Argentine, l'évêque de Mar del Plata renonce à sa charge

Pour la deuxième fois consécutive, le diocèse de Mar del Plata, en Argentine, subit la démission de son nouvel évêque avant même que celui-ci ne prenne possession de sa charge. Le pape François a en effet accepté la renonciation de Mgr Gustavo Larrazábal, accusé de harcèlement par une femme. Il devait entrer en fonction le 20 janvier 2024.

L’annonce de la nomination de Mgr Larrazábal avait suscité «mal-être» et «préoccupation» dans ce diocèse, rapporte la presse argentine, en raison d’accusations de harcèlement portées par une femme de 56 ans. Originaire de Mar del Plata, cette plaignante demeurée anonyme et se disant «traumatisée» a dénoncé le comportement de Gustavo Larrazábal, alors prêtre clarétain, qu’elle avait connu à Buenos Aires entre 2007 et 2013.

La nature de ces accusations n’est pas précisément connue, mais la presse argentine évoque des faits à caractère sexuel qui auraient alors valu au prêtre une dénonciation devant sa congrégation, sans que cela ne conduise à des sanctions. Ces accusations n’ont du reste pas empêché sa consécration épiscopale en 2022.

Un épiscopat en tension

L’épiscopat argentin est sous pression depuis qu’un autre proche du pape, Mgr Gustavo Zanchetta, évêque d’Orán de 2013 à 2017 puis appelé au Vatican comme assesseur de l’Administration du patrimoine du Siège apostolique (APSA), a été condamné à quatre ans et demi de prison, en mars 2022, pour des violences sexuelles à l’encontre de séminaristes. La protection dont Mgr Zanchetta avait bénéficié au Vatican a considérablement fragilisé l’image du pape et de l’Église dans ce pays, autrefois profondément imprégné par le catholicisme.

«Après un processus de discernement et de prière mené très consciencieusement, je suis arrivé à la conclusion qu’il n’est pas opportun d’assumer le gouvernement pastoral du diocèse de Mar del Plata et j’ai présenté ma démission au pape François, qui l’a acceptée avec une grande compréhension», a écrit Mgr Larrazábal dans une lettre ouverte adressée aux habitants de Mar del Plata.

Il semble que sa renonciation à ce poste soit liée aux tensions dans ce diocèse plus qu’à un aveu de culpabilité. Après une enquête, la nonciature apostolique avait diffusé le 9 janvier dernier un communiqué dénonçant des «accusations sans fondement» et réaffirmant la «pleine confiance» du pape et du Saint-Siège en Mgr Larrazábal. Il demeure finalement évêque auxiliaire de San Juan de Cuyo, charge pour laquelle il avait été ordonné le 18 juin 2022. 

Deux renonciations successives

Le diocèse de Mar del Plata était déjà dans une situation délicate avec la démission de son prédécesseur, Mgr José Maria Baliña, 65 ans. Nommé le 21 novembre 2023, il devait lui aussi être installé le 20 janvier, mais il avait renoncé à ce poste en invoquant des problèmes de santé. Proche de la spiritualité de Charles de Foucauld, Mgr Baliña avait annoncé qu’il continuerait à servir l’Église à Buenos Aires, diocèse dont il a été l’évêque auxiliaire de 2015 à 2023.

Fait très inhabituel, le diocèse de Mar del Plata compte donc désormais deux évêques émérites qui ne sont jamais entrés en fonction. Le dernier évêque à avoir réellement occupé ce poste demeure Mgr Gabriel Mestre, installé en 2017 et qui a été transféré l’été dernier comme archevêque de La Plata, un diocèse alors vacant après le transfert du cardinal Victor Manuel Fernández comme préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi.

Compte tenu de cette double renonciation, le pape François a nommé comme administrateur apostolique du diocèse de Mar del Plata un autre évêque auxiliaire de Buenos Aires, Mgr Ernesto Giobando. Ce jésuite de 64 ans devra donc assurer l’intérim à la tête de ce diocèse ne comptant environ que 50 prêtres incardinés pour un bassin de population de plus d’un million d’habitants, dont plus des trois quarts sont catholiques.

Javier Milei, président élu en Argentine a invité le pape à se rendre dans son pays natal | © Keystone/AP Photo/Natacha Pisarenko

Un frein à la tournée argentine du pape François ?

Dans un entretien à la télévision italienne diffusé dans la soirée du 14 janvier 2024, le pape François a reporté à la fin de cette année l’hypothèse d’un voyage en Argentine, un temps pressenti pour mars ou avril. Au-delà des problèmes de santé du pontife de 87 ans et des incertitudes politiques liées à l’élection récente du leader populiste Javier Milei, les affaires d’abus pourraient avoir joué un rôle dans la distance gardée par le pape vis-à-vis de son pays d’origine, qu’il n’a jamais visité depuis son élection en mars 2013. 

En 2018, son voyage houleux au Chili avait conduit, quelques mois plus tard, à la remise de charge de l’ensemble des évêques du pays en raison des scandales sexuels impliquant l’Église locale. Bien que seules certaines démissions aient ensuite été acceptées au cas par cas, cette crise chilienne constitue un point de bascule notable dans la relation entre Rome et les évêques latino-américains, qui avait été jusqu’alors moins exposés que leurs homologues européens et nord-américains à la pression médiatique concernant les affaires d’abus. (cath.ch/imedia/lb)

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