Canada: Spéculations sur la succession de Jean Paul II à la télévision canadienne
Vancouver, 21 octobre 1997 (APIC) Qui sera le successeur de Jean Paul II sur le siège de Pierre? Un documentaire de la télévision canadienne a tenté de répondre à cette question en indiquant le nom de trois cardinaux papables: un Nigérian, un Italien et un Brésilien. Les auteurs de l’émission, diffusée dans tout le Canada le 16 octobre sur la chaîne publique nationale CBC-TV, ont interrogé également des d’évêques et des journalistes catholiques sur le bien-fondé de ces spéculations.
Comme pour se dédouanner de l’indiscrétion de la question, l’émission télévisée a évoqué les rumeurs qui circulent sur la santé de Jean Paul II. La succession du pape, âgé de 77 ans et qui serait atteint, disent certains, de la maladie de Parkinson – maladie touchant le système nerveux central – fait depuis une dizaine d’années l’objet de nombreuses spéculations de la part des médias. Il est possible que le pape actuel guide son Eglise vers le 21e siècle. C’est en tous cas un de ses voeux les plus chers. Pourtant, alors que l’on fête le 20e anniversaire de son pontificat au Vatican, les avis sur le nom du 265e pape vont bon train, même dans les couloirs du Vatican.
L’une des questions est de savoir si le prochain pape sera italien. En effet, Jean-Paul II est le premier pape non italien depuis 455 ans. Son élection, en 1978, pourrait avoir rompu définitivement cette mainmise italienne sur la succession.
Les trois cardinaux en évidence
Selon le documentaire canadien, les candidats « papabile » les plus souvent cités seraient: les cardinaux Francis Arinze, Carlo Maria Martini et Lucas Moreira Neves.
Le cardinal Francis Arinze, (65 ans) fils d’un chef nigérian, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, considéré comme « l’émissaire auprès du monde non chrétien ». Il est au Vatican depuis 20 ans et représente l’Afrique, où la croissance de l’Eglise catholique est la plus forte. Il est aussi vu comme un intermédiaire dans le dialogue avec l’islam. Il préside d’ailleurs actuellement la Commission pour les rapports religieux avec les musulmans.
Autre papable renommé: le cardinal Carlo Maria Martini, (70 ans) jésuite et archevêque de Milan, considéré comme libéral progressiste, et, selon la presse italienne, « homme de la renaissance ». Il parle souvent à la radio et à la télévision. Il a écrit une cinquantaine d’ouvrages. Les jeunes se pressent par milliers pour assister à ses études bibliques du samedi soir. Selon CBC-TV, sa popularité est vue comme une menace par les « éminences grises du Vatican ».
Dernier de la liste, le cardinal Lucas Moreira Neves, (72 ans), archevêque de Salvador au Brésil, et président de la Conférence nationale des évêques brésiliens (CNBB). Ancien journaliste et prêtre dominicain descendant de colons européens et d’esclaves africains, il est présenté par CBC-TV comme le favori du pape Jean-Paul II. Il représente le plus grand pays catholique du monde. Il a travaillé pendant 13 ans au Vatican, jusqu’à ce que le pape le renvoie dans son pays, dit-on, pour freiner l’engouement du clergé pour la théologie de la libération. Sur le plan théologique, il est considéré comme un conservateur. Proche de Jean-Paul II, il partage la préoccupation de celui-ci pour les pauvres.
L’avis de l’archevêque de New York
Les différences entre ces trois cardinaux, aux yeux des auteurs de l’émission, révèlent une profonde division au sein de l’Eglise quant au choix du prochain pape. L’archevêque de New York, le cardinal John O’Connor, nie qu’il y ait polarisation sur ce sujet. « Le choix, a-t-il dit aux journalistes, ne se fera pas entre le candidat blanc ou noir, entre l’Est ou l’Ouest, mais consistera à trouver quelqu’un qui puisse rassembler toutes les parties ». « C’est l’Eglise de Dieu – et aucun d’entre nous ne détient le monopole de la vérité », a-t-il déclaré. Personne ne peut prévoir l’issue du conclave – assemblée de cardinaux qui se réunit pour élire le pape. Il y a, dans cette élection, a-t-il ajouté, « une divine inspiration et heureusement une inconnue… »
Le journaliste italien Marco Politi, auteur avec son collègue Carl Bernstein, d’une récente biographie de Jean-Paul II, évoque « un malaise au Vatican », à l’approche de « l’inévitable », et souligne la nécessité d’une certaine flexibilité après une « papauté napoléonienne ».
Attention aux rumeurs
Pour Thomas Reese, prêtre catholique et expert en sciences politiques de l’Université de Georgetown, auteur d’un livre sur le Vatican, même si c’est « la règle tacite » de ne pas en parler en public, les cardinaux en parlent beaucoup en privé. Mais trop louer un candidat risquerait de ruiner ses chances, a averti le jésuite américain Vincent O’Keefe, citant le dicton romain: « Qui entre pape au conclave, en ressort cardinal ».
Peter Stanford, journaliste britannique et auteur de nombreux ouvrages sur l’Eglise, a rappelé les données statistiques: Il y a eu 263 papes depuis saint Pierre, dont 211 Italiens. Dans le Guardian, de Londres, il rappelle que le conclave, s’il devait avoir lieu aujourd’hui se composerait 109 cardinaux avec droit de vote, ( 33 autres cardinaux, âgés de 80 ans ou plus, n’ont pas le droit de vote). « Une majorité de deux-tiers est exigée, mais s’il y a impasse trop longtemps, une majorité simple est suffisante pour l’élection », fait remarquer Peter Stanford. Le cardinal Martini est le plus souvent mentionné comme l’un des successeurs possibles de Jean-Paul II. Parmi les autres noms fréquemment cités figurent ceux du cardinal Arinze, du cardinal béninois Bernardin Gantin, (75 ans), préfet de la Congrégation pour les évêques, et d’un autre cardinal italien, Pio Laghi, (75 ans), préfet de la Congrégation pour l’Education catholique.
Le journaliste met cependant en garde contre les risques de la spéculation. « Qui, par exemple, en 1978, aurait parié sur un non-Italien, sans parler d’un Polonais inconnu? », conclut-il avec prudence. (apic/eni/fb/ba)
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