Le constat de Betram Gordon, partenaire au Soudan du Sud de l’Association suisse des Amis de Sœur Emmanuelle (ASASE), est sans appel. Aux crises habituelles auxquelles tente de répondre son ONG d’Église – insécurité, économie dévastatrice, crises sanitaire et alimentaire -, s’ajoute depuis trois ans les désastres climatiques. «Avant, nous avions neuf mois de pluie, aujourd’hui plus que quatre. Cela affecte grandement la production céréalière du pays et avec la sécurité alimentaire des populations.»
Son témoignage corrobore le Rapport sur l’état du climat en Afrique, publié en 2024 par l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Tout le continent fait face à une crise environnementale majeure, caractérisée par des sécheresses prolongées et des inondations, la dégradation des terres, la déforestation et la perte de biodiversité.
S’en suivent, notamment, une baisse de la production agricole, et donc une augmentation des risques de famine et de malnutrition, avec, à la clé, de nouveaux déplacements de population et de nouvelles crises humanitaires. Sans compter que la compétition pour les ressources naturelles, comme l’eau et les terres, peut aggraver les conflits existants et créer de nouveaux foyers de tension.
La Création en Christ
Suite à son assemblée plénière tenue en aout 2025 à Pretoria (Afrique du Sud), la Conférence des évêques catholiques d’Afrique australe (SACBC) s’est engagée à faire progresser la mission écologique de l’Église africaine et la «conversion écologique», à travers notamment la fête annuelle de la «Création en Christ».
Au Soudan du Sud, «la quantité de pluie qui tombe, sa distribution, sa fréquence, tout a changé», s’exclame Betram Gordon. « Cela affecte la production agricole du pays. » Mais les populations n’ont pas encore pris la mesure de ce que cela signifie pour leur avenir. Elles sont focalisées sur leur lutte pour la survie présente.
SVDP s’est donc engagée à promouvoir des pratiques agricoles résilientes au climat, telles que l’agroforesterie et la conservation des sols, pour améliorer la productivité agricole et réduire la dégradation des terres. «Nous essayons de sensibiliser les communautés auprès de qui nous sommes engagées pour qu’elles prennent des mesures préventives. Lors de nos formations aux jardins potagers, nous expliquons que la terre est ›vivante’, que de multiples micro-activités et organismes se cachent sous son sol et affectent en bien ou mal la production de nourriture.»
L’ONG encourage aussi les communautés autour de Juba à planter des arbres. «Nous n’avons plus de forêt, s’exclame Betram Gordon. L’herbe la remplace.» Un désastre pour ce pays dont les forêts équatoriales constituaient une richesse environnementale et de biodiversité certaine.
Pour le directeur de la Société St-Vincent-de-Paul (SVDP) à Juba, l’Église a un rôle d’éducation et de prévention certain. Mais le temps est compté. En l’absence de mesures adéquates, jusqu’à 118 millions de personnes extrêmement pauvres pourraient être exposées à la sécheresse, aux inondations et aux chaleurs extrêmes en Afrique d’ici à 2030, a alerté l’OMM dans son rapport. (cath.ch/lb)
Lucienne Bittar
Portail catholique suisse
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