Mongolie: le pape encourage les catholiques chinois

Créant la surprise, au terme de la messe célébrée à Oulan-Bator, en Mongolie, le 3 septembre 2023, le pape a pris l’évêque de Hong Kong par la main. Adressant un signal direct aux autorités de la République populaire de Chine, il a invité les catholiques chinois à être de «bons chrétiens et de bons citoyens». 

C’est sous les applaudissements émus des fidèles présents que le pape a fait venir auprès de lui l’évêque de Hong Kong ainsi que l’évêque émérite, le cardinal John Tong-Hon – l’autre évêque émérite de l’ex-colonie britannique, le cardinal Joseph Zen, étant pour sa part absent. Créant visiblement une vive surprise y compris parmi ses propres assistants liturgiques, le pape a alors demandé à prendre le micro pour s’adresser directement à la Chine. 

«A tout le peuple chinois»

«Ces deux frères évêques, l’émérite de Hong Kong et l’actuel évêque de Hong Kong: je voudrais profiter de leur présence pour saluer chaleureusement le noble peuple chinois. À tout le peuple, je souhaite le meilleur, et toujours aller de l’avant, toujours progresser. Et je demande aux catholiques chinois d’être de bons chrétiens et de bons citoyens. Je vous le souhaite à tous», a lancé le pape, ravi d’avoir ainsi réuni «un jésuite et un salésien», a-t-il remarqué avec humour.

Cet appel inattendu du pape s’inscrit dans un contexte particulier, alors que depuis plusieurs années, la discrétion du pape face à la répression des mouvements pro-démocratie à Hong Kong lui a valu de vives critiques. Par ailleurs, l’accord de 2018 établi entre le Saint-Siège et la République populaire de Chine au sujet des nominations épiscopales, bien que reconduit en 2020 et 2022, semble avoir porté peu de fruits: de nombreux diocèses demeurent vacants ou dans une situation canonique incertaine.

Le 15 juillet dernier, le Saint-Siège avait rendu publique la nomination de Mgr Joseph Shen Bin comme évêque de Shanghai, mais ce transfert avait été décidé plusieurs semaines auparavant par les autorités chinoises sans consultation de Rome. Plus que d’une nomination formelle, il s’agissait donc plutôt d’une reconnaissance du fait accompli.

Un médiateur sino-romain

La prochaine création cardinalice de l’actuel évêque de Hong Kong, Mgr Stephen Chow Sau-yan, le 30 septembre prochain, apparaît donc dans ce contexte comme un geste important, faisant de ce nouveau cardinal un véritable médiateur entre Rome et Chine. 

Connu pour sa finesse diplomatique, Mgr Chow est parvenu à la fois à obtenir la confiance de son prédécesseur le cardinal Zen, pourtant connu comme un opposant virulent à l’Accord de 2018, et à établir des relations avec la Chine continentale. Il s’est notamment rendu à Pékin en avril dernier afin de rencontrer l’archevêque de la capitale chinoise et de renforcer les échanges entre les diocèses de Pékin et de Hong Kong.

«Ciao ni hao viva il papa»

La déclaration spontanée du pontife argentin a suscité une vive émotion dans le stade, donnant à son voyage en Mongolie un relief particulier, et une résonance allant bien au-delà de ce pays de steppes. Des fidèles chinois présents dans la salle ont crié «Ciao ni hao viva il papa», un mélange d’italien et de chinois que l’on peut traduire par «salut, bonjour, vive le pape!»

Le pape François, après le mot de remerciement du cardinal Marengo, a également remercié le peuple mongol pour son hospitalité. «Je remercie Dieu pour vous parce que, à travers vous, Il aime accomplir de grandes choses dans la petitesse. Merci, parce que vous êtes de bons chrétiens et d’honnêtes citoyens», a-t-il souligné. Il a encouragé les catholiques de la Mongolie à aller de l’avant «avec douceur et sans peur, en ressentant la proximité et l’encouragement de toute l’Église, et surtout le regard tendre du Seigneur qui n’oublie personne et qui regarde avec amour chacun de ses enfant ». 

Hommage au père Teilhard de Chardin

Au terme de la prière de l’Angélus, le pape a également rendu un hommage appuyé au jésuite français Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955), qui fut engagé dans des recherches géologiques en Chine à partir des années 1920 et fut reconnu comme l’un des esprits les plus brillants de son temps, mais fut longtemps suspect d’hétérodoxie aux yeux de Rome.

Au contraire, le premier pape jésuite de l’Histoire a mis longuement en valeur la vision de l’eucharistie de l’auteur de La Messe sur le monde. «La célébrer sur cette terre m’a rappelé la prière du père jésuite Pierre Teilhard de Chardin, adressée à Dieu il y a exactement 100 ans, dans le désert d’Ordos, non loin d’ici », a expliqué le pontife, citant ces mots du jésuite français: «Je me prosterne, ô Seigneur, devant votre Présence dans l’Univers devenu  ardent et, sous les traits de tout ce que je rencontrerai, et de tout ce qui m’arrivera, et de tout ce que je réaliserai en ce jour, je vous désire et je vous attends». 

«Le jésuite français désirait ardemment célébrer la messe, mais il n’avait ni pain ni vin avec lui», a expliqué François, faisant probablement allusion à la situation de nombreux catholiques privés d’eucharistie en Chine et dans d’autres pays d’Asie marqués par des restrictions à la liberté religieuse et par le manque de missionnaires.

«Sur l’autel du monde »

«Ce prêtre, souvent incompris, avait l’intuition que l’Eucharistie est toujours célébrée, en un sens, sur l’autel du monde et qu’elle est ›le centre vital de l’univers, le foyer débordant d’amour et de vie inépuisables’, même à notre époque de tensions et de guerres», a insisté François, qui avait fait référence à la pensée du père Teilhard de Chardin dans son encyclique Laudato Si’, en 2015. 

Le pape a enfin exhorté à réciter cette prière du père Teilhard de Chardin: «Verbe étincelant, Puissance ardente, Vous qui pétrissez le Multiple pour lui insuffler votre vie, abaissez, je vous prie, sur nous, vos mains puissantes, vos mains prévenantes, vos mains omniprésentes». (cath.ch/imedia/cv/cd/gr)

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