Togo: De supposées apparitions de la Vierge provoquent de nombreux rassemblements
Entre l’enthousiasme et la réprobation
Lomé, 20 décembre 1998 (APIC) De supposées apparitions de la Vierge dans une ville du Togo provoque depuis près d’un mois maintenant de nombreux rassemblements de fidèles venus du Togo et des pays voisins. La Vierge, dit-on, serait apparue à trois jeunes. Le phénomène suscite l’enthousiasme auprès des uns, la réprobation chez les autres. La méfiance.
Tsévié, ville située à 30 Km au nord de Lomé, est devenue depuis le mois de novembre 1998, un lieu de rassemblement pour les fidèles catholiques. Et pour cause: la Vierge serait en effet apparue à trois jeunes, dont une jeune fille rwandaise. La nouvelle, comme une traînée de poudre a dépassé les frontières nationales. Ainsi parmi les foules, beaucoup sont venus du Bénin, du Ghana et de la Côte-d’Ivoire pour assister au « miracle et bénéficier des grâces qui peuvent en découler ». Les trois jeunes, tous vierges, affirment communiquer avec la Vierge Marie qui leur transmet des messages pour les populations.
La « première apparition » date du 13 novembre. Les suivantes se seraient produites les 17 et 25 novembre, ainsi que le 8 décembre. Les recommandations de la Sainte Marie sont celles de prières, d’amour. A chaque apparition la Vierge fixerait la date et l’heure de sa prochaine descente. C’est le 25 novembre que l’événement a toutefois porté le plus, avec, pour la première fois, la couverture de l’événement par la télévision nationale.
« La Vierge est effectivement apparue comme prévu », a commenté pour l’occasion le reporter en filmant un ciel blafard avec une lumière jaune. « A un moment donné, j’ai cru que le soleil était descendu à quelques mètres au dessus de nos têtes. Et cette lumière n’était pas éblouissante comme cela aurait pu l’être à ce moment de la journée (15 heures GMT) », raconte pour sa part un ancien ministre, qui avait aussi fait le déplacement de Tsévié. Certains ont même affirmé avoir décelé dans cette lumière l’image de la Mère de Jésus avec un chapelet en main.
Par le biais des trois jeunes, la Vierge aurait, dit-on, demandé à la foule de prier très fort pour ne pas être victimes des angoisses, « de prier pour sauver le Togo, d’éviter les avortements, de ne plus utiliser les numéros 555 et 666 qui sont des numéros de satan ». Le « drame », c’est que ces numéros correspondent à des séries de plats en aluminium très utilisés au Togo. Les foules ont alors demandé à la Vierge, par l’intermédiaire des jeunes, s’il fallait jeter tous ces plats. « Contentez-vous de ce que je vous ai dit », leur aurait répondu Marie.
Le clergé togolais, un peu sceptique au départ en parlant « d’imposture et de paganisme » commence aujourd’hui à changer de langages. Et ce sont des prêtes et des soeurs religieuses très enthousiastes qui conduisent les prières et les rosaires au rendez-vous de Tsévié. Pour l’heure l’Eglise n’a pas exprimé une position officielle sur les événements. Même, la radio catholique, Radio Maria n’a jamais évoqué le sujet sur ses antennes. En coulisses, on affirme cependant qu’il faut encore du temps à l’Eglise pour vérifier l’authenticité et la véracité des ces apparitions et pouvoir se prononcer là-dessus. Déjà le Curé de Tsévié a été chargé par Mgr Philippe Kpodzro, archevêché de Lomé de suivre l’évolution de la situation et de lui en rendre compte.
C’est toutefois parmi les populations et fidèles que ces apparitions provoquent une polémique. Pour certains ces événements sont des mises en scènes de trois jeunes hystériques qui tiennent en haleine tout un peuple. Pire ils voient en ces apparitions une manifestation du démon ou encore de « Mami Water » la déesse de la mer. Comment la Vierge peut-elle annoncer par avance ses apparitions, qui plus est, très répétées, se justifient-ils. Pour les autres, Marie apparaît en personne à Tsévié. « La Vierge a pitié de nous et veut sauver le Togo qui est malade. A preuve, à chacune de ses apparitions, il y a des guérisons spirituelles et physiques qui s’opèrent parmi la foule. C’est une question de foi », lancent-ils.
Qu’a cela ne tienne, ces événements continuent de faire couler beaucoup d’encre et de salive et les foules augmentent de plus en plus à chaque rendez-vous. Et l’embarras de l’Eglise catholique togolaise qui cultive une prudence sans précédent, risque de grandir encore. Le prochain rendez-vous donné par la Vierge est fixé au 23 décembre 1998. « Si la rédemption doit nous venir de Tsévié, que la volonté de Dieu soit faite », nous confie à l’APIC un jeune prêtre. (apic/pdk/pr)
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