Homélie du 14 juillet 2024 ( Mc 6, 7-13)

Chanoine Jean-Michel Girard – Basilique de l’Abbaye de Saint-Maurice

Dans cet envoi des disciples en mission, il y a un contraste frappant entre, d’une part, l’autorité qui leur est donnée, le pouvoir de chasser les démons, d’opérer des guérisons et, d’autre part, une absence de moyens humains, les situant dans une pauvreté et une vulnérabilité volontaires.

Ces envoyés seront tout à fait à l’image de celui qui les envoie, à l’image du Christ. Sa force personnelle frappait les foules car il parlait avec autorité et non pas comme leurs scribes et impressionnait les disciples quand la mer et les vents lui obéissaient. Les disciples d’Emmaüs parlent de lui comme d’un prophète puissant par se paroles et par ses actes.

Puissance et faiblesse. Il n’a pas d’arme, pas de garde personnelle. Il refuse que l’on use du glaive pour le défendre. Il n’a pas de position sociale valorisante, pas de rôle dans la hiérarchie religieuse. Il n’a pas où reposer la tête.

Jésus est révélation de Dieu

Jésus, par ce qu’il dit et ce qu’il fait, est la révélation de Dieu ; il révèle qui est réellement Dieu.

Oui, le Dieu tout-puissant. Il le dit : « A toi, tout est possible ». Pour nous, il est le créateur ; « tout fut par lui et rien de ce qui s’est fait, s’est fait sans lui ». Nous venons de lui et nous trouvons notre plénitude seulement en lui.

Mais le grand projet de Dieu – si on peut employer ce terme – il ne peut pas le réaliser par sa puissance. Saint Paul le décrit ainsi : « Il nous a prédestinés à être pour lui des fils adoptifs » ; « Il nous a choisis, dans le Christ, avant la fondation du monde, pour que nous soyons saints, immaculés devant lui, dans l’amour ».

L’amour s’offre

L’Amour ! L’amour ne s’impose pas. Il s’offre. Peut-être il se mendie, mais il ne s’obtient pas par force. « Voici que je me tiens à la porte et je frappe, si quelqu’un entend ma voix et ouvre la porte, j’entrerai et je prendrai mon repas avec lui et lui avec moi ».

Nous avons le pouvoir d’ouvrir la porte et celui de la garder fermée. Face à cette porte, Dieu est démuni puisqu’il ne cherche que l’amour. Mais le fait même qu’il soit démuni est propre à nous désarmer, à faire tomber nos remparts, à nous inciter à ouvrir tout grand la porte sans la peur de perdre notre autonomie, notre liberté. Il est livré, offert.

Dieu est Amour. Rien n’est plus puissant que l’amour et rien n’est aussi vulnérable.

Les envoyés sont appelés à ressembler à Dieu et à témoigner de lui, investis de puissance pour faire le bien et démunis de moyens humains.

Comment vivre notre vocation à l’amour ?

Notre vocation est l’amour. Comment le vivre avec force tout en renonçant aux moyens de pouvoir ?

Une base solide est une profonde confiance : Dieu m’a choisi avant la fondation du monde. Il m’aime à priori, avant toute preuve de mérite de ma part. Il m’a aimé en premier. Dans cette confiance fondamentale, il me sera possible de ne pas me valoriser artificiellement.

Nos liturgies sont un lieu privilégié pour nous établir dans cette attitude. D’une part, elles attestent de notre valeur, de notre grandeur. Le Fils de Dieu vient nous servir, nous nourrir de rien moins que de lui-même. Nous nous adressons à Dieu comme à notre Père. Nous sommes encensés comme Dieu lui-même. Notre grandeur n’est pas une autosuggestion, c’est une célébration qui l’atteste. D’autre part, nous entrons dans la liturgie. Nous nous y laissons faire. Elle nous vient d’abord du Christ : « Faites cela en mémoire de moi ». Ce qui se passe en nous échappe à notre planification.

Célébrons avec beauté et avec joie.

15e Dimanche du temps ordinaire
Lectures bibliques : Amos 7, 12-15 ; Psaume 84 ; Ephésiens 1, 3-14 ; Marc 6, 7-13

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