Mgr Virgilio do Carmo da Silva: un éducateur pour un jeune pays

«Quand j’ai appris cette nouvelle, j’ai été tellement choqué que j’ai failli m’évanouir». Telle a été la réaction de Mgr Virgilio do Carmo da Silva, archevêque de Dili, lorsqu’il a appris que le 27 août, il deviendra, à 54 ans, le premier cardinal du Timor oriental. Avec sa création, ce petit archipel d’Asie du Sud-Est de 1,3 million d’habitants, dont environ 97% sont catholiques, fait un pas de plus vers la scène mondiale après une histoire mouvementée et une indépendance récente. 

«Je suis convaincu que le pape François ne m’a pas offert cela à moi, Virgilio, mais plutôt à l’Église et au peuple du Timor oriental», a déclaré Mgr Virgilio do Carmo da Silva lors d’une conférence de presse le 30 mai, après avoir appris sa nomination. «Le peuple et l’Église du Timor oriental méritent cette grâce et cette reconnaissance de Dieu, dans un pays où l’Évangile est arrivé il y a 500 ans et qui a célébré le 20 mai le 20e anniversaire de son indépendance».

Né en 1967 dans la ville de Venilale, Virgilio do Carmo da Silva a étudié dans des établissements scolaires gérés par la Société de Saint François de Sales – les Salésiens de Don Bosco. Il a ensuite décidé de rejoindre cette congrégation, faisant sa première profession en 1990 et sa profession perpétuelle en 1997. Il a ensuite été ordonné prêtre le 18 décembre 1998. 

Il a consacré la première période de sa vie sacerdotale à la formation des novices et à la direction d’écoles salésiennes au Timor oriental, avec un détour par Rome de 2005 à 2007 pour suivre un diplôme en spiritualité à l’Université pontificale salésienne. Il est ensuite retourné dans son pays natal et, en 2015, a été élu supérieur de la province salésienne du Timor oriental et de l’Indonésie. Un an plus tard, le 18 mars 2016, le pape François le nomme évêque de Dili, ou se trouve la capitale du Timor oriental, qui sera ensuite élevé au rang d’archidiocèse, faisant de lui un archevêque en 2019. Le futur cardinal est également vice-président de la Conférence épiscopale timoraise. 

En août, Mgr Virgilio do Carmo da Silva, 54 ans, deviendra également le deuxième plus jeune cardinal après l’Italien Mgr Giorgio Marengo, 48 ans, préfet apostolique d’Oulan-Bator (Mongolie).

Un pays jeune, catholique et proche de l’Église 

Le Timor oriental est un jeune pays insulaire aux fortes racines catholiques. Du 17e siècle à 1975, la petite nation était sous la domination coloniale portugaise, qui a apporté le catholicisme à sa population. En 1975, l’indépendance a été déclarée, mais peu après, l’Indonésie voisine a envahi le pays, ce qui a entraîné de nombreuses années de violence et de conflit entre l’armée et les groupes séparatistes.

L’Église catholique a joué un rôle important durant cette période en aidant la population timoraise, notamment sous la direction de l’évêque Carlos Ximenes Belo, alors administrateur apostolique de Dili, qui a ouvertement condamné l’occupation des forces indonésiennes et appelé à une résistance non violente. En 1996, il a reçu le prix Nobel de la paix pour ses efforts, aux côtés de l’homme politique José Ramos-Horta, qui est aujourd’hui le président du pays. 

Par ailleurs, en 1989, le pape Jean-Paul II a effectué une visite controversée dans le pays, contribuant ainsi à placer l’occupation indonésienne du Timor oriental sous les feux de la rampe pour la première fois. Le pontife a condamné les violations des droits de l’homme sans nommer explicitement les forces indonésiennes, tout en prenant soin de ne pas faire de gestes qui auraient fait valoir la souveraineté du Timor oriental. Le Vatican a soutenu les prêtres et évêques locaux tout en restant officiellement neutre sur la question de l’indépendance.

Plus de 5.000 fidèles ont assisté à une messe célébrée par Mgr Virgilio do Carmo da Silva en 2019 pour commémorer les 30 ans de la visite du pape polonais. Un autre évêque a alors déclaré que la visite de Jean-Paul II «a été le moment où le monde a commencé à connaître la lutte des Timorais pour l’indépendance». Le pays a observé trois jours de deuil national après la mort du pontife.  

Les Nations unies ont finalement parrainé un référendum sur l’indépendance qui a conduit au départ des forces indonésiennes en 1999. La constitution du pays, qui est entrée en vigueur en 2002, stipule que «l’État reconnaît et apprécie la participation de l’Église catholique au processus de libération nationale». 

Un accent sur l’éducation et la stabilité dans la période post-indépendance 

C’est dans ce contexte que l’évêque Virgilio do Carmo da Silva a grandi et qu’il navigue aujourd’hui, alors que ce pays encore fragile, marqué par des divisions politiques, tente de trouver ses marques en tant que nation indépendante. Comme ses prédécesseurs avant lui, il a gardé des relations étroites avec l’État. 

Le Président Ramos-Horta et le Premier ministre Taur Matan Ruak n’ont pas tardé à féliciter l’évêque en apprenant sa création en tant que cardinal. Le Parlement a également publié une déclaration de félicitations, affirmant qu’il s’agissait d’un «moment historique» pour le pays et d’une source de «fierté pour le peuple du Timor oriental».

Ayant lui-même un passé d’éducateur, Mgr Virgilio do Carmo da Silva a collaboré étroitement avec l’État pour tenter d’améliorer la qualité de l’enseignement et les opportunités scolaires offertes dans son pays. De plus, le Timor oriental étant un pays très jeune, avec une moyenne d’âge de 20,8 ans en 2020, le futur cardinal a souligné la nécessité d’éduquer et de former les jeunes à la foi catholique.

En décembre 2021, le prélat timorais a inauguré la première université catholique du pays, dédiée à Jean-Paul II, réalisant ainsi un objectif à long terme de l’archidiocèse. «L’université catholique du Timor doit offrir une éducation de classe mondiale dans tous les domaines de l’activité humaine, inspirée par les traditions intellectuelles, morales et spirituelles catholiques», a-t-il déclaré.

En mai 2022, Mgr Virgilio do Carmo da Silva était également présent lors du renouvellement d’un accord entre l’Église et le gouvernement du Timor oriental, qui alloue des fonds publics pour soutenir le travail et les activités de l’Église. Pour l’année 2022, le gouvernement a alloué 15 millions de dollars, dont 50 % devaient soutenir les objectifs éducatifs, selon UCA News

Malgré les relations étroites avec l’État, l’archevêque de Dili n’a pas non plus hésité à faire entendre sa voix sur les processus politiques, qui n’ont pas toujours été sans heurts dans la jeune nation en développement. Lors des élections d’avril 2022, il a appelé le futur président à «tenir ses promesses électorales afin que la population ne perde pas confiance» et à «être proche du peuple non seulement pendant la campagne, mais aussi pendant le mandat, afin de connaître les difficultés rencontrées par les citoyens». 

«Nous devons maintenir la Constitution et inculquer la discipline à tous les résidents pour convertir définitivement notre nation en une société pacifique, prospère et démocratique», a-t-il ajouté.

Une éventuelle visite papale? 

Le pape François devait se rendre au Timor oriental, en Indonésie et en Papouasie-Nouvelle-Guinée en septembre 2020. Le voyage n’a jamais été officiellement annoncé mais si aucune raison n’avait été avancée pour l’annulation, la pandémie avait été considérée comme l’explication la plus probable.

Toutefois, dans une interview accordée à l’agence de presse argentine Telam en octobre 2021, le pape François a déclaré vouloir «régler la facture impayée du voyage en Papouasie-Nouvelle-Guinée et au Timor oriental». Un éventuel voyage au Timor oriental ne semble pas cependant à l’ordre du jour, alors que le pape de 85 ans souffrant de gonalgie est attendu dans plusieurs pays dans les prochains mois. (cath.ch/imedia/ic/mp)

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