Contre l’esclavage des enfants dans la production de tapis d’Orient

Suisse: Après 3 ans d’activités, la Fondation STEP dresse un bilan positif

Berne, 29 octobre 1998 (APIC) « Nouer des tapis n’est pas un jeu d’enfant! », a rappelé jeudi à Berne  » STEP », la Fondation pour des conditions équitables dans la production et le commerce du tapis d’Orient. Depuis 3 ans, STEP lutte pour éliminer le servage des enfants, promouvoir un prix équitable et une production écologique. Si de grands progrès restent à faire en matière d’environnement, on peut parler d’indéniables avancées au plan social, constate Werner Dick, gérant de la Fondation STEP.

Après trois ans d’activités, l’organisation, une émanation des œuvres d’entraide suisses, dresse un bilan positif: un quart du marché des tapis d’Orient vendus en Suisse bénéficie déjà du label « STEP ». Le consommateur peut donc acheter des tapis en toute bonne conscience dans toute la Suisse auprès de 13 entreprises (37 points de vente) qui souscrivent au code de conduite de la Fondation. Les vendeurs de tapis preneurs de licence versent 4 francs par m2 de tapis vendu à la Fondation, qui utilise les fonds ainsi récoltés pour son travail d’information, la réalisation des contrôles ainsi que pour financer des projets de développement en Inde et au Népal. Des montants de plus de 200’000 francs ont déjà été accordés.

Contrôles inopinés dans les ateliers

Dans le tiers monde, les travailleurs des entreprises qui ont signé un contrat de licence STEP ont souvent un salaire de 20 à 30 % supérieur à ce qu’exige la législation en vigueur dans les pays concernés et leurs conditions de travail sont meilleures. Grâce à la collaboration d’ONG locales en Inde, au Népal et au Pakistan, des contrôles réguliers et non annoncés sont réalisés plusieurs fois par an pour le compte de STEP à toutes les étapes de la production et de la commercialisation.

Il s’agit de vérifier l’éclairage, l’hygiène et l’outillage sur la place de travail, les conditions salariales, l’absence de travail abusif et de servage d’enfants, la possibilité de formation offerte aux noueuses, noueurs et à leurs enfants, ainsi que le suivi médical offert. L’utilisation de produits toxiques et le traitement des eaux usées dans les divers processus de production (blanchiment, teinture, lavage) font également l’objet d’un contrôle. La pression exercée par les preneurs de licence sur les producteurs et le travail de sensibilisation de la Fondation STEP sur place sont efficaces. « Pour nombre d’entreprises, le risque d’exclusion de la liste des fournisseurs des preneurs de licence STEP est une menace réelle », insiste Werner Dick. Les contrôles ont permis de découvrir, dans des cas isolés, des problèmes d’éclairage et de places de travail, « mais aucun cas de travail d’enfants n’a été relevé au Népal et seules quelques exceptions sont apparues en Inde et au Pakistan ».

Des enfants esclaves pour payer les dettes de leurs parents

Dans de nombreux pays du Sud, en effet, des enfants esclaves – souvent vendus par des parents surendettés – sont littéralement rivés du matin au soir à leur métier à tisser, dans des conditions sociales et sanitaires déplorables. Selon des organisations népalaises de défense des droits de l’enfance, la moitié des 250’000 noueuses et noueurs au Népal sont des enfants. En Inde, ils sont entre 250 à 300’000. Ce chiffre n’est pas loin d’atteindre le double au Pakistan. Ces deux derniers pays connaissent encore le servage pour dette. L’enfant-esclave devant rembourser la dette de la famille, souvent de l’argent prêté par des agents recruteurs à des taux d’intérêt entre 100 et 200 % par mois. « L’impossibilité de rembourser la dette est programmée et l’enfant devient un simple serf », constate STEP.

Le pire, c’est que, contrairement à une opinion répandue, le travail des enfants n’aide absolument pas la famille à survivre, tellement les montants touchés sont dérisoires. En Inde, par exemple, cinq enfants travaillent pour le prix d’un adulte; au Népal, le rapport est même de 7 à 1. Ces centaines de milliers d’enfants travailleurs n’ont pas accès à l’école. Dans ce secteur, le consommateur suisse est un partenaire commercial important et il a un rôle décisif à jouer: il occupe en effet le premier rang mondial des amateurs de tapis d’Orient.

Gagner de l’argent sans exploiter ses partenaires

« Par son acte d’achat, le consommateur ne peut pas être le complice d’un système qui bafoue les droits élémentaires du travailleur. Le label STEP est là pour lui offrir cette garantie… Mais la meilleure garantie de fiabilité d’un label, c’est son contrôle », a déclaré Pierrette Rohrbach lors de la conférence de presse. La présidente de la Fédération romande des consommatrices a salué la prise de conscience des entreprises et les a invitées à maintenir l’effort de contrôle et d’information lié à leurs engagements.

Responsable des produits à Pfister Meubles SA – dont ses magasins ont signé le code de conduite STEP – Christoph Zysset souligne d’emblée que Pfister doit d’abord rééaliser du bénéfice afin d’assurer la pérennité de l’entreprise. « Nous ne nous considérons pas comme une organisation caritative, mais bien comme une entreprise active dans le commerce de détail. Nous sommes toutefois convaincus qu’il est possible de gagner de l’argent sans exploiter nos partenaires! » (apic/be)

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