Eglise: La rupture au sein de l’Ordre des Carmes consommée ? (280593)
Paris, 28mai(APIC) La rupture semble désormais consommée chez les carmélites entre monastères conservateurs et réformistes qui se référeront à
l’avenir à deux constitutions distinctes, pour ne pas dire incompatibles.
C’est ce que constate le Père Camilo Maccise, préposé général des carmes
déchaux, dans une lettre où il fait le point sur un contentieux né suite à
la « mise à jour » demandée par le Concile Vatican II.
La mise en chantier de la nouvelle législation des carmélites remonte à
1966, un an après la clôture du Concile. En 1977, Paul VI approuve la réforme « ad experimentum » pour une période de cinq ans. Au terme de celle-ci,
l’écrasante majorité des 810 monastères accepte à l’époque la nouvelle
constitution. Or, deux ans plus tard (1984), devant la résistance de monastères conservateurs, la majorité se voit proposer par le cardinal Agostino
Casaroli, alors secrétaire d’Etat, un autre texte répondant à la demande du
groupe minoritaire. Rome décide en outre de confier au dicastère des religieux la rédaction de la nouvelle législation. Et c’est « avec stupeur » que
les moniales apprennent en décembre 1990 que le pape a approuvé la législation répondant à la demande du groupe minoritaire.
Une décision « surprenante et inquiétante », écrivait à l’époque le préposé général, le Père Maccise, en constatant que c’est à Jean Paul II qu’il
revient désormais de résoudre la question essentielle « de l’unicité ou de
la pluralité de textes de constitutions pour les carmélites déchaussées et,
par voie de conséquence, le problème très grave de l’unité ou de la division de l’ordre ».
Soulagement en octobre 1991: les carmélites apprennent l’approbation
d’une seconde constitution. Les monastères ont jusqu’à Noël 92 pour faire
leur choix. Le pape explique que « l’un et l’autre texte (…) veulent être
une fidèle interprétation du charisme thérésien ». Jean Paul II entend que
soit maintenue « l’unité spirituelle de tout le carmel thérésien, au sein de
ses légitimes traditions historiques en tenant compte de nouvelles circonstances, lieux et cultures où son charisme s’incarne. Il conclut: « Vous
toutes, carmélites déchaussées, ensemble avec les carmes déchaussés, vous
formez dans l’Eglise le même et unique Ordre des Frères et Soeurs déchaussées de la Bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel. Toutes et tous, vous
avez en commun la même règle, le même charisme carmélitain thérésien et le
même patrimoine spirituel transmis par vos saints parents Thérèse de Jésus
et Jean de la Croix ».
Les monologues des carmélites
Cet appel à la sérénité et au dialogue ne semble guère avoir été entendu, à en croire le quotidien catholique français « La Croix », qui évoque
cette « douloureuse affaire » dans un article intitulé « Les monologues des
carmélites ». Le bilan que dresse le Père Macisse dans une lettre adressée
aux religieuses, dont le texte est publié dans le dernier numéro de « La Documentation catholique », laisse perplexe. Les deux constitutions, note « La
Croix », présentent des différences, voire des incompatibilités telles que
le choix d’une communauté en faveur de l’une a souvent entraîné le rejet de
celles qui ont retenu l’autre.
Le choix opéré par les carmels jusqu’au 25 décembre 1992 confirme les
« réformistes »: 744 monastères (85%) se rallient au texte de 1991; le document approuvé par Rome un an plus tôt à la demande de deux couvents espagnols (dont celui d’Avila) est retenu par seulement 125 carmels, dont près
de la moitié en Espagne.
Séparation à l’amiable? Non, estime le Père Maccise, qui constate qu’ »il
y a de fait une rupture à l’intérieur de notre ordre » et que la situation
continue à se détériorer. Le préposé général en rend responsable l’ensemble
de la famille carmélitaine, « frères aussi bien que moniales de l’une ou
l’autre option ».
Quant à l’avenir, le Père Maccise refuse tout « faux irénisme ». Invitant
chacun à une « ouverture conciliante » au nom de l’ »unité spirituelle » que le
pape demande de garder vivante, il se demande comment lui, préposé général
des carmes, il pourra continer à remplir sa mission dans une famille dont
une minorité récuse son rôle (la constitution du groupe conservateur soustrait en effet ce dernier à son autorité). Car, dit-il, « l’unité ne peut
pas s’établir par un décret et par force ». (apic/cip/pr)
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