Une querelle d’héritage. On sait ce que cela peur provoquer jusque dans les familles les plus unies : la cupidité se révèle, sans fard. Dans cette affaire de gros sous qu’on lui soumet, Jésus va-t-il, comme d’habitude, se faire le champion de la justice en faveur de cet homme qui s’estime lésé par son frère ?
Non, il s’y refuse, et sèchement. II a certes quelque chose à dire dans les questions de droit, mais il juge intolérable qu’on se serve de son autorité morale pour appuyer des revendications d’intérêts particuliers. Plutôt que d’en appeler à Jésus, que cet homme prenne lui-même ses responsabilités. C’est une première leçon.
« Jésus renvoie chacun à soi-même, à sa dignité d’homme, à sa conscience. »
Nous sommes si volontiers tentés de mettre Dieu du côté de l’autorité, de la patrie, de la prospérité, de telle ou telle option politique ! Jésus, lui, refuse de remplacer l’homme, de se substituer à sa liberté, de décider pour lui : il renvoie chacun à soi-même, à sa dignité d’homme, à sa conscience. Il ne va pas répondre comme juge, mais comme maître des âmes, détournant le regard de l’héritage terrestre pour l’élever vers l’héritage céleste.
Mais il va encore plus loin, car il pressent, sous le couvert de cette démarche, ce qui fait agir cat homme : l’âpreté du gain, l’amour de l’argent. Or, le problème est de savoir : Qu’est-ce qui assure la vie ?
A cela un riche fermier, dont Jésus raconte la mésaventure, répond avec une sagesse et une prévoyance à courte vue : son assurance-vie, il croit la trouver dans les abondantes réserves accumulées dans ses greniers. Il est dans une logique d’expansion : toujours plus et toujours plus grand, comme s’il était le maître de son destin. Mais la mort l’emporte soudainement…
« Oui, il est fou, celui qui croit que l’essentiel ici-bas… »
Et Jésus de dénoncer son imprévoyance, sa folie même : en limitant ses ambitions à ce monde-ci, ce richard a pratiquement renié Dieu. Oui, il est fou, celui qui croit que l’essentiel ici-bas est d’amasser et de produire, celui qui identifie la belle vie avec un solide et rassurant compte en banque.
Être riche en vue de Dieu (Lc 13, 21), en donnant et en partageant, en sachant vers quoi et vers Qui coule notre vie, voilà la seule chose qui compte véritablement, car l’économie du Royaume n’a rien à voir avec celle du monde. Dans le Royaume, c’est en se dépouillant que l’on s’enrichit et c’est en donnant que l’on reçoit.
Sœur Marie-Paule Mermoud | Vendredi 1er août 2025
Lc 12, 13-21
En ce temps-là,
du milieu de la foule, quelqu’un demanda à Jésus :
« Maître, dis à mon frère
de partager avec moi notre héritage. »
Jésus lui répondit :
« Homme, qui donc m’a établi
pour être votre juge ou l’arbitre de vos partages ? »
Puis, s’adressant à tous :
« Gardez-vous bien de toute avidité,
car la vie de quelqu’un,
même dans l’abondance,
ne dépend pas de ce qu’il possède. »
Et il leur dit cette parabole :
« Il y avait un homme riche,
dont le domaine avait bien rapporté.
Il se demandait :
›Que vais-je faire ?
Car je n’ai pas de place pour mettre ma récolte.’
Puis il se dit :
›Voici ce que je vais faire :
je vais démolir mes greniers,
j’en construirai de plus grands
et j’y mettrai tout mon blé et tous mes biens.
Alors je me dirai à moi-même :
Te voilà donc avec de nombreux biens à ta disposition,
pour de nombreuses années.
Repose-toi, mange, bois, jouis de l’existence.’
Mais Dieu lui dit :
›Tu es fou :
cette nuit même, on va te redemander ta vie.
Et ce que tu auras accumulé,
qui l’aura ?’
Voilà ce qui arrive à celui qui amasse pour lui-même,
au lieu d’être riche en vue de Dieu. »
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