L’agence I.MEDIA détaille les raisons qui motivent la condamnation de neuf des dix accusés.
Raffaele Mincione – 5 ans et six mois de prison, 8’000 euros d’amende et interdiction perpétuelle d’exercer une charge publique.
En 2014, la secrétairerie d’État signe un accord avec le banquier italo-britannique Raffaele Mincione qui l’autorise à gérer 200 millions de dollars via son fonds d’investissement luxembourgeois Athena GOF dans le but d’acquérir un immeuble à Londres. La justice estime que cet argent a été investi dans des conditions qui, dès le départ, étaient contraires aux intérêts et aux normes du Saint-Siège, notamment parce qu’elles laissaient le banquier investir l’argent dans des placements hautement spéculatifs. Raffaele Mincione est donc reconnu coupable de détournement de fonds, mais aussi d »autoblanchiment’ d’argent en tant que gestionnaire du fonds choisi pour héberger l’argent du Saint-Siège.
Le tribunal considère de plus que certains montages financiers mis en place par Raffaele Mincione par la suite pour investir l’argent de la secrétairerie d’État auraient servi à masquer des pertes dans trois précédents investissements et relèveraient donc encore de l’autoblanchiment.
Le juge a ensuite considéré que Raffaele Mincione a envoyé des sommes d’argent à Enrico Crasso, qui l’avait introduit au Vatican, par le biais d’une société nommée Aspigam International et située à Dubaï. La somme dépasserait le million d’euros. Il est donc condamné pour corruption entre particuliers.
Enrico Crasso – 7 ans de prison, 10’000 euros d’amende et interdiction perpétuelle d’exercer une charge publique.
Le banquier d’affaires, principal gestionnaire du patrimoine financier de la secrétairerie d’État entre 1993 et 2020, a participé à l’opération financière visant à acquérir l’immeuble de Londres. La justice vaticane considère, à ce titre, qu’il est coupable comme Raffaele Mincione et les autres acteurs de l’accord de détournement de fonds.
Comme Raffaele Mincione, il est aussi condamné pour corruption entre particuliers pour avoir reçu des avantages indus – à hauteur d’un million d’euros par le biais d’une société, Aspigam International, basée à Dubaï – de la part du banquier anglo-italien qu’il avait introduit au Vatican.
Il est enfin condamné pour l’autoblanchiment des sommes reçues via la société Aspigam.
Angelo Becciu – 5 ans et demi de prison, 8’000 euros d’amende et interdiction perpétuelle d’exercer une charge publique.
Principale figure du procès, l’ancien substitut de la secrétairerie d’État entre 2011 et 2018 se voit reprocher d’avoir validé l’opération financière de l’immeuble londonien – 200 millions de dollars – alors que celle-ci ne répondait pas aux règles du Saint-Siège, et est donc condamné pour détournement de fonds.
Il est aussi condamné pour le détournement de fonds de près de 575’000 euros de la secrétairerie d’État versés entre 2018 et 2019 à Cecilia Marogna pour le financement d’une opération visant à la libération d’une religieuse, retenue en otage au Sahel. La justice considère que le cardinal n’avait pas l’autorisation de verser cet argent à Marogna, qui l’a utilisé pour des dépenses personnelles.
Il est enfin condamné une troisième fois pour le détournement de fonds de 125’000 euros versés à une association diocésaine en Sardaigne, administrée par son propre frère. Or, le Vatican interdit le versement d’argent à des structures tenues par des parents.
Cecilia Marogna – 3 ans et neuf mois de prison, et interdiction d’exercer une charge publique pendant une période équivalente.
Se présentant comme une experte en diplomatie informelle, elle a convaincu le cardinal Becciu de l’embaucher pour qu’elle l’aide à libérer une religieuse enlevée par des djihadistes dans le Sahel. Cependant, elle aurait dépensé l’argent perçu – 575’000 euros – pour sa consommation personnelle (notamment en biens de luxe), et est donc condamnée, comme le cardinal, pour détournement de fonds.
Gianluigi Torzi – 6 ans de prison, 6’000 euros d’amende, interdiction perpétuelle d’exercer une charge publique, surveillance spéciale pendant un an.
En 2018, le banquier Gianluigi Torzi reçoit le mandat d’aider le Saint-Siège à reprendre le contrôle de l’immeuble de Londres qu’il avait jusqu’alors confié à Raffaele Mincione. Les contrats signés lors de cette opération confèrent finalement toutes les actions avec droit de vote de la structure financière de l’immeuble à Torzi, le Saint-Siège perdant dès lors complètement la main sur son bien. Pour la justice vaticane, Torzi a commis là une fraude aggravée.
Pire, la justice le condamne pour extorsion, considérant qu’il s’est servi de cette situation frauduleuse pour faire pression sur la secrétairerie d’État et lui extorquer 15 millions d’euros.
Enfin, Torzi est condamné pour l’autoblanchiment des 15 millions d’euros extorqués à la secrétairerie d’État.
Fabrizio Tirabassi – 7 ans et six mois de prison, 10’000 euros d’amende et interdiction perpétuelle d’exercer une charge publique.
Comme le cardinal Becciu, Raffaele Mincione et Enrico Crasso, l’ancien expert-comptable italien de la section financière de la secrétairerie d’État (entre 1989 et 2019) est condamné pour détournement de fonds dans le cadre de l’opération ayant permis d’acquérir le fameux ›60, Sloane Avenue›, à Londres.
Il est ensuite condamné pour blanchiment d’argent pour la façon dont il a utilisé 1,5 million d’euros de rétrocessions perçues indûment (versées notamment par la banque suisse UBS) parce qu’il gérait l’argent de la secrétairerie d’État. Il échappe à la condamnation pour corruption en raison de la prescription des faits (2004 à 2009).
Enfin, l’ancien official du Vatican est condamné pour extorsion, la justice vaticane considérant qu’il a forcé le Saint-Siège à verser 15 millions d’euros indus à Gianluigi Torzi pour que celui-ci rende le contrôle de l’immeuble de Londres qu’il avait récupéré contractuellement en 2018.
Nicola Squillace – 1 an et 10 mois de prison.
Avocat italien et collaborateur de Gianluigi Torzi, il a assisté ce dernier en 2018 dans l’opération de reprise de contrôle de l’immeuble de Londres et est donc accusé, comme lui, de fraude aggravée.
René Brülhart – 1’750 euros d’amende.
L’ancien président suisse de l’Autorité d’information financière (AIF), l’autorité anti-blanchiment d’argent du Saint-Siège, est accusé de non-signalement et de non-dénonciation de l’opération londonienne. La justice considère qu’en 2019, il aurait dû signaler et dénoncer l’opération de l’immeuble londonien aux autorités compétentes au Vatican, en vertu des statuts de l’organisation qu’il dirigeait alors.
Tommaso Di Ruzza – 1’750 euros d’amende.
L’ancien directeur italien de l’AIF (aujourd’hui ASIF) est lui aussi accusé de non-signalement et de non-dénonciation de l’opération londonienne. La justice considère qu’en 2019, il aurait dû signaler et dénoncer l’opération de l’immeuble londonien aux autorités compétentes au Vatican, en vertu des statuts de l’organisation qu’il dirigeait alors. (cath.cvh/imedia/cd/mp
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