«Dilexi te»: les inspirations de Léon XIV

La première exhortation apostolique du pape Léon XIV, Dilexi te, remet en lumière la longue tradition de l’Église en matière de soutien aux pauvres, dans la continuité du pape François. Plusieurs figures françaises sont évoquées, reliant près d’un millénaire d’histoire de la charité chrétienne, de saint Bernard de Clairvaux (1090-1153) à sœur Emmanuelle (1908-2008).

Citant une catéchèse de Benoît XVI, le pape Léon XIV explique que saint Bernard de Clairvaux «rappela avec fermeté la nécessité d’une vie sobre et mesurée, à table comme dans l’habillement et dans les édifices monastiques, recommandant de soutenir et de prendre soin des pauvres». Ce «grand réformateur cistercien» a donc mis en évidence le fait que «l’Église n’est pleinement épouse du Seigneur que lorsqu’elle est également sœur des pauvres», insiste-t-il.

Le pontife s’appuie sur la tradition médiévale portée par ce moine qui fut canonisé dès 1174, soit seulement 21 ans après sa mort. Il confie que «là où les moines ont ouvert leurs portes aux pauvres, l’Église a révélé avec humilité et fermeté que la contemplation n’exclut pas la miséricorde mais l’exige comme son fruit le plus pur».

Congrégations au service des malades

Rendant hommage aux congrégations féminines qui ont su offrir des «oasis de dignité» aux personnes malades, en leur apportant «réconfort, écoute, présence et, surtout, tendresse», le pape mentionne particulièrement les Filles de la Charité de saint Vincent de Paul.

Il utilise une citation de sainte Louise de Marillac (1591-1650) écrivant à ses sœurs qu’elles avaient reçu «une bénédiction de Dieu toute particulière pour le service des pauvres malades des hôpitaux». C’est en lien avec saint Vincent de Paul que cette femme veuve et mère d’un enfant, issue d’une famille aristocratique très influente, entra dans la vie religieuse et fonda cette congrégation des Filles de la Charité en 1642. Sainte Louise de Marillac, canonisée par Pie XI en 1934, a été proclamée par Jean XXIII sainte patronne des œuvres sociales en 1960.

Les trinitaires contre l’esclavage

Léon XIV évoque par ailleurs l’Ordre de la Très Sainte Trinité et de la Rédemption des Captifs (Trinitaires), fondé en 1198 par le provençal saint Jean de Matha (1160-1213), et saint Félix de Valois (1127-1212), originaire du nord de la France. Il souligne que les trinitaires ont «le charisme spécifique de libérer les chrétiens réduits en esclavage, en mettant à leur disposition leurs propres biens et, souvent, en offrant leur vie en échange».

Dans cette spiritualité, «la libération des prisonniers est une expression de l’amour trinitaire: un Dieu qui libère non seulement de l’esclavage spirituel, mais aussi de l’oppression concrète». Les trinitaires sont actuellement présents dans des territoires difficiles comme Madagascar ou les pays du Golfe arabo-persique: l’actuel vicaire apostolique d’Arabie du Nord, Mgr Aldo Berardi, est un religieux trinitaire.

Les pionniers de l’éducation

Le pontife évoque aussi deux figures religieuses françaises qui furent des pionniers de l’éducation ouverte à tous, et notamment aux plus pauvres. Il rappelle ainsi que saint Jean-Baptiste de La Salle (1651-1719) lutta contre «l’injustice causée par l’exclusion des enfants des ouvriers et des paysans du système éducatif français de son temps », et fonda aussi « les Frères des Écoles Chrétiennes avec l’idéal d’offrir une instruction gratuite, une formation solide et un environnement fraternel». Le 15 mai dernier, au tout début de son pontificat, Léon XIV avait déjà développé cet hommage lors d’une audience aux religieux lasalliens.

Léon XIV cite également l’héritage de saint Marcellin Champagnat (1789-1840), le fondateur de l’Institut des Frères maristes des écoles. «Sensible aux besoins spirituels et éducatifs de son époque, spécialement à l’ignorance religieuse et aux situations d’abandon que connaissait particulièrement la jeunesse, il se consacra de tout cœur, en des temps où l’accès à l’éducation restait l’apanage de quelques privilégiés, à la mission d’éduquer et d’évangéliser les enfants et les jeunes, surtout les plus démunis», écrit Léon XIV dans Dilexi te, reprenant les mots de Jean Paul II lors de sa canonisation en 1999.

Les figures contemporaines de la charité

Le pape fait référence à deux personnalités plus contemporaines ayant montré que «les plus pauvres ne sont pas seulement objet de notre compassion, mais des maîtres d’Évangile». Il nomme notamment saint Charles de Foucauld (1858-1916) et son rôle auprès des «communautés du désert» en Algérie. Canonisé par François en 2022, cet ancien militaire devenu ermite fut une grande source d’inspiration du pontife argentin dans son ouverture au dialogue fraternel avec les musulmans.

Enfin, d’une façon plus inédite pour un pape, Léon XIV mentionne la figure de Sœur Emmanuelle (1908-2008) et sa mission «avec les ramasseurs d’ordures dans le quartier d’Ezbet El Nakhl, au Caire». La religieuse franco-belge, qui devint une figure extrêmement populaire après la diffusion de reportages télévisés sur son action auprès des chiffonniers du Caire, demeure dans la mémoire collective l’incarnation d’une vie religieuse donnée aux plus pauvres avec énergie et enthousiasme.

Dans leurs relations avec les plus pauvres, ces figures religieuses ont montré qu’il «ne s’agit pas de ‘leur apporter’ Dieu, mais de le rencontrer en eux», insiste Léon XIV dans son exhortation. (cath.ch/imedia/cv/rz)

I.MEDIA

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/dilexi-te-les-inspirations-de-leon-xiv/