Courtepin: A l’aube du 3ème millénaire, faut-il avoir peur des sectes ?
Courtepin (Fribourg), 1er décembre 1999 (APIC) A une trentaine de jours de l’an 2000, les peurs millénaristes et les prédictions apocalyptiques font florès dans certains milieux « branchés ». Pas de quoi paniquer, a cependant assuré l’historien Jean-François Mayer mardi soir à la salle de paroisse de Courtepin.
Pour l’heure, le spécialiste fribourgeois des nouveaux mouvements religieux et des religiosités parallèles n’a pas trouvé d’indices concrets de dérives dangereuses, prélude à de nouveaux suicides collectifs, comme celui de l’Ordre du Temple Solaire (OTS).
Chargé de cours en science comparée des religions à l’Université de Fribourg, Jean-François Mayer répondait à l’invitation des paroisses de Barberêche-Courtepin, Courtion, Cressier et Wallenried, dans le Haut-Lac français. Près de cent personnes avaient fait le déplacement pour entendre ce chercheur de renommée internationale disserter sur le thème « A l’aube du troisième millénaire, faut-il avoir peur des sectes? » Le public s’est intéressé à la définition des sectes – « Où finit l’Eglise, et où commence la secte? » -, aux causes de leur succès – « La mondialisation de l’économie et la précarisation sociale ne favorisent-elles pas la prolifération des sectes? » – et aux défis qu’elles représentent pour les communautés chrétiennes.
Preuve de la sécularisation de la société, la date symbolique de l’an 2000, plutôt que de susciter des craintes de fin du monde sur fond religieux, éveille plus prosaïquement la peur du fameux « bogue » informatique qui bloquera les bancomats, arrêtera les ascenseurs ou fera tomber les avions. C’est la version « high-tech » et agnostique de la « grande peur de l’An Mil » au Moyen Age.
Les périodes de crise sont favorables aux sectes
Malgré la nervosité perceptible dans certains milieux, il n’y a pas lieu de donner dans l’hystérie. Certes, l’attente de temps nouveaux, catastrophiques ou paradisiaques (l’Apocalypse abolira la société mauvaise et instaurera le paradis sur terre), nourrit les fantasmes des foules tout au long de l’histoire. En particulier dans les périodes de crise. C’est un fait que l’idée de tournant et de passage associée au changement de millénaire crée une atmosphère favorable aux thèses millénaristes et pas seulement sous leurs formes chrétiennes, relève J.-F. Mayer.
Mais le spécialiste a pu observer nombre de mouvements millénaristes de cette fin de siècle: leurs adeptes sont avant tout des citoyens paisibles nullement désireux d’entrer dans l’illégalité ou de détruire une société dans laquelle ils s’efforcent de vivre honnêtement. La plupart de ces groupes attendent passivement la fin des temps, car ils pensent que cet avènement relève davantage d’une décision divine que d’une action humaine.
Pas d’assurance à 100%
Il ne faut donc pas s’attendre à des actions spectaculaires de groupes apocalyptiques à la veille de l’an 2000, laisse entendre Jean-François Mayer, qui ne se hasarde cependant pas à donner d’assurances à 100%: « Il n’est pas possible de suivre simultanément l’évolution de centaines de mouvements ! » Un de ses confrères, aux Etats-Unis, vient d’ailleurs de recenser dans ce pays quelque 2’300 sectes et nouveaux mouvements religieux. Notamment grâce à internet.
Mais l’historien, qui connaît le dossier de l’OTS et certains de ses protagonistes de très près, de se demander à haute voix si les croyances apocalyptiques ont vraiment été à l’origine de la chaîne de suicides collectifs de la secte: « Elles ont plutôt créé la toile de fond, l’arrière-plan sur lequel s’est inscrite la dérive ». Des croyances millénaristes qui ont certes été en quelque sorte un support nécessaire, « mais on ne saurait dire qu’elles aient constitué à elles seules la cause d’un drame causé par la paranoïa, le développement de fantasmes de persécution et de tensions internes au groupe ».
L’on ne saurait pourtant nier que « l’apocalyptisme » constitue potentiellement un terreau à risques, admet le chercheur. Tout comme le satanisme, « un milieu malsain » très présent sur internet, qui attire un certain nombre de jeunes, souvent par volonté de provoquer les adultes. Ce genre de « jeu » peut tourner au drame: assassinats, profanation de cimetières, etc… « L’approche de la fin des temps et de l’instauration d’un ordre radicalement nouveau peut aisément conduire à s’affranchir des lois d’un monde déjà condamné. »
Détail d’importance: pour la majorité des courants millénaristes – qui ne se limitent pas au terreau protestant, mais qu’on trouve également dans des milieux catholiques ou para-catholiques, notamment autour d’apparitions mariales ou autres visions, et dans des sectes d’inspiration chrétienne ou autre – , l’an 2000 n’a pas de signification particulière. Beaucoup de ces groupes sont même soucieux de s’en distancier. En effet, l’apocalyptisme et le millénarisme ne vont pas s’éteindre après le passage au nouveau millénaire: « Ce sont des composantes permanentes du paysage religieux, tant que dureront les insatisfactions humaines face aux injustices et imperfections de ce monde et le rêve d’une `terre sans mal’ ».
Les gens ont soif de spiritualité, les sectes comblent un vide
Organisateurs de la soirée, l’abbé Modeste Kisambu-Muteba, et le journaliste Jacques Berset, ont tout deux insisté sur la nécessité de la formation religieuse des chrétiens et d’une solide information sur la réalité des sectes. « Les sectes sont une interpellation pour nos communautés paroissiales, a lancé le journaliste, car le succès des sectes – qui offrent souvent proximité, chaleur humaine, nourriture spirituelle – , met justement le doigt sur nos manques: sommes-nous suffisamment proches des gens, solidaires de ceux qui sont en crise ou se sentent seuls, laissés sur le bord du chemin par les malheurs de la vie. Aimons-nous suffisamment les gens dans nos communautés, dans notre voisinage ? ».
Et de constater que les paroisses donnent souvent l’impression de s’intéresser davantage aux finances, impôts ecclésiastiques et autres sorties d’Eglise, à l’organisation et à l’agenda, plutôt qu’aux questions de foi et à la dimension missionnaire. « Les gens ont soif de spiritualité, a-t-il poursuivi, pourquoi ne pas leur faire mieux connaître nos grands maîtres de spiritualité, comme saint François d’Assise, sainte Thérèse d’Avila et bien d’autres encore? » (apic)
Fribourg: Exposition « La Bible en Suisse » du 14 au 31 janvier 2000
Entrer, avec la Bible, dans le troisième millénaire
Fribourg,
(APIC) L’ensemble des Eglises et communautés religieuses de Fribourg s’unissent pour célébrer par une Exposition biblique l’entrée dans le nouveau millénaire. Du 14 au 30 janvier les Fribourgeois pourront non seulement visiter l’exposition « La Bible en Suisse » dans les locaux de la paroisse reformée, mais assister à de nombreuses conférences et manifestations culturelles.
Pour les organisateurs ce projet doit amener a ne pas laisser se perdre dans l’oubli les racines de notre culture. Sans Bible pas de christianisme. Qu’en serait-il de la démocratie? Que dire des œuvres caritatives, ou du développement des arts?
C’est sans doute la première fois dans l’histoire de la ville, située à la frontière des langues, que tous les fossés ont été comblés et que des passerelles ont été édifiées, du judaïsme en direction des Eglises catholique, réformée, orthodoxe ou évangéliques. Plus de vingt Eglises et communautés participent au projet et se penchent sur leurs racines communes qui remontent au delà des 2000 ans écoulés et qui plongent toutes dans la Bible.
L’exposition a été montée par la Société biblique suisse. Elle met l’accent principalement sur l’histoire de la Bible en Suisse, depuis l’entrée du christianisme dans ce pays, en passant par la Réforme, jusqu’au 20e siècle.
Les visiteurs pourront s’intéresser à la pratique de la calligraphie, observer d’anciennes techniques d’imprimerie avec une réplique de la presse de Gutenberg, consulter des sites Internet, ou encore participer à un concours.
Fribourg propose en outre deux projets spécifiques: le vœu est exprimé d’exposer de vieilles Bibles prêtées par des particuliers. Un appel est donc adressé à la population fribourgeoise, de chercher ce que pourrait receler le bibliothèques familiales ou les galetas en matière de vieilles Bibles et de bien vouloir les prêter pour la durée de cette exposition. Il n’est pas exclu que quelques exemplaires exceptionnels fassent surface à cette occasion.
Dans quelques vitrines de magasins du centre ville, le professeur Othmar Keel de l’Institut biblique de l’Université de Fribourg exposera des objets d’art de l’Orient ancien sur le thème « Les animaux de la Bible ».
Autre événement marquant de cette manifestation: la venue de l’acteur Jean-Luc Bideau. Il montera sur scène accompagné par le violoncelliste François Guy à l’Aula du Collège St Michel le samedi 15 janvier à 20h30, pour spectacle intitulé « du métier de l’homme sur la terre: parole du sage » et tiré du livre de l’Ecclésiaste qui s’ouvre sur le fameux verset: « Vanité des vanités. Tout est vanité ». éEn marge de l’exposition biblique, un copieux programme d’activités culturelles et formatrices témoignera de la richesse de la vie ecclésiale à Fribourg. A titre de mise en appétit, théâtre de marionnettes, atelier de bibliodrame, concerts, cycle de conférences « Bible et psychologie », entre autres. (apic/com/tg)
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