Rwanda: L’évêque de Gikongoro arrêté. La chasse aux sorcières se poursuit-elle à Kigali ?
Kigali, 15 avril 1999 (APIC) Mgr Augustin Misago, évêque de Gikongoro, dans le sud-ouest du Rwanda, a été arrêté mercredi près de la nonciature à Kigali sous l’accusation de crime contre l’humanité et de participation au génocide. Mgr Misago, âgé de 56 ans, est depuis des années dénoncé par des survivants du génocide de 1994, mais il a toujours proclamé son innocence. Des milieux catholiques sur place parlent de chasse aux sorcières dans le cadre d’un climat délétère.
Répondant la semaine dernières aux violentes attaques portées contre sa personne par le président rwandais Pasteur Bizimungu à Kibeho le 7 avril lors de la clôture de la semaine commémorative du génocide rwandais, Mgr Misago écrit que « les prétendus griefs formulés contre moi sont tous des calomnies, encouragées entre autres par tout un climat de préjugés ethnocentristes et de procès d’intentions bien orchestrés contre ma personne, pour des intérêts peu avouables. »
Mercredi matin, sur mandat des autorités judiciaires, la police rwandaise a appréhendé non loin de la nonciature de Kigali Mgr Misago, un évêque âgé de 56 ans, suspecté d’être impliqué dans le génocide de 1994. L’évêque de Gikongoro est retenu responsable de la disparition d’environ 30 adolescentes qui, en 1994, lui avaient demandé protection. L’arrestation du prélat suscite trouble et préoccupation au sein de la communauté catholique du Rwanda, note l’agence missionnaire MISNA à Rome.
Une campagne orchestrée visant à salir l’image de l’Eglise catholique
Dès 1992, ce pasteur s’est distingué par son service épiscopal au diocèse de Gikongoro Le président rwandais Pasteur Bizimungu avait récemment déclaré que l’Etat serait prêt à poursuivre Mgr Misago au cas où les autorités ecclésiastiques ne le feraient pas. Le 9 avril dernier, l’évêque mis en cause a publié une lettre ouverte dans laquelle il s’indignait des accusations « complètement infondées » portées contre lui par le président rwandais.
« Mgr Misago semble donc être la victime par excellence d’un système judiciaire dont le but est de salir l’image de l’Eglise catholique. Il convient de rappeler que 125’000 personnes en attente de jugement croupissent toujours dans les prisons rwandaises. Seuls 350 procès ont, jusqu’ici, eu lieu; cela en dit long sur les critères de justice appliqués par le régime actuel », commente l’agence romaine.
Avec l’arrestation de Mgr Misago, les autorités en place à Kigali s’en prennent pour la première fois à un évêque, plusieurs prêtres et religieuses étant déjà en prison sous l’accusation de participation au génocide. L’an dernier, deux prêtres ont été condamnés à mort sous le même chef d’accusation. Le procureur de Kigali Emmanuel Rukangira a déclaré que le prélat était détenu au poste de police de Muhima. La date de son procès n’a pas encore été fixée. On estime que plus de 150’000 personnes ont été massacrées rien que dans le diocèse de Gikongoro.
Le président rwandais Bizimungu avait pris Mgr Misago dans son collimateur en avertissant que l’Etat rwandais allait prendre des mesures si l’Eglise catholique ne le faisait pas, accusant le prélat d’être « au-dessus des lois ». Et d’ajouter, singulièrement, que même si Mgr Misago était déclaré innocent, le Rwanda demanderait au Vatican de le déplacer, « parce que les fidèles catholiques n’ont plus confiance en lui », rapporte jeudi la BBC. (apic/bia/misn/bbc/be)
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