« Provocation », « Abus d’un symbole religieux à des fins politiques »
Czestochowa, 26 août 1998 (APIC) Les évêques catholiques de Pologne ont décidé d’exiger l’enlèvement des 230 croix de toutes tailles placées illégalement ces dernières semaines à proximité de l’ancien camp de la mort d’Auschwitz par des milieux nationaux-catholiques et conservateurs. Dans un communiqué publié mardi soir, ils ont qualifié cette campagne de « provocation » et « d’abus d’un symbole religieux à des fins politiques ».
Réuni au sanctuaire marial de Czestochowa pour traiter de cette affaire qui envenime depuis des semaines les relations entre juifs et chrétiens et nuit gravement à l’image de la Pologne à l’étranger, le Conseil permanent de l’épiscopat a décidé de ne maintenir que la grande croix de près de huit mètres de haut non loin de l’enceinte extérieure du camp. Cette dernière commémore la visite du pape au camp de la mort nazi en 1979. Les milieux juifs pour leur part veulent voir disparaître tout symbole religieux des environs du camp de concentration, tandis que des groupes catholiques polonais veulent commémorer de façon visible les victimes polonaises des nazis.
Si moins de 10% des morts d’Auschwitz étaient des Polonais (tout de même plus de 100’000!), les premiers prisonniers que le camp No1 abrita dès juin 1940 furent justement des représentants de l’intelligentsia polonaise. Là furent par exemple mis à mort presque tous les professeurs de l’Université Jagellone de Cracovie. Les autres camps – Auschwitz II (Birkenau-Brzezinka) et Auschwitz III (Monowitz) – auxquels les nazis adjoignirent une quarantaine de camps satellites plus petits, furent érigés après. Les croix en question devaient faire mémoire de 152 prisonniers polonais exécutés sur le site, près de l’enceinte du camp.
Ce thème hautement explosif – l’enlèvement de croix est qualifié de « reculade » par certains milieux catholiques polonais, notamment ceux qui ont lutté contre le régime communiste – a suscité le déplacement à Czestochowa d’une quarantaine d’évêques polonais. Normalement, onze évêques seulement participent aux séances ordinaires du Conseil permanent de l’épiscopat.
Placer les croix dans des paroisses
Les évêques proposent de placer les croix litigieuses dans des paroisses, où elles pourraient trouver une place « digne ». Ils rappellent que ces croix de la discorde ont été placées « sans la permission et contre la volonté explicite » de l’évêque du lieu. Pour l’épiscopat polonais, ces actions ont porté atteinte à « l’atmosphère sérieuse de ce lieu particulier » et blessé profondément « les sentiments différents des nôtres de nos frères juifs ».
« Auschwitz reste le plus grand cimetière juif du monde »
Dans leur déclaration, les évêques polonais condamnent catégoriquement l’abus des symboles religieux et de l’Eglise pour fomenter des troubles. Ils demandent cependant en même temps le respect de la croix du pape « ainsi que de tous les symboles religieux des être humains qui ont été assassinés dans ce camp », tout en relevant qu’Auschwitz reste « le plus grand cimetière juif du monde ». (apic/kna/be)
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