Évangile de dimanche: Un fils à l’épreuve

C’est le lien avec nos parents qui nous donne d’être filles et fils. Si ce lien n’existe plus, alors nous perdons une part essentielle de notre identité et sommes livrés à nous-mêmes. Comment entretenir ce lien? C’est l’enjeu de la confrontation que le diable impose à Jésus au début de notre chemin de Carême.

Quittant les bords du Jourdain après son baptême Jésus va vivre sa vie de Fils bien-aimé du Père. La déclaration de Dieu portée par l’Esprit-Saint nous le désigne comme Fils de l’amour. L’évangéliste Luc, qui nous accompagne cette année, a pris soin de situer Jésus dans sa généalogie pour que nous comprenions qu’il est en même temps Fils de l’homme. Toute sa vie divine et toute sa vie humaine sont concentrées dans cette identité existentielle de sa filiation avec le ciel et la terre.

Or voilà que ce bel idéal est malmené par les épreuves de la vie dont l’une des pires est la division. Nous en faisons l’expérience dans nos propres existences ainsi que dans la vie du monde si cruellement déchiré par les guerres de tous horizons et en particulier en ce moment en Ukraine. Le diable a encore frappé! Lui dont le nom signifie «le diviseur», celui qui désunit.

En proposant à Jésus de profiter de sa situation pour bénéficier de prodiges à son unique avantage, le diable s’en prend au lien qui le relie à son Père. En le séparant de l’amour originel il annule son être même et donc aussi sa mission en ce monde. Jésus qui dans l’évangile de Jean déclare qu’il ne peut rien faire par lui-même, refuse d’être replié sur lui-même et son intérêt personnel. S’il est venu parmi nous c’est pour que le monde soit sauvé. La parole de ce jour nous indique de quoi nous sommes sauvés.

«Par sa présence dans le désert et l’affrontement des épreuves, Jésus continue le chemin de libération commencé par le peuple de l’alliance.»

Avoir, pouvoir et gloire! Outre la rime, ces trois illusions sont unies pour diviser, dominer et tromper la vie du monde et même nos propres vies. La première génère la cupidité, la deuxième la convoitise et la troisième l’orgueil. Or Jésus est venu vivre le partage, la solidarité et l’humilité. Cette triple mise à l’épreuve lui permet de nous donner la preuve en acte de son amour. Et comment nourrir l’amour si ce n’est par la parole de sa promesse. Voilà pourquoi Jésus répond au diable en citant puis en agissant la parole de son Père. Le diable voulait le fermer sur lui-même et la parole l’ouvre à l’autre.

Par sa présence dans le désert et l’affrontement des épreuves, Jésus continue le chemin de libération commencé par le peuple de l’alliance. Il se donne comme celui qui vient accomplir la promesse de liberté. Le psalmiste l’avait compris, lui qui fait dire à Dieu qu’il est avec nous dans l’épreuve. Cette parole qui est près de nous comme le dit Paul aux Romains. Tout dans la parole de Dieu nous permet de découvrir l’unique volonté de Dieu : être avec nous jusqu’à la fin des temps. Et si l’amour est avec nous, nous croyons que nous avons le courage d’affronter les épreuves. Nous y sommes accompagnés!

«Rendez-vous à la croix», semble dire le diable après avoir épuisé toutes les formes de tentation. C’est là que Jésus fera la preuve la plus absolue d’un amour qui va jusqu’au bout. Solidaire de toute misère humaine Jésus porte sur la croix toutes les violences de notre humanité. Sa révolte, c’est la révolte de l’amour qui met à mort jusqu’à la haine de toute forme de guerre!

Philippe Matthey | Vendredi 4 mars 2022


Lc 4, 1-13

En ce temps-là,
après son baptême,
    Jésus, rempli d’Esprit Saint,
quitta les bords du Jourdain ;
dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert
    où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable.
Il ne mangea rien durant ces jours-là,
et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim.
    Le diable lui dit alors :
« Si tu es Fils de Dieu,
ordonne à cette pierre de devenir du pain. »
    Jésus répondit :
« Il est écrit :
L’homme ne vit pas seulement de pain. »

    Alors le diable l’emmena plus haut
et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre.
    Il lui dit :
« Je te donnerai tout ce pouvoir
et la gloire de ces royaumes,
car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux.
    Toi donc, si tu te prosternes devant moi,
tu auras tout cela. »
    Jésus lui répondit :
« Il est écrit :
C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras,
à lui seul tu rendras un culte.
 »

    Puis le diable le conduisit à Jérusalem,
il le plaça au sommet du Temple
et lui dit :
« Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ;
    car il est écrit :
Il donnera pour toi, à ses anges,
l’ordre de te garder
 ;
    et encore :
Ils te porteront sur leurs mains,
de peur que ton pied ne heurte une pierre.
 »
    Jésus lui fit cette réponse :
« Il est dit :
Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »
    Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations,
le diable s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé.

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