Sénégal: Gouvernement et rebelles de Casamance se rencontrent à l’évêché de Ziguinchor
Dakar, 18 décembre (APIC) Le gouvernement sénégalais et la rébellion du Mouvement des Forces Démocratiques de Casamance (MFDC) fondé par un prêtre, l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, ont jeté officiellement, samedi à l’évêché de Ziguinchor, les bases d’un dialogue pour un retour définitif de la paix dans cette région, secouée depuis 18 ans par une lutte d’indépendance. Les discussions qui ont duré trois heures, ont eu essentiellement un caractère protocolaire.
Les deux parties ont eu leur première rencontre directe et publique, pour la première fois depuis l’alternance au sommet de l’Etat en mars dernier au Sénégal. La rencontre « solennelle et brève » a eu lieu en présence de l’évêque de la ville – chef-lieu de la Casamance – , Mgr Maixent Coly, ainsi que des chefs musulmans et chrétiens de la ville, tous de blanc vêtu. A l’extérieur, des femmes et des enfants manifestaient pour réclamer la paix. Cette rencontre fait suite à un accord de principe qu’elles ont conclu le 25 novembre dernier pour l’ouverture de négociations de paix.
Dans un message lu par son ministre de l’Intérieur et chef de la délégation gouvernementale, le général Mamadou Niang, le président Abdoulaye Wade a invité tous les participants à ces concertations « à franchir le pas pour une paix définitive en Casamance ». Il a réaffirmé son engagement en faveur d’une solution pacifique à la crise qui, a-t-il ajouté, a fait couler trop de sang et disloqué les familles.
L’abbé Augustin Diamacoune Senghor plaide pour l’internationalisation
L’abbé Augustin Diamacoune Senghor, fondateur du mouvement séparatiste, a pour sa part déclaré que la guerre a été imposée à la Casamance qui n’en voulait pas. Il a plaidé pour une internationalisation de la question casamançaise, en réclamant une participation, aux futures négociations, de la France, de l’ONU (Organisation des Nations Unies), de loua (Organisation de l’unité Africaine), ainsi que des pays voisins de la Casamance: la Gambie au nord et la Guinée-Bissau (sud). Ce dernier pays est généralement considéré comme le « protecteur » du MFDC. Ses combattants s’y replient après chaque opération. « Le Sénégal ne peut pas être juge et partie », a souligné le prélat rebelle. Mais le président Wade a estimé pour sa part que le problème doit être réglé par les Sénégalais et que le conflit ne doit pas être « internationalisé ».
Les représentants des gouvernements de Gambie et de Guinée-Bissau qui assistaient à la rencontre en tant qu’observateurs, ont insisté sur l’urgence d’un retour de la paix en Casamance, région meurtrie par la guerre. A la demande du MFDC, les discussions de fond commenceront ultérieurement. Le mouvement veut faire l’unité autour de son leader. Les négociations porteront sur 11 points dont l’application permettrait un retour définitif de la paix en Casamance. Il s’agit, entre autres, du dépôt des armes, du déminage de la région, de la réinsertion sociale des combattants rebelles, de la restitution et de la destruction de leurs armes, du retrait des militaires de la région, du désenclavement des localités isolées de la province.
Des milliers de victimes des combats
Le conflit en Casamance a éclaté en décembre 1982. Depuis, il a fait des milliers de victimes civiles et combattantes. La signature, dans le passé, de plusieurs accords de paix et les nombreux appels au cessez-le-feu n’ont pas mis fin à la violence armée.
Des sources de la société civile à Ziguinchor contactées par l’agence missionnaire romaine MISNA, les participants ont annoncé qu’ils fixeraient dans les prochains jours la date des discussions qui porteront sur des questions politiques ». Les sources de la société civile regrettent cependant qu’il n’ait pas été précisé si le gouvernement sénégalais et les rebelles
éviteront les affrontements armés durant les négociations.
Le président sénégalais Abdoulaye Wade a exprimé sa satisfaction quant à l’initiative en invitant à la recherche d’une « solution pacifique, juste et durable ». Ce n’est pas la première fois que des colloques de paix se tiendront et l’optimisme des observateurs est réservé. « On s’achemine vers de longues négociations », a estimé un observateur de la crise de la Casamance.
La paix ne doit pas être bâtie sur les sables mouvants
Vêtu d’une soutane blanche, le chef de la délégation de la rébellion, l’abbé Augustin Diamacoune Senghor, secrétaire général du Mouvement des forces démocratiques de Casamance (MFDC), était présent à l’évêché de Ziguinchor, ville dont il est originaire. Il a souhaité une paix « qui ne soit pas bricolée, ni bâtie sur les sables mouvants de l’irréalisme et de l’arbitraire ». L’annonce de l’ouverture des négociations de paix en Casamance a été accueillie « avec un profond soulagement et une grande espérance » par les évêques du Sénégal; ils ont invité les parties intéressées à ne pas mettre d’obstacles qui empêcheraient le bon déroulement de ce processus. « On ne peut improviser la paix… Il est nécessaire que le gouvernement et le MFDC prennent tout le temps nécessaire pour parvenir à un accord satisfaisant pour tous » demandent les évêques sénégalais. (apic/misna/ibc/fides/be)
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