Evangile de dimanche: chacun sa place

Pourquoi chercher à obtenir par nos propres forces et nos propres mérites ce qui nous est donné généreusement par l’amour des autres? Cette prétention bien humaine à se servir soi-même fait souvent bien des dégâts en étant la source de luttes de pouvoir: elle assoit la domination des plus forts sur les plus faibles. En ces temps où l’Église et le monde mesurent avec horreur jusqu’où peuvent aller les abus, quelle qu’en soit la forme, nous sommes appelés à l’humilité. Profiter de sa position pour assoir son emprise sur les autres conduit en effet aux pires déviances.

Les plus proches de Jésus n’échappent pas à ce piège, eux qui veulent s’obtenir les premiers sièges.

Pour la seconde fois Jésus les remet à leur place après leur avoir annoncé sa Passion: «vous ne savez pas ce que vous demandez!» Il le fait de façon subtile en traçant le chemin qui le conduit lui-même au cœur de sa mission: là où il donne sa vie.

Prendre place à ses côtés revient donc à le suivre non pas dans la grandeur humaine mais dans la gloire divine. Sa place à lui, c’est le lieu du don de sa vie: c’est sa croix. Et là, on ne peut pas ne pas penser à ces deux autres «compagnons» de Jésus, crucifiés l’un à sa droite et l’autre à sa gauche. Le repentir de l’un lui ouvre un chemin de délivrance

C’est de là que naît la promesse: «aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis!» Voilà la place qui nous est préparée par Dieu: elle est donnée à celui qui se reconnaît tel qu’il est. C’est ainsi que nous pouvons comprendre la promesse de Jésus qui est venu «donner sa vie en rançon pour la multitude».

«C’est donc à la place du serviteur que Jésus nous attend et pour nous y accueillir il prend lui-même la condition du serviteur.»

Nous entendons bien la multitude et non pas quelques initiés privilégiés. Plus besoin de se bousculer puisque la place est offerte à tous. Cependant, il y a une condition, c’est d’accepter le don de sa vie et de le recevoir comme une libération. Le mot rançon, dans son étymologie, contient en effet la libération d’une captivité, la délivrance de toute forme de liens.

Voilà jusqu’où va l’amour de Dieu! Il ne craint pas d’affronter les pires enfermements pour les démanteler et faire justice à toute victime de l’orgueil humain. Le service de Jésus c’est le don de sa vie par un amour qui va jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’au fond de la misère humaine pour relever ceux dont la dignité est bafouée. C’est là que la miséricorde de Dieu vient nous chercher. Le reconnaître humblement nous donne place à ses côtés.

C’est donc à la place du serviteur que Jésus nous attend et pour nous y accueillir il prend lui-même la condition du serviteur. «Il n’a pas jalousement gardé le rang qui l’égalait à Dieu», nous dit Saint Paul, «prenant lui-même la condition d’esclave». Le passage du mot serviteur à celui d’esclave souligne jusqu’où va ce service. Il se fait totalement dépendant de ceux à qui il se donne.

Si Dieu lui-même descend jusqu’à nos pieds, qui sommes-nous pour nous hisser au-dessus de lui? Chacun à sa place: la nôtre est d’accepter humblement de tout recevoir de l’amour de Dieu sans chercher à se l’approprier!

Philippe Matthey | Vendredi 15 octobre 2021


Mc 10, 42-45

En ce temps-là,
    Jésus disait à ses disciples :
« Vous le savez :
ceux que l’on regarde comme chefs des nations
les commandent en maîtres ;
les grands leur font sentir leur pouvoir.
    Parmi vous, il ne doit pas en être ainsi.
Celui qui veut devenir grand parmi vous
sera votre serviteur.
    Celui qui veut être parmi vous le premier
sera l’esclave de tous :
    car le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi,
mais pour servir,
et donner sa vie en rançon pour la multitude. »

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