Rome: Le pape Jean Paul II publie sa 13 encyclique

APIC -dossier

« Fides et ratio » sur les rapports entre la foi et la raison

Jean Paul II vise haut pour contempler la vérité

Rome, 15 octobre 1998 (APIC) « La foi et la raison sont comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité. » D’emblée, la nouvelle encyclique de Jean Paul II « Fides et Ratio » vise haut. Face au scepticisme général, il importe aujourd’hui de réconcilier philosophie et théologie pour marcher à la recherche de la « fin ultime » de l’homme, pour partir à la quête de la vérité. Le texte de 165 pages a été présenté jeudi à Rome.

« Il ne peut donc y avoir de compétitivité entre la raison et la foi, l’une s’intègre à l’autre, et chacune a son propre champ d’action », souligne le pape. Une manière de réactualiser la pensée du père de la philosophie du Moyen-Age, saint Thomas d’Aquin. Jean-Paul lI veut lancer un vaste mouvement de solidarité avec les intellectuels et les scientifiques pour créer un front de refus du nihilisme et du pragmatisme ambiant, relève Mgr Josef Zycinski, nouvel archevêque de Lublin, philosophe des sciences et ami du pape

La nouvelle encyclique de Jean Paul II vise haut. Elle ne contient ni interdits, ni règles éthiques, ni réflexion doctrinale ou pastorale, ni percée œcuménique, mais s’attache à la recherche de la « fin ultime de l’homme ». Jean Paul II, pape philosophe, a voulu donner une suite à son encyclique précédente « Veritatis Splendor » afin de « concentrer l’attention sur le thème même de la vérité et sur son fondement par rapport à la foi. » « La philosophie qui a la grande responsabilité de former la pensée et la culture par l’appel permanent à la recherche du vrai, doit retrouver vigoureusement sa vocation originelle », insiste le pape.

Jean Paul II s’adresse en priorité aux évêques, « témoins de la vérité divine et catholique », selon l’expression de Vatican II, aux théologiens et aux philosophes. Mais le chrétien de base peut aussi être intéressé, car « la parole de Dieu s’adresse à tout homme en tout temps et sur toute la terre; et l’homme est naturellement philosophe ».

L’encyclique « Fides et Ratio » cherche à redonner confiance dans les capacités cognitives de l’homme; dans un climat culturel marqué souvent par le relativisme et le scepticisme, elle veut aussi encourager la raison humaine à s’adonner à la quête de la vérité ultime et de l’être, explique le dominicain Jean Michel Poffet dans le numéro à paraître de « Nova et Vetera ».

L’homme en quête de sens

Pour le pape, l’homme de toutes les époques et de toutes les civilisations n’échappe pas aux questions de fond: « Qui suis-je ? D’où viens-je et où vais-je ? Pourquoi la présence du mal ? Qu’y aura-t-il après cette vie? » La quête de sens est toujours pressante dans le cœur de l’homme, car de la réponse à ces questions dépend l’orientation à donner à l’existence. La philosophie qui contribue à poser la question du sens de la vie apparaît donc comme l’une des tâches les plus nobles de l’humanité.

L’Eglise ne peut qu’apprécier les efforts de la raison pour atteindre des objectifs qui rendent l’existence personnelle toujours plus digne, souligne le pape. « Elle voit en effet dans la philosophie le moyen de connaître les vérités fondamentales concernant l’existence de l’homme. En même temps elle considère la philosophie comme une aide indispensable pour approfondir l’intelligence de la foi et pour communiquer la vérité de l’Evangile à ceux qui ne la connaissent pas encore. »

La recherche de la vérité est souvent occultée

Jean Paul II est incité à pousser cette recherche par le fait que « de nos jours surtout, la recherche de la vérité ultime apparaît souvent occultée. » « La philosophie moderne, oubliant d’orienter son enquête vers l’être, a concentré sa recherche sur la connaissance humaine. Au lieu de s’appuyer sur la capacité de l’homme de connaître la vérité, elle a préféré souligner ses limites et ses conditionnements. »

« La pluralité légitime des positions a cédé le pas à un pluralisme indifférencié, fondé sur l’affirmation que toutes les positions se valent: c’est là un des symptômes les plus répandus de la défiance à l’égard de la vérité », déplore le pape. « Par fausse modestie, on se contente de vérités partielles et provisoires, sans chercher à poser des questions radicales sur le sens et le fondement ultime de la vie humaine personnelle et sociale. En somme on a perdu l’espérance de pouvoir recevoir de la philosophie des réponses définitives à ces questions ».

La réponse de Jean Paul II et de l’Eglise catholique est alors de réaffirmer la vérité révélée de la foi pour « redonner à l’homme de notre époque une authentique confiance dans ses capacités cognitives et lancer à la philosophie le défi de retrouver et de développer sa pleine dignité. »

Philosophie et théologie prospectent sur le même chemin

La raison avec ses moyens naturels, permet à l’homme de découvrir qu’existe une fin ultime qui donne sens à la vie et à toute chose. Mais c’est seulement dans l’acte de foi, où la personne s’ouvre à l’aide de Dieu, que celle-ci peut l’atteindre dans sa réalité même. « La fin ultime de l’existence personnelle est donc l’objet d’étude aussi bien de la philosophie que de la théologie. Toutes deux, bien qu’avec des moyens et des contenus différents, prospectent ce chemin de vie qui comme nous dit la foi, débouche finalement sur la joie pleine et durable de la contemplation de Dieu… » Le pape affirme avec force une conviction qui traverse toute l’encyclique:  » il ne peut donc y avoir de compétitivité entre la raison et la foi, l’une s’intègre à l’autre, et chacune a son propre champ d’action ». Les titres des chapitres II et III de l’encyclique illustrent ce rapport de complémentarité: « Croire pour comprendre », « Comprendre pour croire ».

Reste alors la « folie » de la croix. Pour Jean Paul II « le rapport entre la foi et la philosophie trouve dans la prédication du Christ crucifié et ressuscité l’écueil contre lequel il peut faire naufrage, mais au-delà duquel il peut se jeter dans l’océan infini de la vérité. Ici se manifeste avec évidence la frontière entre la raison et la foi, mais on voit bien aussi l’espace dans lequel les deux peuvent se rencontrer ». (apic/mp)

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