Homélie du 26 décembre 2021 (Lc 2, 41-52)

Abbé Boniface Bucyana – Église Saint-Joseph, Lausanne

La Sainte famille, ce berceau voulu par Dieu

Quand nous faisons un signe de croix, nous ravivons notre relation avec le foyer trinitaire, du Père, du Fils et du Saint-Esprit. C’est le foyer d’amour de Dieu qui se communique aux hommes. Le mystère de Noël vient de se révéler comme l’incarnation de cet amour dans la naissance du Fils de Dieu chez les hommes, dans une famille humaine. Quand Dieu et l’homme font famille, alors la famille humaine devient un foyer où Dieu a sa place.

La première lecture nous désigne une famille qui prie au temple pour demander un enfant, Samuel, c’est à dire Dieu exauce. Nous voyons cette famille qui sait remercier. Ces prières de demande et de remerciement sont dites au temple, c’est-à-dire au lieu de rendez-vous avec Dieu pour offrir, même l’enfant reçu. Celui-ci demeurera à la disposition du Seigneur tous les jours de sa vie.

 Comme le souligne le psaume 83, heureux ceux qui habitent et fréquentent la maison du Seigneur, on peut dire que la première chapelle, c’est le foyer familial, mais il doit être une chapelle ouverte, comme une sacristie qui fait partie du temple, ouverte sur l’autel. Ce foyer est appelé à se réchauffer de la présence du Seigneur, avec les  autres familles.

La famille devient fruit d’alliance

Ainsi la famille humaine est sanctifiée pour ne pas être un lieu de juxtaposition des êtres, un lieu de rapports de force ou de lutte de pouvoir. Elle devient fruit d’alliance, où les différences refusent les antagonismes, et deviennent des richesses pour chacun et pour tous. Ce berceau de naissance, de croissance, d’amour est le lieu d’apprentissage à l’humanité et à l’humain.

Ce berceau a été voulu et choisi par Dieu, par le Père pour son Fils, et a été tissé par le Oui de la foi de Marie et de Joseph. A travers cette sainte famille, toutes les familles humaines ont trouvé leur sens qui fait de chaque membre un enfant de Dieu et où chaque membre doit regarder l’autre avant tout et après tout en enfant de Dieu.  La relation de base et le sommet de toute relation est devenue ainsi la fraternité, grâce au Fils de Dieu qui est devenu fils de l’homme. Cette fraternité donne de la sève divine à toutes nos relations familiales, et une universalité qui dépasse le seul lien de sang.

Former la famille des enfants de Dieu

Comme vient de le souligner la première lettre de saint Jean, à travers Jésus-Christ, Dieu nous a donné l’amour vrai, grâce auquel nous sommes appelés à être des enfants de Dieu et avec lequel nous devons nous accueillir en enfants du même Père et nous aimer comme tels. Alors nous avons la mission de former la famille des enfants de Dieu qui soignent cette relation par la prière de demande confiante et d’action de grâces pour tous ses bienfaits et le louer pour sa gloire. Nous gardons ses commandements qui sont les voies vers Dieu et qui nous aident à faire sa volonté. Ces commandements se résument en un seul qui vaut plus que toutes les chartes du vivre ensemble : mettre notre foi dans le nom de son Fils Jésus Christ, et nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés. Grâce à ce commandement qui est une mission, nous vivons une communion intime avec celui est né chez l’homme pour que l’homme naisse chez Dieu, une relation spirituelle vitale, qui sanctifie nos familles.

En naissant dans une famille humaine, Dieu a voulu rejoindre l’homme du début à la fin, le sanctifier dès la naissance et partager avec lui tout. Tout ce qui est de l’homme ne peut être étranger à Dieu, même si nous sommes tentés de le ternir à l’écart. Nous n’avons pas de jardin secret devant Dieu ni de vie privée à son regard.

La famille est-elle encore un berceau pour l’humanité ?

En ce dimanche, nous sommes tous interpellés sur la famille. Qu’avons-nous fait de la famille ? Est-elle encore un berceau pour l’humanité ? Est-elle encore capable d’accueillir les enfants et les rassurer, les élever jusqu’à la sphère divine ? Est-ce que nos enfants peuvent encore y naître, y grandir en âge et en grâce comme Jésus chez Joseph et Marie, devant Dieu et les hommes, comme l’indique l’évangile d’aujourd’hui ? N’y sont-ils pas plutôt traités en fardeau et en consommateurs ? La famille est-elle encore le berceau de la grande famille de Dieu qu’est l’Église ? N’avons-nous pas donner un coup de pied pour trouer ce berceau, ne l’avons-nous jetée et le bébé avec ? Et dire que nous arrivons à vouloir l’enfant, tout en lui refusant malheureusement le berceau, c’est-à-dire une famille vraiment humaine. Nous voulons la famille des corps sans esprit, la famille nivelée où les spécificités sont gommées, où la confusion prend l’enfant pour un adulte, un roi absolu, et les parents pour des enfants assoiffés de caprices. C’est le désordre familial annoncé et les impasses multiples dans notre société. Oui, on refuse à l’enfant la dimension spirituelle avec le risque de le prendre pour un objet. On prétend lui donner des valeurs, en lui refusant la base de ces valeurs. La famille, que l’on veuille ou non, reste le lieu privilégié où l’on découvre et cultive les valeurs spirituelles, indispensables pour fonder les valeurs humaines universelles et autres.

C’est pourquoi, Dieu nous envoie d’abord à nos familles, comme des membres vivants qui participent à la vie de toute la famille, pour en faire des lieux d’épanouissement et des havres de paix. Il nous supplie de ne pas être des sangsues qui profitent de la famille, la mettent en danger et la démolissent au lieu de la faire vivre et la préserver parce que sans ce berceau, l’homme ne sait plus d’où il vient ni où il va. Il nous invite à ne pas scier la branche sur laquelle nous sommes tous assis, à reprendre notre responsabilité pour prendre soin de notre premier environnement vital, à défendre la famille par des économies et des politiques plus humaines, à la sanctifier, la consacrer et la confier à la protection de la Sainte Famille divino-humaine du Sauveur.

Prions pour que l’amour reçu et donné en Jésus Christ aide nos familles à surmonter les épreuves de violence, de division, de routine et de la durée, à vivre le pardon mutuel, comme huile d’entretien de toute vie familiale.  Amen

DIMANCHE de la SAINTE FAMILLE
Lectures bibliques : 1 Samuel 1, 20-22.24-28; Psaume 83, 2-3.5-6.9-10; 1 Jean 3, 1-2.21-24; Luc 2, 41-52

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