«En 2024, la liberté des femmes de recourir à l’IVG sera irréversible», a déclaré le président de la République sur le réseau social X (anciennement Twitter). «Le projet de loi constitutionnelle sera envoyé au Conseil d’État cette semaine et présenté en conseil des ministres d’ici à la fin de l’année.»
La Conférence des évêques de France qui s’était prononcée sur le sujet le 9 décembre 2022 n’a pour l’heure pas réagi officiellement à cette déclaration. Mais Mgr d’Ornellas, présent à Rome pour le Synode, s’est exprimé sur Radio Vatican. Le responsable du groupe de travail sur la bioéthique de la CEF regrette la confiscation d’un authentique débat sur un sujet qui mériterait une réflexion d’humanité et de conscience impliquant l’ensemble de la société.
Mgr d’Ornellas, archevêque de Rennes, voit la constitutionnalisation du droit à l’avortement comme «un aveu de faiblesse sur notre capacité à débattre sereinement au sujet de l’IVG». Il s’inquiète des contradictions juridiques qui en découlent. L’article 16 du Code civil garantit le respect de l’être humain dès le commencement de sa vie. «Ça, c’est le principe «organisateur» et du coup l’IVG devient une exception», décrit-il. Mais par son inscription dans la Constitution, l’IVG devient à son tour «principe». Il poursuit: «Cela voudrait-il dire que le droit à la vie devient une exception?».
«Je ne sais pas ce que cela signifiera pour une société d’avoir inscrit dans sa Constitution le droit à l’IVG. Nous serions quasiment le seul État au monde à avoir inscrit un tel droit dans notre Constitution. Parmi les pays européens, nous sommes le seul pays où le nombre d’avortements ne cesse de grandir chaque année. Il est deux fois plus élevé qu’en Allemagne et je ne pense pas qu’inscrire dans la Constitution la liberté d’accès à l’IVG supprimera le fait que ce soit «toujours un drame».
Outre le droit à la vie, Mgr d’Ornellas s’inquiète pour la liberté d’expression et la liberté de conscience des médecins qui refuseraient de pratiquer des avortements ou des soignants qui s encourageraient ou aideraient des femmes à renoncer à l’IVG.
L’archevêque de Rennes cite à plusieurs reprises Simone Veil (ministre qui a obtenu en 1974 la dépénalisation de l’avortement, NDLR) et sa vision selon laquelle l’avortement est «un drame et restera toujours un drame».
«De fait, on n’arrive pas à mener ce débat en France, parce qu’on le mène uniquement à partir d’une seule idée qu’est la vie privée de la femme et son autonomie, poursuit Mgr d’Ornellas. Pourtant, le réel est autre. Des études précises montrent que souvent ce sont des déterminismes sociaux qui provoquent à l’avortement, par exemple la pauvreté. Ces déterminismes sont en quelque sorte des contraintes, parfois non reconnues. La problématique de l’avortement concerne la société tout entière, les mineurs et les majeurs, avec parfois des situations complexes et très douloureuses.»
L’évêque s’interroge aussi sur le fait qu’en France, le nombre d’avortements augmente alors que dans les autres pays européens, il tend à diminuer grâce à une prévention sociale déterminée sans aucunement restreindre les conditions d’accès à l’IVG.»Quel est donc l’avenir d’une société où 1/5ème des grossesses s’achèvent avec l’avortement?», questionne-t-il
À ce titre, il rappelle que l’Église, quoi qu’il en soit, devra demeurer un lieu d’écoute et d’accueil: «Rien n’empêchera la compassion, l’écoute, le dialogue sur le terrain.» (cath.ch/newsva/cx/mp)
Maurice Page
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