A Montet, les Focolari fêtent 40 ans de fraternité universelle

Les 15 et 16 octobre 2022, le mouvement des Focolari fête les 40 ans de la cité-pilote «Mariapoli Foco», à Montet (FR). Le site a bien accompli, au fil des décennies, sa vocation de «laboratoire de fraternité universelle».

Entouré d’un petit mur d’enceinte, d’un vaste jardin potager et d’un parc abritant de grands arbres centenaires, la «cité» focolari apparaît paisible et accueillante, sous le soleil automnal de la Broye fribourgeoise. cath.ch est attendu à la réception par quatre résidents du lieu: Gwenaëlle Delalande, qui s’occupe de l’administration et des finances, Denise Roth, responsable de la logistique et de l’accueil, Marius Müller, chargé de communication, ainsi que Tharcisse Ndayizeye, un étudiant venant du Burundi. Ils vivent à Mariapoli Foco depuis des temps divers. Denise est à Montet depuis presque trente ans, Gwenaëlle et Marius sont arrivés plus récemment.

Témoigner de l’amour réciproque

Ils vivent, à Montet, dans l’une des 25 «cités-pilotes» du mouvement des Focolari, fondé en 1943 par la laïque catholique italienne Chiara Lubich. Ces cités, disséminées dans le monde entier, entendent témoigner qu’une société fondée sur la loi fondamentale de l’amour réciproque est possible. Dans la Broye fribourgeoise, l’institution a été érigée en 1981 sur un terrain acheté aux Pères salvatoriens en tant que second centre mondial de rencontre et de formation du mouvement. Une centaine de personnes y résident, de 18 à 90 ans, venant de 35 pays. La moitié sont des jeunes qui y séjournent pour une année, l’autre moitié sont des adultes, «permanents» qui en assurent la continuité.

Le Centre des Focolari, à Montet (FR) | © Raphaël Zbinden

Ouverture à tous les dialogues

«Il y a plusieurs aspects de croissance dans la formation, témoigne Tharcisse. Outre l’élément intellectuel, nous approfondissons la communication interpersonnelle, aussi au travers de la vie communautaire. Il est nécessaire de nous comprendre les uns les autres, car ici, il y a beaucoup de cultures différentes».

«Nous voulons éviter une fête auto-référentielle»

Marius Müller

La plupart des résidents sont catholiques, mais des étudiants et des consacrés appartiennent à d’autres confessions chrétiennes. Par le passé, la cité-pilote a également accueilli des représentants du bouddhisme et de l’islam. Le centre accueille aussi des jeunes se décrivant comme agnostiques, ou en recherche. «Chez les Focolari, nous cultivons l’ouverture à tous les dialogues, souligne Gwenaëlle. Si des jeunes viennent sans conviction particulière, ça ne les empêche pas de faire une expérience forte, de leur faire découvrir une spiritualité».

Gratitude

Cet esprit typiquement focolari sera un invité d’honneur des festivités. Notamment lors de la rencontre avec les habitants de la région et lors des célébrations œcuméniques prévues. D’autres activités mélangeant les cultures et les générations sont au programme. La fête se conclura avec l’inauguration du «Dé de la paix», qui sera placé dans le parc. «Il représente la loi de ce lieu, qui est l’amour réciproque, et qui a différentes nuances, note Denise. Ce sont six aspects de l’amour qui peuvent nous orienter dans notre vie quotidienne». Des «Dés de la paix» sous forme de porte-clés seront offerts aux participants.

«Nous serons principalement dans une attitude de remerciement à Dieu pour tout ce qui a pu être vécu ici, aux personnes qui ont œuvré, dans la lumière, mais aussi dans l’ombre, pour que ce lieu perdure», précise Gwenaëlle. «Nous voulons éviter une fête auto-référentielle, où l’on ne fait que s’envoyer des fleurs, renchérit Marius. Nous parlerons certes de notre expérience, mais en élargissant notre perspective». «Le but est de faire découvrir à la population ce qu’on vit ici, quelle est notre vie de communauté», poursuit Gwenaëlle. Une vie avec ses joies, mais aussi ses difficultés.

Les participants au weekend festif recevront un porte clé représentant les 6 faces de l’amour réciproque | © Raphaël Zbinden

L’ombre des abus

Car les Focolari n’entendent pas passer sous silence les aspects plus délicats de leur engagement. La question a pris une actualité particulière avec les récents scandales d’abus, aussi bien sexuels que spirituels et de conscience, qui ont marqué le mouvement en France. Des révélations qui ont fortement «ébranlé» le focolarisme mondial, note Gwenaëlle. «C’est difficile pour toutes les communautés nouvelles, nous ne nous mettons pas au-dessus des autres», relève-t-elle en référence à des scandales récents dans d’autres mouvements catholiques.

Les affaires ont été suivies d’une forte mobilisation des Focolari, dans le monde entier. De vastes efforts de prévention et de transparence sont entrepris. Chaque année, la cité-pilote fait par exemple venir l’association ESPAS (Espace de soutien et de prévention-abus sexuels), qui fournit un accompagnement accentué sur la gouvernance.

Accompagner les victimes

«Tout un effort s’est mis en route pour revoir la qualité de notre vie communautaire. Cela nous oblige à revenir aux racines de notre charisme, qui est l’unité dans la diversité», relève Denise. «Cette souffrance a aussi ouvert une porte pour le mouvement, affirme Gwenaëlle, pour regarder en face d’autres situations qui n’étaient pas à la lumière du jour. Je pense que Margaret Karam, l’actuelle présidente des Focolari, a la bonne attitude. Elle n’est pas là pour défendre l’institution, mais pour accompagner les victimes et faire des demandes de pardon».

«C’est en resserant les liens de notre communion que nous guérirons les blessures»

Gwenaëlle Delalande

Une thématique d’autant plus pesante que le complexe de Montet a abrité, de 1887 à 1961 l’institut Marini, un établissement d’éducation catholique où des maltraitances et des abus ont été commis contre de nombreux enfants. «C’est quelque chose qui reste bien sûr dans un coin de notre tête, assure Denise, mais nous nous réjouissons en même temps que le lieu aient pu échanger des énergies sombres contre des énergies lumineuses».

Les étudiants de la cité-pilote de Mariapoli Foco sont amenés à faire de menus travaux | © Focolari

Pour les Focolari, l’amour peut tout et pour Gwenaëlle, «c’est en resserant les liens de notre communion que nous guérirons les blessures». Une approche qui inclut la tête de l’Eglise. «Il était très important pour Chiara Lubich que nous ne perdions pas le contact avec Rome, note Marius. Nous avons toujours été accompagnés intelligemment par le Vatican».

Un autre engagement fort de la fondatrice, et qui s’est révélé salutaire, est la distinction établie dès le départ entre les différents états de vie. Les consacrés vivent ensemble, les familles vivent en famille…la différenciation des statuts des uns et des autres est essentielle, note le chargé de communication.

Grandir par le travail

Bien des défis sont à affronter pour le mouvement et pour le site de Montet, notamment celui des ressources. Même si la situation financière a été équilibrée l’année dernière, cet aspect fait figure de «combat quotidien», note l’administratrice. Outre les dons et subventions, les principales sources de revenus proviennent des activités d’accueil de groupes pour des sessions, conférences, retraites et autres.

Car de nombreux frais sont à couvrir. Le séjour d’un jeune se monte à peu près à 1’000 francs par mois. Les étudiants essayent de venir avec un mois de financement. La contribution qu’il leur est demandée dépend évidemment beaucoup de leur pays d’origine. Ils travaillent également pour subvenir à leurs propres besoins.

«Les expériences proposées visent surtout à augmenter le capital d’humanité des jeunes»

Une condition qui n’a pas uniquement un aspect pratique, mais également formateur. «Le monde du travail, c’est aussi apprendre à se confronter aux autres, aux différents points de vue, aux différentes cultures», souligne Marius. La carrière professionnelle n’est pas le but principal. Même si les deux choses peuvent se conjuguer. «Je connais des jeunes, au Burundi, qui ne savaient pas que faire de leur vie, raconte Tharcisse. Après être venus ici, ils ont trouvé une voie professionnelle.»

D’anciens étudiants du Centre de Montet présenteront les fruits engendrés par leur formation | photo d’illustration © Focolari

Toutes sortes de tâches sont demandées aux étudiants au Centre des Focolari, du nettoyage des toilettes à la cuisine, en passant par l’assemblage de chaises de bureau. Alors que certains travaillent à l’extérieur, le site héberge plusieurs entreprises, dont une fabrique de chaises et un atelier de cosmétiques naturels, qui emploient les jeunes contre des loyers préférentiels. Des sociétés qui ont pour obligation de partager les valeurs, notamment d’inclusion, des Focolari.

Pour «que tous soient un»

Les expériences proposées par la cité-pilote visent surtout à augmenter le capital d’humanité des jeunes. Gwenaëlle mentionne le cas d’une femme médecin brésilienne formée à Montet. «De retour au Brésil, elle nous a écrit qu’elle avait adopté une toute autre qualité de relations avec les personnes venant de milieux différents, notamment celles qui faisaient le ménage dans son cabinet».

Et Tharcisse de raconter sa propre expérience: «Avant de venir en Suisse, j’étais en conflit avec mon frère, au Burundi. Après avoir commencé ma formation ici, j’ai fait le premier pas d’une demande de pardon, ce qui a amélioré nos rapports. Cet enseignement m’a beaucoup apporté sur le plan humain et spirituel».

Autant de beaux fruits qui seront mis en avant lors des festivités des 15 et 16 octobre. Différents modules seront proposés, dont un dénommé «Engagement dans la société». Il présentera des expériences de jeunes passés par la cité broyarde qui, de retour dans leur pays, se sont engagés de façons diverses dans leurs communautés. Ils ont tenté de mettre en pratique l’une des paroles de l’Evangile au centre des convictions portées par les Focolari: «Que tous, ils soient un» (J 17, 1-26). (cath.ch/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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