Trois éléments majeurs dans l’évangile de ce dimanche: un feu, un baptême, un glaive. Le feu. Jésus va l’apporter sur la terre et il a hâte de le faire. Dans la Bible, le feu jeté sur la terre, c’est le feu de la colère de Dieu, celui qui détruit tout, en raison des hommes qui trahissent à tour de bras l’alliance que Dieu a établi avec eux.
Le feu dont parle Jésus ici ne correspond pas à un acte de vengeance. C’est peut-être pour le signifier que les traducteurs ont préférer le verbe «apporter» pour traduire le mot grec qui littéralement veut bel et bien dire «jeter». Car il s’agit bien du feu de l’Esprit qui, loin d’anéantir, vient porter l’Alliance à son accomplissement: «Je mettrai ma loi au fond de leur être, je l’inscrirai dans leur cœur» (Jr 31, 33). La loi, l’Alliance de Dieu avec nous est de feu. Donc, d’abord cette perspective d’accomplissement dans la destinée personnelle de Jésus: allumer le feu de son Esprit en nous.
Mais avant cela, même s’il est nommé après: un baptême. Le mot signifie «plongée». D’après l’angoisse qu’elle suscite en Jésus, cette plongée est terrifiante. On pense à l’angoisse de l’agonie et l’immersion dans les ténèbres qu’elle représente pour lui. Cette traversée de l’abandon, de la souffrance et de la mort, il faut bien la perspective du feu de l’Esprit répandu sur tous pour pouvoir l’envisager.
Jésus, par ces éléments du feu et de son baptême, révèle l’intime de sa mission, l’intime de son être face à sa mission: la joie du salut, l’angoisse du chemin qui y conduit.
« Après sa résurrection, c’est néanmoins bien la paix que Jésus adresse à ses disciples. »
Enfin, les divisions familiales. Nul besoin de Jésus pour susciter et entretenir nos guéguerres de proximité. Bien sûr, il ne s’agit pas de cela. Plutôt que division, l’évangéliste Matthieu utilise le terme très concret de glaive: «Je ne suis pas venu apporter la paix mais le glaive» (Mt 10, 34). Or, voilà ce que dit du glaive l’auteur de la lettre aux Hébreux (4, 12): «Elle est vivante, la parole de Dieu, énergique et plus coupante qu’un glaive à deux tranchants; elle va jusqu’au point de partage de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles; elle juge des intentions et des pensées du cœur.»
Voilà la division qu’opère la Parole de Jésus au sein de nos liens les plus intimes. Elle opère ce partage en nous de ce qui est de Dieu de ce qui n’en est pas. De même suscite-t-elle le partage, la division d’avec nos proches car elle exige de nous un positionnement clair par rapport à Jésus que nous avons accueilli dans nos vies. Les personnes qui renoncent à leur religion d’origine pour se convertir au Christ savent bien de quoi Jésus parle. Et dans nos familles, même si l’abandon par certains de la foi chrétienne ne suscite pas une guerre ouverte, il est souvent cause de déchirement intérieur pour ceux qui ont essayé d’en témoigner et de la transmettre.
Après sa résurrection, c’est néanmoins bien la paix que Jésus adresse à ses disciples. C’est qu’alors son baptême dans la mort aura allumé le feu de l’Esprit en qui l’unité, en nous et entre nous, sera définitivement accomplie. Il nous reste à y consentir en nous laissant embraser puisque nous avons été plongés dans les eaux du baptême et purifiés par la Parole.
Sr Anne-Sophie, op | Vendredi 15 août 2025
Luc 12, 49-53
En ce temps-là,
Jésus disait à ses disciples :
« Je suis venu apporter un feu sur la terre,
et comme je voudrais qu’il soit déjà allumé !
Je dois recevoir un baptême,
et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli !
Pensez-vous que je sois venu
mettre la paix sur la terre ?
Non, je vous le dis,
mais bien plutôt la division.
Car désormais cinq personnes de la même famille seront divisées :
trois contre deux et deux contre trois ;
ils se diviseront :
le père contre le fils
et le fils contre le père,
la mère contre la fille
et la fille contre la mère,
la belle-mère contre la belle-fille
et la belle-fille contre la belle-mère. »
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