Crainte de provocations programmées

Cuba: Le gouvernement cherche à minimiser les tensions avec l’Eglise catholique

La Havane, 16 octobre 1997 (APIC) Le regain de tension entre le gouvernement cubain et l’Eglise catholique embarrasse plus qu’il n’y paraît les autorités de La Havane, à trois mois de la visite de Jean Paul II, qui est attendu à Cuba du 21 au 25 janvier prochain. On craint de part et d’autre la manipulation et les provocations programmées.

Au lendemain de l’annulation d’une messe dominicale et d’une procession religieuse organisées en préparation de cette visite, la responsable des Affaires religieuses du parti communiste cubain, Caridad Diego, a dû revenir sur ses premières explications données aux journalistes. C’est bien le projet d’un millier de catholiques cubains, réfugiés à Miami, de venir suivre la visite de Jean Paul II à bord d’un paquebot spécialement affrété qui a fait bondir les autorités de la Havane.

Le gouvernement cubain, cible de l’opposition anticastriste orchestréée depuis Miami – certains groupes d’exilés n’hésitent pas à monter des attentats terroristes pour fragiliser l’économie de l’île, dans le but de faire tomber un jour le régime -, craint des provocations programmées. Il voit dans l’initiative des réfugiés de Miami un nouvel exemple et une nouvelle source de « provocations et de manipulations politiques de la part de groupes radicaux en exil ».

Procession interdite pour des raisons d’ordre public

Mais pourquoi avoir interdit, le 12 octobre, la procession de la Vierge de la Charité d’El Cobre et la messe en plein air ? « Pour des raisons d’ordre public ! », répond Caridad Diego. « Nous ne sommes pas préoccupés par les dévotions de notre peuple, ajoute-t-elle, mais par le fait que la procession pourrait être exploitée sur un plan politique. »

Bref, le gouvernement cubain entend éviter « toute provocation », avertit son porte-parole, sans cacher que Cuba espère des bénéfices politiques de la visite papale, à commencer par une levée de l’embargo américin qui frappe l’île depuis des dizaines d’années. Il est vrai que le pape a dénoncé à plusieurs reprises cet embargo, comme il l’a fait pour d’autres embargos, parce que le Vatican estime que pareilles mesures pèsent de façon disproportionnée et sans distinction sur toute une population, à commencer par les familles les plus pauvres.

Le pape visitera des lieux symboliques de la révolution cubaine

L’archevêque de La Havane, le cardinal Jaime Lucas Ortega y Alamino, a communiqué récemment, lors d’une messe en plein air à laquelle assistaient un bon millier de fidèles, l’itinéraire prévu par le pape dans l’île: outre la capitale La Havane, le pape devrait se rendre à Camaguey, Santiago de Cuba, Santa Clara et El Cobre. C’est avant tout les deux dernières étapes qui seront délicates, car ces lieux sont chargés d’émotion et d’une forte charge symbolique pour la révolution cubaine.

A Santa Clara, qui vient d’accueillir les restes du Commandant Ernesto Guevara, assassiné en Bolivie il y a tout juste 30 ans, la figure du « Che » y est vénérée plus que nulle part ailleurs à Cuba. Pour beaucoup, il représente une sorte d’icône « religieuse » dans une ville où il a remporté une victoire décisive contre les troupes du dictateur Batista. La venue du pape dans ce qui est devenu un sanctuaire national de la révolution cubaine sera un moment particulièrement intense, voire tendu.

La messe prévue à El Cobre, près de Santiago de Cuba, au sanctuaire de la « Virgen de Caridad de El Cobre », fait également partie du mythe révolutionnaire cubain. Les insurgés qui se battaient contre le colonisateur espagnol portaient au cou la médaille de la Vierge de Charité. On dit que Fidel Castro lui-même l’aurait portée au début. Les autorités cubaines auront du mal à contrôler sans difficultés – si elles l’autorisent – la procession des fidèles portant l’image de la Vierge.

La messe prévue sur la Place de la Révolution à La Havane ne pourra pas masquer l’omniprésence, en arrière-fond, des portraits géants des héros nationaux José Marti et Che Guevara. Mais des soucis plus terre à terre inquiètent les organisateurs de cette visite historique: le manque de carburant et la faiblesse des infrastructures de transport qui pourraient empêcher les fidèles de venir en masse, sans compter les avertissements dissuasifs donnés aux fonctionnaires de l’Etat, leur enjoignant de ne pas participer aux messes papales.(apic/imedia/cic/be)

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