Congo RDC: le retour de la peine de mort contrarie les évêques

Le cardinal Fridolin Ambongo, archevêque de Kinshasa, en République Démocratique du Congo (RDC) a critiqué la levée du moratoire sur la peine de mort, qui était en vigeur depuis 2003 dans le pays. Selon un rapport de la Fédération internationale de l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (FIACAT), la RDC comptait 510 condamnés à morts en 2019.

La ministre de la Justice et Garde des Sceaux, Rose Mutombo Kiese, a indiqué, dans une circulaire administrative datée du 13 mars, que le Conseil des ministres a décidé de lever le moratoire, lors de sa session ordinaire du 9 février. Elle a justifié cette décision par la multiplication des actes criminels, tels que l’espionnage, les attaques à main armée, le grand banditisme, qui se développent dans le pays. Car certains délinquants considèrent le moratoire comme «un gage à l’impunité», a-t-elle estimé, sachant que même s’ils étaient condamnés de manière «irrévocable», à la peine capitale, ils étaient assurés qu’elle ne leur sera jamais appliquée.

En outre, depuis trente ans, a-t-elle ajouté, la partie orientale du pays est en proie à des conflits récurrents. Ceux-ci sont souvent orchestrés par des États étrangers qui, selon les circonstances, bénéficient de complicités de certains congolais. Des agissements de «traitrise ou d’espionnage» qui ont fait payer un lourd tribut à la RDC, au regard des immenses préjudices subis. Le retour de la peine capitale permettra à l’armée de se débarrasser de ces «traitres». Tout comme l’application de la sentence permettra également, «d’endiguer» la recrudescence des actes terroristes et du banditisme urbain qui font des morts.   

Selon la ministre, l’exécution d’un jugement de la peine de mort prononcé par décision judiciaire, s’appliquera désormais aux personnes reconnues coupables d’association de malfaiteurs, de trahison, d’espionnage, de participation à des bandes armées ou à un mouvement insurrectionnel, etc.

Quatre jours avant la décision du conseil des ministres, le Conseil supérieur de la défense, présidé par le président Félix Tshisekedi, avait demandé de lever le moratoire sur les exécutions des condamnés. Cette annonce avait suscité une vive réaction de près d’une centaine d’organisations de défense des droits humains pour l’abolition de la peine de mort dans le monde, dont la FIACAT.

Pour le cardinal Ambongo Besungu, le rétablissement de la peine de mort est «un pas en arrière»: «Je me demande comment un gouvernement responsable puisse prendre une telle option pour punir ceux qu’on appellerait des traitres», a-t-il déclaré, rappelant la confusion autour de la notion de traitre.

Dans une interview à la chaine catholique KTO, reprise également par la radio des Nations-Unies au Congo, Radio Okapi, il a indiqué que la décision du gouvernement «ouvre la voie aux règlements de comptes».

La décision a divisé les organisations de la société civile ou du pays entre partisans et opposant au retour de la peine de mort. Les ambassades de la Suisse, du Canada, de la Norvège et de la Grande Bretagne se sont dites «profondément préoccupés» par le retour de la peine capitale. (cath.ch/ibc/gr)

Ibrahima Cisse

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/congo-rdc-le-retour-de-la-peine-de-mort-contrarie-les-eveques/