A Nicée, Léon XIV appelle à «surmonter le scandale des divisions»

C’était le point culminant du voyage de Léon XIV en Turquie: le 28 novembre 2025, 1700 ans après le Concile de Nicée, Léon XIV, entouré d’une trentaine de représentants d’Églises chrétiennes, orthodoxes et protestantes, a fait mémoire de cet événement qui a défini les bases de la foi chrétienne, sur les lieux mêmes où il s’est déroulé. Tous ont récité solennellement d’une même voix le «Credo», profession de foi des chrétiens. 

Durant cette rencontre d’une heure, qui a mis en relief aussi la cartographie encore divisée des chrétiens – par l’absence du patriarcat de Moscou notamment –, le pape a lancé un plaidoyer pour la fraternité universelle et s’est élevé contre le fanatisme religieux.

Au deuxième jour de son voyage apostolique en Turquie et au Liban, Léon XIV a quitté Istanbul pour franchir en hélicoptère les 150 kilomètres le séparant d’Iznik. Cette ville construite au bord du lac du même nom, fut le site du premier concile qui en 325 rassembla plus de 300 évêques d’Orient et d’Occident. Après un survol des ruines de la basilique Saint Néophyte construite sur les lieux qui qui hébergèrent cet événement historique, le pape a atterri non loin. 

Léon XIV, entouré d’une trentaine de représentants d’Églises chrétiennes, orthodoxes et protestantes | © Vatican Media

Accueilli par le patriarche œcuménique de Constantinople, Bartholomée Ier, Léon XIV s’est dirigé en procession sur une passerelle, vers la plateforme construite pour l’occasion, surplombant les fouilles archéologiques de l’ancienne basilique. Au son d’hymnes en diverses langues, les responsables religieux présents se sont placés les uns à côté des autres devant deux icônes du Christ et du Concile pour un temps de prière.

Cette rencontre œcuménique regroupait les représentants des cinq Églises du premier millénaire (Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem). À leurs côtés, étaient présents divers délégués d’Églises issues de la Réforme ou d’autres séparations (luthériens, réformés, anglicans, méthodistes, baptistes, mennonites, pentecôtistes, évangéliques et vieux catholiques…), qui reconnaissent également Nicée. L’absence de représentants du patriarcat de Moscou s’est néanmoins faite cruellement ressentir.

Léon XIV souligne le lien qui unit les disciples de Jésus 

En cette période «dramatique», où l’humanité est «affligée par les conflits et les violences», le pape a vu un signe d’espoir dans cette réunion historique : la reconnaissance de la divinité de Jésus, proclamée à Nicée, est «un lien profond qui unit déjà tous les chrétiens», a-t-il assuré. La profession de foi – le «Credo» – qui fut constituée à ce moment-là, et qui est encore récité aujourd’hui dans les églises chrétiennes, affirme notamment que Jésus partage la «même nature que le Père». Le concile avait été d’ailleurs convoqué pour s’opposer au courant de l’arianisme, qui niait la divinité de Jésus, le concevant comme inférieur à Dieu le Père. 

Tous les participants ont allumé une bougie | © Vatican Media

Devant les chefs des Églises, Léon XIV a assuré que la foi en la divinité de Jésus revêtait «une importance fondamentale dans la marche des chrétiens vers la pleine communion», en tant qu’elle est partagée par toutes les communautés chrétiennes dans le monde. L’enjeu de Nicée est encore actuel, a-t-il aussi glissé en mettant en garde contre le risque «de réduire Jésus-Christ à une sorte de chef charismatique ou de surhomme». Ce que Benoît XVI avait qualifié de ‘nouvel arianisme’.

L’évêque de Rome a invité les chrétiens à «surmonter le scandale des divisions», faisant noter que leur foi «en un seul Dieu, le Père» s’accompagne d’une responsabilité envers tous les êtres humains. «Il existe une fraternité et une sororité universelles, indépendamment de l’ethnie, de la nationalité, de la religion ou de l’opinion», a-t-il déclaré, estimant que les religions «sont dépositaires de cette vérité». 

Le pontife s’est aussi élevé contre «toute forme de fondamentalisme et de fanatisme». «L’utilisation de la religion pour justifier la guerre et la violence […] doit être rejetée avec force», a-t-il insisté, recommandant le «dialogue» et la «collaboration». 

Les participants ont ensuite récité d’une même voix en anglais le Credo, la première confession chrétienne. Pour préserver l’unité, cette version ne contenait pas la mention du Filioque, qui signifie «et du Fils». Contrairement aux orthodoxes, les catholiques considèrent que l’Esprit Saint, troisième personne de la Trinité, procède de Dieu le Père «et du Fils», expression ajoutée après les conciles de Nicée et de Constantinople (381). La prière s’est terminée par la récitation du Notre Père – chacun dans sa langue. 

Au bord du lac, devant les ruines de la basilique antique longtemps immergée, la commémoration se voulait un symbole d’unité | © Vatican Media

Nicée, cartographie de l’état de l’unité des chrétiens

Au bord des ondes bleues du lac, devant les ruines de la basilique antique longtemps immergée, la commémoration se voulait un symbole d’unité. Mais elle offrait aussi une photographie des différends existant entre les Églises, avec l’absence d’une partie de l’orthodoxie. Le patriarcat de Moscou notamment n’était pas représenté dans l’assemblée. 

«Ici ce n’est pas l’ONU du christianisme», relativisait à I.MEDIA le frère Claudio Monge, dominicain vivant à Istanbul. «Cet événement ne célèbre pas le chemin réalisé jusqu’à présent mais ouvre de nouvelles perspectives pour l’avenir», confiait-il, sur la plage du lac d’Iznik. Le religieux italien ne cachait pas les grandes difficultés qui existent actuellement au sein du monde orthodoxe, notamment depuis l’échec du concile panorthodoxe en 2016 et la rupture de la communion entre Moscou et Constantinople en 2018, déchirure accentuée avec la guerre en Ukraine. «Mais l’unité est un défi aussi au sein des Églises catholiques!», avançait le religieux. (cath.ch/imedia/mp)

I.MEDIA

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/a-nicee-leon-xiv-appelle-a-surmonter-le-scandale-des-divisions/