».

Le célibat

Alors prêtre heureux? «Le Christ me comble. C’est primordial! confie-t-il. Dans cette période controversée pour l’Eglise, il y a la magnifique réalité du célibat. C’est une exigence, mais c’est surtout une grande liberté de joie.»

Et les abus dans l’Eglise? Face à ces drames, «il y a une force extraordinaire pour se ressaisir». «Le célibat, ajoute Jean-Marie Cettou, n’est pas un manque, mais un don que le Christ nous fait pour témoigner que son amour nous suffit». «On n’arrive pas à être uni à Jésus en tout, mais c’est ce vers quoi on tend. Des faiblesses demeurent, malgré nous».

Mécanicien auto

Retour sur son passé, parfois sinueux: «J’ai eu une belle jeunesse avec des travers, mais je me suis converti…». L’année de ses 20 ans, dans un pèlerinage, il entend dans son cœur, le 24 avril 1983: «Ne voudrais-tu pas devenir prêtre?». C’est un point de départ.

Toujours au contact des paroissiens pour quelques mots, des échanges qui enrichissent | © Bernard Litzler

Il est alors mécanicien auto. Pendant quatre ans, l’appel le travaille, mais il reste tiraillé. Cependant l’appel se confirme: «Le célibat, je le pressentais comme un chemin de liberté.» Il connaît de belles amitiés avec des filles… «J’étais le confident de la chasteté. J’avais plein de copines, car je n’avais pas les idées de mes copains, les plans, etc.» Il rencontre quelques difficultés avec la justice, les excès de vitesse, la moto, etc. «Mais je gardais ce côté de la vertu: je pressentais que le célibat était un chemin de bonheur.»

Puis vient la conversion, à Medjugorje. Jean-Marie Cettou rejoint le Renouveau charismatique, vers 1985. Autour «de belles figures», il vit de grandes rencontres et fait connaissance avec la communauté du Lion de Juda (qui deviendra les Béatitudes). Il s’engage dans la communauté, en 1987. L’idée est d’y passer une année avant de rejoindre le Séminaire diocésain de Sion.

Le Lion de Juda

«Le Lion de Juda m’a tellement emballé qu’ils m’ont gardé». Il passe au Pont-St-Esprit, dans le Midi, puis à Mortain et à Toulouse. Crochet par Jérusalem avant d’entamer quatre ans d’études à Lugano. Enfin, il rejoint Venthône et la région de Sierre pour une vingtaine d’années. «A la fin, j’ai même été curé et doyen».

Puis arrivée à Lausanne. Un passage naturel, dit-il. «Le fond du Valais est décentré de la Suisse romande, même si la maison de Venthône présente des atouts. Au Tessin, j’ai connu un impact plus profond avec la vie en ville. On a toujours cherché à faire des missions en milieu urbain, en gardant les maisons de communauté en appui pour des formations complémentaires.»

«Pas un répétiteur»

Prêtre donc depuis 25 ans. Avec une vigueur communicative: «C’est ma prière: que là où je suis engagé, on voie un visage de Jésus vivant. Je ne suis pas un répétiteur des œuvres de l’Eglise, mais un témoin parce que Jésus est vivant et parce qu’il est vivant, l’Eglise continue».

Ce qui est important pour Jean-Marie Cettou, «c’est toi et moi. Et toi, et toi, et toi… Et ensemble cela constitue le peuple de Dieu» | © Bernard Litzler

«Je ne dis pas qu’il y a des incroyants, mais des gens qui n’ont pas encore rencontré l’amour de Dieu. C’est comme Jean-Paul II qui disait que le communisme ne tiendra pas car il n’y a pas d’anthropologie. Pareil avec le capitalisme qui ne veut que du bonheur avec le plaisir… Il faut que la personne soit le tout, une rencontre avec une personne qui crée l’amour en lui.»

Avec Mistral gagnant

Et quand il a des trous, il pense à cette parole de Luther: il y a tant de travail aujourd’hui, alors je vais prier deux fois plus. «S’il y a de la tristesse, je vais me demander où est le lieu de ma paix. Et j’essaie de durer devant le Saint-Sacrement ou un psaume.» Ou encore un truc, simple: «Avec de vieilles musiques de chanteurs comme Renaud ou Cabrel, je vais chanter les psaumes avec Mistral gagnant et je me remonte. Les offices communautaires aident beaucoup, mais ce n’est pas suffisant. Il y a l’usure du temps, mais il faut demeurer dans la prière, comme une personne mariée s’oblige à des rencontres avec son conjoint. Comme dans la vie conjugale, plus tu dures sur le chemin, plus le bonheur est grand.»

Une vie à répandre

Concernant son action pastorale, le curé de Ste-Thérèse vit «une certaine abnégation pour les fruits». «Je suis reconnaissant quand je vois des êtres qui cheminent. Toutes les facettes de la mission sont belles. Ah, les rencontres… Ce qui est important, c’est toi et moi. Et toi, et toi, et toi… Et ensemble cela constitue le peuple de Dieu».

Car, ajoute-t-il, «je n’ai pas des choses à maintenir, j’ai une vie à répandre. Alors elle se répand avec celui qui ouvre son cœur et ça devient génial. Par exemple, quand les gens se retrouvent pour la fraternité, les services ou pour l’adoration, quand ils sont bien dans leurs bottes».

A cet égard, son chemin avec le Renouveau charismatique le stimule: «Le baptême dans le Saint-Esprit était pour toute l’Eglise, le pape l’a rappelé. C’est un souffle et pas juste un mouvement. Ce qui est génial, c’est quand on peut le faire prendre dans les structures paroissiales. Et en étant engagé avec des gens qui ont rencontré Jésus vivant, cela se fait tout seul». Paroles d’un enthousiaste. (cath.ch/bl/bh)

Rédaction

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