Homélie du 13 août 2023 (Mt 14, 22-33)

Chanoine Simon Roduit, hospice du Grand-Saint-Bernard, VS

Dans l’oraison d’ouverture de la messe de ce dimanche, nous avons prié pour que l’Esprit-Saint nous aide à être toujours plus des enfants… de Dieu.
Comment être des enfants de Dieu ? Lors d’un camp pour familles chrétiennes au Simplon, en tant que séminariste, je devais présenter le thème « devenir comme des enfants de Dieu pour entrer dans le Royaume », et il m’était difficile de le faire en voyant ces enfants en pleine crise d’adolescence, ou se disputant entre frères et sœurs. Pourtant, Dieu nous demande d’être comme des enfants. A la veille de la reprise scolaire, voyons comment devenir des enfants de Dieu à travers les grandes étapes de l’enfance : la crise d’adolescence que vit Elie dans la première lecture, l’apprentissage de la Parole de saint Paul dans la deuxième lecture, et l’apprentissage de la marche par Pierre dans l’Evangile.

Sortir de nos cavernes – crise d’adolescence

Lorsque l’on est adolescent, une multiplicité de changements viennent affecter notre corps et notre esprit, et cela peut être difficile à gérer. C’est pourquoi les adolescents ont besoin d’être en groupes pour ne pas s’enfermer dans la solitude de leur chambre, de leur monde.

De même, dans la première lecture Elie fait sa crise d’ado. Il est le dernier prophète fidèle à Dieu dans tout Israël ; il vit de se confronter à 450 prophètes de Baal qu’il a tous tués. A présent, la reine Jézabel veut sa peau, même son serviteur l’a quitté. Il cherche à se laisser mourir à l’ombre d’un buisson. Mais voilà qu’un ange vient par deux fois le nourrir, et il lui demande de monter sur la montagne, mais Elie s’enferme dans une caverne. Alors que Dieu lui parle et lui demande de sortir de la caverne, Elie reste à l’intérieur par peur d’affronter l’ouragan, le tremblement de terre et le feu. Et ce n’est que lorsque la brise légère souffle qu’il sort et entend le message de Dieu à son égard : « Elie, n’aie pas peur, je serai avec Dieu, et par toi, j’agirai dans le peuple ; c’est moi qui ai tout créé, et donc toute la violence que tu peux percevoir dans le monde n’est pas plus forte que moi.

Et nous, sommes-nous parfois enfermés dans nos cavernes d’adolescents ? Est-ce que dans la caverne de notre solitude, nous ne disons pas parfois que personne ne nous comprend ; dans les cavernes de nos mauvaises habitudes, est-ce que nous ne désespérons pas que Dieu puisse nous changer ; dans la caverne d’une maladie, est-ce que nous ne croyons pas parfois qu’il est trop difficile pour nous de la surmonter ? C’est dans ces cavernes que la voix de Dieu vient résonner : « Sors, et tiens-toi sur la montagne, je suis avec toi »

Prendre l’accent de Dieu – apprendre à parler

Lorsqu’un enfant apprend à parler, il lui faut écouter de nombreuses années ses parents, pour se mettre à répéter peu à peu quelques paroles, pour ensuite être corrigé de nombreuses fois à chaque faute d’orthographe, et améliorer graduellement son langage. L’aisance ne viendra qu’après de nombreuses années pour parler comme ses parents.

Ainsi saint Paul dans la lecture s’attriste et ne comprend pas pourquoi le peuple juif, qui a eu l’habitude d’entendre Dieu lui parler, n’a pas réussi à reconnaître la voix de Dieu dans l’enseignement de Jésus. Il invoque sa conscience qui témoigne en lui par l’Esprit-Saint que Jésus est le messie. Mais il lui a fallu entendre la voix de Jésus sur le chemin de Damas, puis de nombreuses fois pour annoncer le Christ à tous. « Malheur à moi si je n’annonce pas l’Evangile ! »

De même dans notre vie, il est important de parler à Dieu et de l’écouter dans notre vie de prière, afin de prendre son accent, afin que les paroles qui sortent de notre bouche ne soient que des paroles qui bénissent et non des paroles qui maudissent. Que le Seigneur nous forme lorsque notre langue fourche, afin de toujours avoir des paroles qui élèvent ceux qui nous entourent. Alors nous parlerons comme de vrais enfants de Dieu, avec son accent divin.

Garder les yeux fixés sur Jésus – apprendre à marcher

Dans l’apprentissage hésitant de la marche, un bébé qui se dresse sur ses deux pieds n’a qu’un seul repère, qu’une seule chose qu’il fixe : les bras ouverts de sa maman ou de son papa à 10, 20 ou 60 cm, qui l’encourage à avancer et qui le rattrape si bébé perd l’équilibre. Et la confiance absolue d’un nourrisson envers ses parents lui permet de risquer l’impossible.

De même, dans l’Évangile, Pierre a obéi à Jésus qui l’a « obligé » à monter sur la barque, cette barque ballotée par la tempête du lac de Gennésareth. Et lorsqu’il reconnait Jésus, il reçoit son invitation à ne pas regarder sa peur et à lui faire confiance. Il demande même à Jésus de le rejoindre en marchant sur les eaux. Impossible pour l’homme. Sur ce simple mot « Viens », il se met à marcher. La seule chose qu’il regarde, c’est Jésus. Mais dès que son regard se focalise sur la peur des vagues, il se met à sombrer. Seule la force du Christ qui récupère de son bras puissant l’attention de Pierre lui permet de refaire surface.

Que nous aussi, lorsque nous traversons des tempêtes, nous gardions les yeux fixés sur Jésus et non pas sur nos peurs ou sur les difficultés. Ainsi, nous pourrons apprendre avec Jésus à faire des pas inespérés dans la foi, dans la charité ou dans l’espérance.

Ainsi nous deviendrons des chrétiens adultes, de vrais enfants de Dieu sortis de leur caverne, sachant parler avec l’accent de Dieu et marcher vers le Royaume. Amen

19e dimanche du Temps ordinaire
Lectures bibliques : 1 Rois 19, 9-13; Psaume 84; Romains 9, 1-5; Matthieu 14, 22-33

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