Rome: Lettre du pape aux personnes âgées
Rome, 26 octobre 1999 (APIC) Le pape conserve le goût de la vie malgré les limitations qui surviennent avec l’âge, et considère qu’il est beau de pouvoir se dépenser jusqu’à la fin pour la cause du Royaume de Dieu. C’est ce qu’affirme Jean-Paul II dans une « Lettre aux personnes âgées » publiée le 26 octobre 1999, écrite à l’occasion de l’année internationale des personnes âgées proclamée par l’ONU. Une lettre dans laquelle il rappelle également sa ferme condamnation de l’euthanasie.
« Agé moi aussi, j’ai ressenti le désir d’engager le dialogue avec vous », commence le pape en s’adressant à ses frères et sœurs âgés, et en particulier à ceux qui souffrent, pour leur exprimer sa proximité spirituelle. « Je parle à des personnes de mon âge », souligne-t-il. « Je peux donc facilement chercher une analogie dans ma vie personnelle ».
Pour Jean-Paul II, « le don de la vie, malgré la peine et la misère qui la marquent, est trop beau et trop précieux pour que nous puissions nous en lasser ». « Je me sens poussé, par un désir spontané, à vous faire part en toute sincérité des sentiments qui m’animent en cette dernière étape de ma vie, après plus de vingt ans de ministère sur le Siège de Pierre, et dans l’attente du troisième millénaire désormais à nos portes », écrit-il. « Malgré les limitations qui surviennent avec l’âge, je conserve le goût de la vie ». « Il est beau de pouvoir se dépenser jusqu’à la fin pour la cause du Royaume de Dieu ».
Jean-Paul II tire alors de l’Evangile l’exemple de saint Pierre à qui Jésus dit « Quand tu étais plus jeune, tu mettais toi-même ta ceinture, et tu allais où tu voulais, mais quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera là où tu ne voudrais pas aller ». « Ce sont des paroles qui me touchent de près en tant que successeur de Pierre », écrit le pape, « et qui me font éprouver avec force le besoin de tendre les mains vers celles du Christ, par obéissance à son commandement: suis-moi ».
S’abandonner dans les mains de Dieu
Pour le pape, les années de la vieillesse sont donc « des années qu’il faut vivre en s’abandonnant avec foi entre les mains de Dieu le Père et de sa miséricordieuse Providence », et « qu’il faut employer, de façon inventive, à approfondir sa vie spirituelle, en priant plus intensément, et en se dévouant à ses frères dans la charité ».
« En même temps », poursuit Jean-Paul II, « j’éprouve une grande paix quand je pense au moment où le Seigneur m’appellera ». Pour le pape, la mort qui conduit à la rencontre avec Dieu est « le désir le plus profond du cœur humain, même en celui qui n’en a pas conscience ». Un désir qui « n’ôte rien à la joie de l’heure présente », fait-il remarquer.
Jean-Paul II souligne toutefois que les « soucis et tribulations largement présents dans l’existence de chacun peuvent mettre à rude épreuve la résistance psychologique et peut-être même ébranler la foi elle-même ». « Mais l’expérience enseigne que les souffrances quotidiennes elles-mêmes contribuent souvent, avec la grâce du Seigneur, à la maturité des personnes, en trempant leur caractère », assure-t-il.
Le pape reconnaît aussi que la mort est difficile à envisager parce qu’elle est « contraire à l’instinct le plus profond de l’homme ». Mais la foi, estime-t-il, en « éclaire le mystère, et donne de la sérénité à la vieillesse, qui n’est plus considérée ni vécue comme l’attente passive d’un événement destructeur, mais comme la promesse de parvenir à la pleine maturité ».
La vieillesse ne manque pas d’avantages
Pour Jean-Paul II en outre, « la vieillesse ne manque pas de certains avantages ». Elle est en effet « l’époque privilégiée de la sagesse et l’étape définitive de la maturité humaine ». Par ailleurs, souligne-t-il, l’esprit humain, « tout en participant du vieillissement du corps, reste en un sens toujours jeune s’il vit tourné vers l’éternel ». Il fait l’expérience de cette éternelle jeunesse, précise-t-il, lorsque l’affection prévenante et reconnaissante des personnes aimées s’ajoute au témoignage intérieur de la bonne conscience.
Jean-Paul II déplore alors que dans certains pays, et en particulier dans « les plus évoluées sur le plan économique », la vieillesse soit aujourd’hui moins « estimée et valorisée qu’auparavant, et même dépréciée, à cause d’une mentalité qui prône l’utilité immédiate et la productivité de l’homme ». Pour le pape, « c’est un devoir d’opérer une inversion de tendance pour faire en sorte que ceux qui avancent en âge puissent vieillir dans la dignité, et ne soient pas réduits à se demander si leur existence est encore utile ». « Puisse la société valoriser pleinement les personnes âgées », s’exclame-t-il. Jean-Paul II rappelle en effet qu’elles sont en mesure de proposer aux jeunes des conseils et des enseignements précieux par leur expérience et leur maturité. « Elles sont gardiennes de la mémoire collective, et pour cette raison, les interprètes privilégiées de l’ensemble des valeurs et d’idéaux communs qui règlent et guident la convivialité sociale ». Pour le pape, exclure les personnes âgées, c’est donc « refuser le passé où s’enracine le présent, au nom d’une modernité sans mémoire ».
Rester en famille
Jean-Paul II évoque encore la compréhension et le réconfort que peuvent apporter les personnes âgées « seules ou malades mais capables de redonner courage par un conseil affectueux, par la prière silencieuse, par le témoignage d’une souffrance accueillie dans l’abandon et la patience ». Il souligne enfin que les personnes âgées sont particulièrement précieuses pour l’évangélisation qu’elles remplissent souvent auprès de leurs petits enfants.
Pour Jean-Paul II, il y a donc un triple devoir à remplir à l’égard des personnes âgées, qui consiste à « les accueillir, les assister et mettre en valeur leurs qualités ». « L’idéal serait que les personnes âgées restent en famille, avec la garantie d’aides sociales efficaces pour les nécessités croissantes propres à leur âge ou à la maladie », estime le pape, qui reconnaît toutefois qu’il y a des cas où « les circonstances recommandent ou imposent l’entrée dans une maison de retraite ». Jean-Paul II rend hommage à ces institutions, comme aux Congrégations religieuses et aux groupes de bénévoles qui accueillent les personnes âgées pauvres ou en difficulté. Il les encourage à mettre l’accent non seulement sur l’efficacité dans l’organisation, mais aussi sur l’attention affectueuse dont elles ont besoin. Il salue également de façon positive toutes les initiatives sociales qui leur permettent de continuer à s’entretenir sur les plans physique et intellectuel et dans leur vie de relations, et à se rendre utiles. Pour Jean-Paul II, c’est ainsi qu’on garde et qu’on développe le goût de la vie, ce premier don de Dieu, qui « ne va pas à l’encontre du désir d’éternité qui mûrit chez tous ceux qui font une expérience spirituelle profonde « .
L’euthanasie: une compassion mal comprise
Le pape réaffirme enfin dans sa lettre sa ferme condamnation de l’euthanasie, en déplorant que son concept ait perdu peu à peu ces derniers temps la « connotation d’horreur qu’elle suscite naturellement lorsqu’on est sensible au respect de la vie « . « Il peut arriver, il est vrai « , reconnaît-il, « que dans les cas de maladies graves accompagnées de souffrances insupportables, les personnes éprouvées soient poussées à l’exaspération ». « Leurs proches ou ceux qui sont chargés de les soigner peuvent se sentir enclins, par une compassion mal comprise, à tenir pour raisonnable la solution de la mort douce », continue le pape. « A ce propos, il faut rappeler que la loi morale permet de renoncer à ce qu’on appelle l’acharnement thérapeutique », précise-t-il, « et qu’elle réclame seulement les soins qui entrent dans les exigences normales de l’assistance médicale, laquelle est surtout destinée, dans les maladies incurables, à alléger la douleur ». « Mais toute autre est l’euthanasie, entendue comme provocation directe de la mort » s’exclame Jean-Paul II. « Malgré les intentions et les circonstances, elle demeure un acte intrinsèquement mauvais, une violation de la loi divine, une offense à la dignité de la personne humaine ». (apic/imed/tg)
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