María Corina Machado, 58 ans, vit dans la clandestinité depuis la réélection à la présidentielle du Venezuela de Nicolás Maduro, en juillet 2024. Le comité Nobel l’a saluée comme «une femme qui maintient la flamme de la démocratie au milieu d’une obscurité grandissante». Cela fait d’elle «l’un des exemples les plus extraordinaires de courage civique en Amérique latine ces derniers temps », a déclaré à Oslo le président du comité norvégien, Jørgen Watne Frydnes. Elle « a été une figure clé de l’unité au sein d’une opposition politique autrefois profondément divisée, une opposition qui a trouvé un terrain d’entente dans la revendication d’élections libres et d’un gouvernement représentatif », a-t-il ajouté.
María Corina Machado est née à Caracas, au sein d’une riche famille d’entrepreneurs catholiques. Elle a étudié à l’Université jésuite Andrés Bello. Ingénieure de formation, divorcée et mère de trois enfants, elle milite depuis plus de 20 ans pour des élections libres dans son pays natal, d’abord sous Hugo Chávez, puis, depuis 2013 sous Nicolás Maduro. Elle a créé en 2002 le mouvement Súmate, puis le parti politique de droite libérale Vente Venezuela en 2012.
Sa notoriété a explosé lors des primaires de l’opposition, en octobre 2023, où elle a recueilli plus de 90% des voix. Mais elle a été empêchée de se présenter à la présidentielle de 2024. Régulièrement menacée, elle a décidé de rester au Venezuela et de poursuivre sa lutte dans la clandestinité. Dans une récente interview télévisée, elle a lancé: «Ensemble, nous sortirons le Venezuela du chaos et rétablirons l’ordre.»
Comme de bien entendu, l’annonce de son Prix a été décriée par Maduro, qui affute volontiers María Corina Machado du surnom de «sorcière démoniaque Sayona», l’esprit vengeur des légendes vénézuéliennes. Elle aurait même conclu un «pacte satanique» avec le milliardaire Elon Musk, comme il l’a récemment lancé lors d’un rassemblement.
De fait, l’opposante politique vénézuélienne considère les États-Unis comme un important allié. À l’époque de la présidence de George W. Bush, le mouvement Súmate avait d’aileurs bénéficié des largesses de la National Endowment for Democracy (NED), un organisme étatique américain originellement dédié à financer des organisations anticommunistes sous la Guerre froide et qui demeure un important instrument de l’influence américaine.
Machado cultive aussi des liens avec les dirigeants de la droite latino-américaine proches du de Donald Trump, comme l’argentin Javier Milei. Alignée à la position de Trump par rapport à Israël, elle a publiquement déclaré son intention de «reconnaître Jérusalem comme sa capitale». Elle compte donc aujourd’hui sur le soutien du président américain, qui semble lui être acquis. Ce dernier a récemment qualifié Maduro et son appareil étatique d’organisation criminelle. Et Trump n’a pas exclu, outre des attaques militaires contre les transports présumés de drogue par voie maritime, de mener également des opérations par voie terrestre.
L’opposante vénézuélienne se rapproche aussi de Trump par sa façon de mettre en scène sa foi religieuse, moteur essentiel de son engagement politique. Lors de sa dernière apparition publique à Caracas, alors qu’elle se tenait sur une camionnette, elle a reçu la bénédiction d’un prêtre franciscain et d’une religieuse devant une foule conquise brandissant chapelets et croix. (cath.ch/ag/arch/lb)
Lucienne Bittar
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