Présent aux rencontres de Louvain
Bruxelles, 26 janvier 1999 (APIC) Le théologien camerounais Jean-Marc Ela sera promu le 2 février docteur « honoris causa » de la Katholieke Universiteit de Leuven (KUL), Aujourd’hui exilé au Québec, Jean-Marc Ela est considéré comme l’un des penseurs et des théologiens de la libération les plus éminents de sa génération. Il recevra sa promotion lors des rencontres bilingues et trilingues organisées du 1er au 3 février à Louvain.
Né en 1936 au sud du Cameroun, alors colonie française, Jean-Marc Ela obtient en 1969 à l’Université de Strasbourg un doctorat d’Etat en théologie, avec une thèse sur Luther, sa conception de l’homme et sa vision de Dieu. En 1978, une thèse de doctorat du troisième cycle en anthropologie sociale et culturelle, défendue à la Sorbonne, lui ouvre une carrière de professeur à l’Université nationale du Cameroun à Yaoundé.
Jean-Marc Ela complète ses recherches par un doctorat d’Etat en sociologie, pour lequel il revient en 1990, à Strasbourg, défendre une thèse consacrée à la résistance du peuple face aux institutions délabrées de l’Etat et face à l’industrie du profit agro-alimentaire au nord du Carmeroun.
Boire à son puits
Le sujet de sa thèse en sociologie, Jean-Marc Ela l’a découvert comme prêtre au sein des communautés rurales du nord du Cameroun, où il a été curé de 1979 à 1985. Durant cette période, il est frappé par la manière dont les familles parviennent à s’organiser par rapport à un Etat postcolonial en banqueroute et par rapport aux modèles néolibéraux de développement, de consommation, de nivellement. Il est témoin d’un énorme exode vers les villes, d’une dégradation de l’environnement et d’une dévaluation incessante de la monnaie. Il y voit une preuve supplémentaire que les Africains doivent se démarquer des modèles occidentaux pour retourner à boire à leur propre puits.
Jean-Marc Ela plaide donc pour un nouvel enracinement social, politique et culturel de l’élite intellectuelle et politique. Cet enracinement passe idéalement, à ses yeux, par des maisons où se cultiverait la mémoire culturelle des dominés, surtout en milieu rural.
Les cultures locales jouent un rôle clé dans la pensée du théologien sociologue. C’est grâce à elles que chacun trouve une identité et que des communautés diverses peuvent se développer, depuis la famille élargie jusqu’aux groupes marginalisés. Jean-Marc Ela mise dès lors sur les communautés de base. Leurs solidarités de voisinage et leur brassage original des actions sociales, des cultures et des religions sont la meilleure résistance à l’exclusion qui les menace, vu les rabotages qu’opère la mondialisation.
Dérangeant pour les autorités de dans son pays, il est contraint de s’exiler
Aux yeux des autorités du Cameroun dans les années 90, le professeur Ela est toutefois devenu « un théologien à problèmes ». Autrement dit: la voix du théologien les dérange. Surtout qu’il n’hésite pas dire tout haut les questions qu’il se pose sur l’assassinat politique du Jésuite camerounais Engelbert Mveng. Ce religieux assumait avec lui la direction de l’Association Œcuménique des Théologiens Africains ainsi que celle du Centre Africain de Recherche pour l’Inculturation.
En août 1995, à l’âge de 59 ans, Jean-Marc Ela est finalement contraint de s’exiler. Il obtient en 1996 le statut de réfugié politique au Canada. Il enseigne d’abord à l’Université Laval de Québec, puis à l’Université du Québec, à Montréal, où il est prendra la direction du Service universitaire pour la Coopération au Développement.
Au cœur des rencontres de Louvain
Enracinement culturel, ouverture à la diversité, coopération Nord-Sud sur pied d’égalité, développement prenant en compte les aspirations multiples des communautés… Les sujets abordés dans la dizaine d’ouvrages déjà publiés par Jean-Marc Ela seront au cœur des rencontres bilingues ou trilingues organisées du 1er au 3 février à Louvain. (apic/cip/ab)
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