Le pape François à la Biennale de Venise: «deux mondes se rencontrent»

La visite du pape François à la Biennale de Venise le 28 avril 2024 «démontre clairement la volonté de l’Église de consolider un dialogue fructueux et étroit avec le monde des arts et de la culture», déclare le cardinal José Tolentino de Mendonça, préfet du dicastère pour la Culture et l’éducation, à l’occasion d’une conférence de présentation du pavillon du Saint-Siège organisée au Vatican le 11 mars. L’installation, intitulée Avec mes yeux et située dans la prison pour femmes de l’île de la Giudecca, exposera des créations de huit artistes contemporains qui ont collaboré avec les détenues.

La venue du pape à Venise, a estimé le cardinal Mendonça, est liée à «l’originalité» du projet présenté, qui répond à l’appel qu’il avait récemment lancé aux artistes de «dialoguer avec les pauvres». Selon le cardinal portugais, l’autorisation par l’administration pénitentiaire italienne d’utiliser certains espaces du centre de détention pour femmes de l’île vénitienne de la Giudecca répond à l’injonction du Christ dans l’évangile de Saint-Matthieu: «J’étais en prison et vous m’avez visité.»

C’est le nom du projet, Avec mes yeux, qui aurait attiré l’attention du pontife et motivé ce déplacement inattendu dans la lagune pour participer à la Biennale, une première pour un pape. «Lorsque j’ai montré au pape François le projet de pavillon du Saint-Siège pour la prochaine Biennale d’art de Venise, il m’a répondu: ›J’irai aussi avec mes yeux’», a confié le cardinal Mendonça.

Une des particularités de cette exposition est qu’il sera impossible de s’y rendre avec son téléphone portable, une contrainte liée aux conditions de sécurité imposées par le centre pénitentiaire. Les visiteurs laisseront donc leur téléphone à l’entrée, puis seront guidés dans la prison par une détenue, au sein d’un groupe de 25 personnes.

«Nous vivons à l’époque de la domination numérique, a souligné le cardinal portugais, et de la communication à distance: une relation indirecte qui génère le détachement.» «Voir «de ses propres yeux» confère à la vision un statut unique, car elle nous implique directement dans la réalité et fait de nous non pas des spectateurs, mais des témoins», a-t-il expliqué, faisant remarquer que cette «implication totale du sujet» permettait d’unir «l’expérience religieuse à l’expérience artistique».

Huit projets exposés

Le Pavillon du Vatican a été confié à deux commissaires liés à la France: l’Italienne Chiara Parisi, qui dirige le Centre Pompidou-Metz, et le Français Bruno Racine, directeur du Palazzo Grassi et de la Punta della Dogana à Venise, où est exposée la collection Pinault d’art contemporain. Ils ont sélectionné huit projets portés par des artistes réputés de la scène mondiale de l’art contemporain: la peintre et religieuse américaine Corita Kent, l’artiste italien Maurizio Cattelan, la chorégraphe française Bintou Dembélé, la peintre libanaise Simone Fattal, le collectif français Claire Fontaine, l’artiste brésilienne Sonia Gomes, le réalisateur Marco Perego avec l’actrice américaine Zoe Saldana ou encore la peintre française Claire Tabouret.

Pour préparer leurs installations, chaque artiste est entré en contact avec des détenues de la prison pour femmes, située sur l’emplacement d’un ancien couvent datant du XIIe siècle; 80 détenues ont ainsi pu participer au projet, avec l’accord de l’administration pénitentiaire italienne. Le Pavillon est intégralement financé par la banque italienne Intesa San Paolo.

Le choix de Maurizio Cattelan a provoqué une petite polémique, l’artiste italien étant connu pour sa sculpture La Nona Ora qui représentait le pape Jean-Paul II écrasé par une météorite. Cette sculpture, qui avait fait scandale lors de sa présentation en 1999, fait aujourd’hui partie de la collection Pinault. Le cardinal Mendonça a défendu ce choix en soulignant l’importance du «sens critique des artistes» qui «aide à penser». (cath.ch/imedia/cd/mp)

Maurice Page

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