JMJ: A Lisbonne, une Afrique en liesse et en prière autour du pape

Malgré les difficultés administratives et les restrictions de visas, toutes les délégations africaines sont arrivées à Lisbonne pour les JMJ. Visites, prières, conférences, catéchèses et messes, les jeunes du continent africain profitent de chaque instant. Pour ceux qui n’ont pas pu faire le déplacement, les réseaux sociaux prennent le relais.

Max Savi Carmel, à Lisbonne pour cath.ch

Avec dix personnes arrivées à Lisbonne depuis le 29 juillet pour les Journées Mondiales de la Jeunesse, JMJ, «le Bénin a opté pour la politique de nos moyens», explique l’abbé Jonathan Capo-Chichi, aumônier national des jeunes, à Cath.ch. Le Togo voisin se frotte les mains avec ses 30 participants. Fait rarissime, ils ont tous décroché leurs visas et sont arrivés à Lisbonne après une semaine de pré-JMJ à Evora, au centre du Portugal.

De son côté, la République démocratique du Congo (RDC) s’associe à la fête, même si seulement 50 de ses 500 inscrits sont à Lisbonne. «Nous sommes heureux d’être là, peu importe le nombre», concède le Père Zéphyrin Ligopi. Quant à Eliza, 24 ans, elle pense déjà aux prochaines JMJ. «Je n’en manquerai plus une!» promet la fidèle de la Paroisse St Martin de Batouri au Cameroun, arrivée au dernier moment, le 02 août.

Seulement 50 des 500 Congolais inscrits ont pu se rendre à Lisbonne. Ici des membres de la délégation conduite par le Père Zéphyrin Ligopi | © Max Savi Carmel

Ce qui n’est pas le cas de l’abbé Victor. L’aumônier des jeunes du diocèse de Batouri était prêt pour Lisbonne avant de devoir renoncer. Et pour cause, sur les 132 inscrits du pays, seuls 14 visas ont été accordés. Mais malgré tout, l’Afrique est, comme tous les autres continents présents, à la fête. Des pages Facebook, des groupes WhatsApp, des lives Tiktok, les délégations ici s’organisent pour faire vivre l’événement aux jeunes restés sur place.

Facebook pour les jeunes restés au pays

Outre les directs pour Radio Maria au Togo, Christian Barrigah a alimenté de nombreuse page Facebook pour les jeunes restés au pays | © Max Savi Carmel

Christian Barrigah ne se donne aucun répit. Le journaliste togolais de Radio Maria fait des allers retours entre Aruda et le centre de Lisbonne, «une vingtaine de kilomètres tout au plus en bus», constate-t-il. Au-delà des directs qu’il multiplie pour la radio catholique au Togo, il alimente de nombreuses pages Facebook. Dès le lendemain de l’arrivée du pape, et pour trois jours, il fait des directs depuis le Portugal au Togo avec la Coordination des jeunes de l’archidiocèse. Réunis au Bas-Fonds St Joseph à Lomé, des centaines de jeunes suivent ainsi les activités en temps réel depuis la capitale portugaise.

«Une expérience qui fut une réussite lors de l’édition de Panama», rappelle Christian Barrigah. A l’époque, le Togo n’avait pas pu envoyer de délégués. Les Togolais ont passé une semaine de pré-JMJ à Evora où l’archidiocèse se dit «heureux de les avoir accueillis». Pour Edmond Ayétan, «le séjour à Evora fut enrichissant», il précise y «avoir côtoyé d’autres jeunes». Un avis partagé par Olivier Kossivi Agassa, 39 ans, un autre Togolais, satisfait de «l’ambiance fraternelle et fervente». C’est d’ailleurs lui qui a tenu le drapeau du Togo pendant la cérémonie d’ouverture des JMJ à Lisbonne.

Ferveur et émotions à Lisbonne

Mercredi 2 août, 10h. Des milliers de jeunes se bousculent autour de la base militaire de l’aéroport de Figo Maduro. Ernest Souley s’impatiente, depuis 6h du matin. «Je dois voir le pape de près et c’est la seule occasion», indique ce fidèle du Niger. Le 26 juillet, un coup d’État militaire intervenu dans son pays a imposé la fermeture de l’aéroport de Niamey. «L’esprit saint m’a soufflé de partir le 25 juillet», explique ce professeur de philosophie. A peine sorti de l’avion, le pape se rend au palais présidentiel où l’attend le chef de l’État portugais. En face du palais, un drapeau éthiopien dans la main, Abeo Alemayehu est retenu par une barrière policière. Le jeune orthodoxe de 28 ans n’a pas réussi à accéder à la place Afonso de Albuquerque en face de laquelle Marcelo Rebelo de Sousa accueille le pape. «Le plus important est d’être là, de représenter l’Ethiopie», se console-t-il.

Pendant ce temps, au centre de Lisbonne, la délégation camerounaise suit une catéchèse. «Nous avons recherché et trouvé une catéchèse en français», précise l’abbé Clément Mevo. L’aumônier général de l’apostolat des laïcs du Cameroun déplore que «des refus de visas aient exclu tous les jeunes et laïcs», lui imposant «une délégation constituée uniquement de prêtres et d’une religieuse».

Des Togolais ont passé un moment avec des jeunes Espagnols à Evora | © Max Savi Carmel

En fin de journée, à la paroisse St Louis-des-Français au cœur de Lisbonne, un groupe d’Ivoiriens, de Camerounais, de Burkinabé, de Nigériens et de Gabonais se fond dans une foule de jeunes venus de la région parisienne pour prier «pour le pape». Une prière suivie dans d’un pique-nique la cour paroissiale. La soirée finira avec un commentaire du thème des JMJ. Venu de Yamoussoukro (centre de la Côte d’Ivoire), Guillaume, 26 ans, leur fera fredonner, en honneur de la Vierge Marie, une chanson en baoulé, sa langue natale.  

Autour de Marie

Les trois jours de catéchèse, animés pour la première fois dans l’histoire des JMJ par les évêques de la RDC, ont tourné autour du thème: «Marie se leva, et s’en alla en hâte». «Un grand honneur qui ne se refuse point», a soufflé le cardinal Fridolin Ambongo à cath.ch. L’archevêque de Kinshasa préside le dernier jour de catéchèse. Avant même d’arriver à Lisbonne, «les délégués du Burkina-Faso-Niger ont débattu du thème lors des préparatifs», rappelle l’Abbé Valery qui conduit la délégation commune aux deux pays sahéliens. Pour lui, ce thème est aussi un appel à aller vers les autres, «comme le fit Marie qui rendit visite à sa cousine Elisabeth».

Quelques uns de jeunes de la délégation du Bénin, accompagnés des bénévoles portugais | © Max Savi Carmel

Sr Anne-Marie, unique femme de la délégation camerounaise et porteuse du drapeau à la cérémonie d’ouverture, interprète le thème comme «une exhortation à vivre pleinement l’Evangile du Christ, dans l’obéissance comme Marie». Quant au Togolais Koffi Fabrice Kakli, qui a participé à des rencontres sur le thème, «ces JMJ doivent renforcer» sa foi. La dévotion mariale est très présente en Afrique. Membre de la Légion de Marie à Abidjan, Anicet a été «particulièrement touché par le thème». Selon lui, «Marie est la meilleure voie vers le Christ». Abeo Alemayehu a, quant à lui, retrouvé, à cette occasion, «le bonheur du rosaire». Au retour à Addis-Abeba, «je reprendrai le chapelet quotidien que j’ai abandonné depuis cinq ans», promet-il.

L’après JMJ déjà dans les esprits

L’abbé Jonathan Cakpo-Chichi liste une série de questions auxquelles devrait répondre chaque délégué à son retour au pays. «Qu’a-t-il reçu lors des JMJ? Qu’est-ce qui a changé dans sa vie? Quel message a-t-il pour les autres jeunes qui ne sont pas arrivés à Lisbonne?». Idem pour l’abbé Valery qui veut pousser les «jeunes du Burkina Faso et du Niger à impacter la vie de leur paroisse» car pour lui, «ils sont des relais de témoignages». Du côté de la délégation camerounaise, l’abbé Clément Mevo qui la conduit organisera, au retour, un «séminaire pour les 26 aumôniers de tous les diocèses du pays» afin de «perpétuer l’expérience et les messages des JMJ».

La délégation Burkina Faso-Niger en tenue traditionnelle | © Max Savi Carmel

Koffi Fabrice Kakli a fait une promesse à la Mère de Jésus, «partager la ferveur de Lisbonne sur la paroisse Christ-Roi d’Adétikope», banlieue de Lomé où il réside. Une certitude partagée par la plupart des jeunes Africains, «il y aura un après-Lisbonne».

Ce jeudi, au Parc «Eduardo VII» où se tient la cérémonie d’accueil du pape, des jeunes nigérians et kenyans qui viennent de se rencontrer échangent des numéros WhatsApp. Objectif: «faire la fête dimanche après le départ de François». Car si les JMJ prennent fin samedi, beaucoup de jeunes entendent bien rester un ou deux jours de plus à Lisbonne. En fête. (cath.ch/msc/bh)

Max Savi Carmel

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