Évangile de Dimanche: un drôle de dimanche?

La liturgie de ce dimanche m’étonne. Nous fêtons l’anniversaire de la dédicace de la basilique du Latran et cette fête prime sur la célébration ordinaire du dimanche. De quel droit ?

Certes, Saint Jean du Latran, c’est la cathédrale du diocèse de Rome dont l’évêque est le Pape. Ce n’est pas rien. Mais tout de même ! Quand l’anniversaire de la dédicace de notre petite église monastique d’Estavayer tombe le dimanche, il supplante aussi – si l’on peut dire – le Jour du Seigneur. Cela ne tient donc pas à l’importance du bâtiment.

« L’évangile choisi pour cette fête relativise à l’extrême l’importance des édifices de pierres »

On peut d’autant plus s’en étonner que l’évangile choisi pour cette fête relativise à l’extrême l’importance de l’édifice de pierres qu’est le temple de Jérusalem – pourtant magnifique – au profit du corps de Jésus, nouveau sanctuaire élevé en trois jours, à savoir par sa passion, sa mort et sa résurrection que célèbre justement le dimanche: «Détruisez ce sanctuaire, et en trois jours je le relèverai.» (…) «Mais lui parlait du sanctuaire de son corps».

Notre attention de chrétiens devrait être toute polarisée par ce Corps offert pour nous auquel nous communions pour le devenir nous-mêmes. Nous sommes le Corps du Christ, le temple de l’Esprit. À quoi bon attirer notre attention sur un bâtiment ?

« ‘Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de commerce’, rappelle Jésus »

Il faut néanmoins remarquer que Jésus dans notre évangile n’a rien contre le bâtiment lui-même mais contre le détournement que l’on en fait: «Cessez de faire de la maison de mon Père une maison de commerce.» Force est de reconnaître qu’on y fait ses affaires, qu’on s’y fait valoir aussi en mettant de grosses sommes dans le tronc, qu’on croit même acheter Dieu à force de gros bétail offert en holocauste. Quel trafic! Tout cela a un prix, comme la construction du temple en a eu un. Pensez donc: ne serait-ce que payer des ouvriers pendant 46 ans!

Le sanctuaire érigé en trois jours a aussi un coût, mais c’est le coût du don gratuit et total. Jésus ne s’est rien réservé et il n’a pas marchandé avec son Père n’ayant qu’une seule et même volonté avec lui. Il a donné sa vie pour nous faire entrer dans la maison du Père que nos églises figurent quand elles nous rassemblent pour accueillir ce don. C’est parce que nous y sommes rassemblés au nom du Christ que nous pouvons comme toucher son Corps offert.

« Dans nos édifices, nous célébrons Celui dont l’humble présence se lie pour toujours aux pierres vivantes que nous sommes »

Dans l’Eucharistie qui y est célébrée, cette offrande est réitérée afin que petit-à-petit nous devenions nous-mêmes le Corps de Jésus. D’extérieur, le temple est porté à l’intérieur de nous par la médiation du Corps de Jésus. Nos églises sont les lieux privilégiés de ce corps à corps salutaire qui fait de nous des sanctuaires de la Présence infinie de Dieu, et aussi les porteurs de cette Présence.

En fêtant l’anniversaire de leur dédicace, loin d’enfermer Dieu dans nos édifices, nous célébrons Celui dont l’humble présence dans un morceau de pain, dans des paroles humaines – mais inspirées, dans une assemblée si imparfaite, se lie pour toujours aux pierres vivantes que nous sommes. Bref, on ne célèbre rien d’autre que le dimanche!

Sr Anne-Sophie, op | Vendredi 7 novembre 2025


Jn 2, 13-22

Comme la Pâque juive était proche,
Jésus monta à Jérusalem.
    Dans le Temple, il trouva installés
les marchands de bœufs, de brebis et de colombes,
et les changeurs.
    Il fit un fouet avec des cordes,
et les chassa tous du Temple, ainsi que les brebis et les bœufs ;
il jeta par terre la monnaie des changeurs,
renversa leurs comptoirs,
    et dit aux marchands de colombes :
« Enlevez cela d’ici.
Cessez de faire de la maison de mon Père
une maison de commerce. »
    Ses disciples se rappelèrent qu’il est écrit :
L’amour de ta maison fera mon tourment.
    Des Juifs l’interpellèrent :
« Quel signe peux-tu nous donner
pour agir ainsi ? »
    Jésus leur répondit :
« Détruisez ce sanctuaire,
et en trois jours je le relèverai. »
    Les Juifs lui répliquèrent :
« Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce sanctuaire,
et toi, en trois jours tu le relèverais ! »
    Mais lui parlait du sanctuaire de son corps.

    Aussi, quand il se réveilla d’entre les morts,
ses disciples se rappelèrent qu’il avait dit cela ;
ils crurent à l’Écriture
et à la parole que Jésus avait dite.

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