Une heure et quart en tête-à-tête avec les détenus

Fribourg: Mgr Bernard Genoud fête à sa manière le Jubilé des prisons à Bellechasse

Par Marie-José Portmann, de l’APIC

Sugiez, 6 novembre 2000 (APIC) Mgr Bernard Genoud a marqué le Jubilé des prisons de façon originale dans son diocèse. Durant une heure et quart, samedi matin 4 novembre, l’évêque de Genève, Lausanne et Fribourg (LGF) a dialogué à bâtons rompus avec 18 prisonniers des Etablissements de Bellechasse, sis dans la plaine du Grand Marais, à deux pas du lac de Morat.

Mgr Genoud a auparavant fait le tour du propriétaire avec la Commission administrative du pénitencier fribourgeois, présidé par le conseiller d’Etat Claude Grandjean, chef du Département de Justice et Police.

« Des enfants autour d’un père », telle est l’image que rapporte Frère Fernando Santamaria, l’aumônier catholique de Bellechasse, qui a assisté à l’entrevue. La presse n’a pas été associé à ce moment d’intimité, afin que les prisonniers puissent s’exprimer à cœur ouvert. « Cette visite restera dans les annales des Etablissements, à l’instar de celle de Mgr Besson, qui a obtenu, avant la seconde guerre mondiale, que les prisonniers soient libérés de leurs chaînes.

Le directeur de Bellechasse Henri Nuoffer a laissé Mgr Bernard Genoud sur le pas de la porte de la grande salle communautaire – où se déroule aussi la prière du vendredi des musulmans, lorsque vient l’imam. L’évêque s’est assis à la tête des tables disposées en fer à cheval et a allumé une cigarette, aussitôt imité par plusieurs détenus, vêtus de leur tenue de visite: pantalon foncé et T-shirt violet. Cinquante prisonniers, soit un tiers des personnes retenues actuellement à Bellechasse, avaient annoncé leur venue. Pour se retrouver finalement à 18, en tête-à-tête avec le chef spirituel des catholiques du diocèse LGF. « Certains ont eu peur, à la dernière minute, qu’on les reconnaisse, où que soient évoqués des aspects trop personnels. D’autres n’avaient plus leur tenue de sortie, donnée à laver juste auparavant. D’autres encore ont peut-être finalement jugé que l’évêque ne pouvait rien changer à leurs affaires…, explique Frère Fernando, âgé d’une cinquantaine d’années, l’un des trois membres de la communauté mariste de Morat.

Face à des ressortissants catholiques, mais aussi réformés, orthodoxes, musulmans ou bouddhistes de tous les continents, (excepté l’Océanie), Mgr Bernard Genoud s’est d’abord présenté, livrant force anecdotes sur ses origines, sa vie familiale, son parcours de séminariste, de prêtre et de professeur de philosophie à Bulle et à Fribourg. Evoquant sa nomination comme évêque, il a précisé: « on est venu m’avertir que le nonce apostolique voulait me parler et j’ai dû quitter mes élèves séance tenante ».

Le bouddhisme pour base de communication

A la grande joie des deux Asiatiques de l’assistance, Mgr Genoud a pris Bouddha comme référence pour entrer en communication avec son auditoire. Il a mis ses interlocuteurs à l’aise: « Il n’existe pas de question idiote; il n’y a que des imbéciles qui ne savent pas écouter ». L’évêque a été interrogé sur la baisse des vocations sacerdotales dans les pays européens, sur l’injustice et le fossé grandissant entre pays riches et pauvres, sur les effets de la mondialisation et le manque de collaboration entre les religions pour lutter contre ce fléau.

Brèves confidences

Les détenus ont ensuite approchéé l’évêque, autour d’une tasse de café. Frère Fernando a dit son émotion à la vue de ces musulmans, ces chrétiens et ces bouddhistes, désireux de confier leur histoire et leur peine. « Ce n’est pas au responsable religieux qu’ils ont parlé, mais à un père, dont l’oreille peut tout entendre », estime l’aumônier de Bellechasse. En prenant en compte les données concrètes de leur vie, Mgr Genoud a donné un signe qui va au-delà du contact personnel, estime l’aumônier. « Il a montré que les prisonniers de Bellechasse, qui représentent actuellement 36 nationalités, sont tous fils de Dieu et que le Salut n’est pas réservé aux seuls chrétiens ». Mgr Genoud a promis qu’il reviendrait volontiers « philosopher » avec les prisonniers de Bellechasse, s’il y était invité. Il leur a aussi donné rendez-vous, à leur sortie, au bistrot du Belvédère, à Fribourg, où il se tient à disposition du public un lundi par mois.

Au cours du repas officiel qui a réuni, outre la direction et la Commission Administrative des Etablissements, la dééégation du Conseil de paroisse de Morat de l’aumônerie et de la communauté du Vully, le représentant des gardiens et des 89 collaborateurs des Etablissements de Bellechasse a souligné que le contact du cœur était au centre de la formation pénitentiaire dispensée à Fribourg. « Il n’est pas toujours facile de garder ce regard de justice et de respect », a-t-il avoué; « le personnel a lui aussi besoin de soutien pour faire face à ses tâches d’encadrement avec humanité ». Comme d’ailleurs le directeur qui, bien que symbole de l’autorité qui a décidé de les priver de leur liberté, essaie d’établir une relation personnelle avec les détenus.

Respect des autres religions

De tout temps, le soutien spirituel dans les Etablissements de Bellechasse a tenu compte de l’appartenance religieuse des détenus. Au mois de septembre, 40 %, parmi les 150 détenus de Bellechasse, étaient catholiques, 30 % musulmans, 17 % réformés, 5 % orthodoxes, les 8 % restants se réclamant d’autres philosophies ou étant sans religion. Les catholiqes ont l’occasion de suivre la messe chaque dimanche, les réformés d’assister au culte toutes les deux semaines. A côté de Frère Fernando, occupé à 30 % en tant qu’aumônier de la prison (et 70 % comme assistant pastoral à Morat), un pasteur, un prêtre orthodoxe et un imam suivent leurs coreligionnaires respectifs.

Frère Fernando accueille tous les détenus à leur arrivée et accompagne ensuite ceux qui le désirent. Parlant six langues et possédant des rudiments dans une dizaine d’autres, il entre au hasard dans les cellules dont la porte est ouverte, partage un repas ou répond à des appels précis. A travers des contacts sporadiques ou suivis, l’aumônier essaie de « rendre à eux-mêmes » ces hommes pour qui « communiquer est un moyen d’être libre et d’exister », dans le monde clos et anonyme de la prison. (mjp)

Seule en Suisse voire dans le monde: une église paroissiale dans l’enceinte d’un pénitencier

L’église de Bellechasse est la seule église paroissiale en Suisse, sinon au monde, située à l’intérieur d’un pénitencier. En dessinant le monument, classé dans la catégorie A des biens culturels de l’Etat de Fribourg, l’architecte Edmond Latteltin a concilié les besoins du pénitencier fribourgeois et ceux de la communauté catholique du Vully, composée au départ des familles des gardiens. L’édifice a été construit par les prisonniers. En 1956, l’un d’eux a d’ailleurs réalisé la fresque de 8 sur 11 m, qui orne l’édifice, inauguré en 1933 par Mgr Besson. Avec ses 400 places et son temple, dans l’annexe orientale, ce sanctuaire propriété de l’Etat, remplit la fonction d’église paroissiale pour les catholiques du Vully, qui représentent aujourd’hui un tiers de la population.

A l’heure de rénover le sanctuaire et ses orgues, le directeur des Etablissements de Bellechasse, interrogé par l’APIC, souligne l’attachement de la communauté locale à son église, dédiée à Saint-Vincent-de-Paul, patron des bagnards. Nombre de Vuillérains y ont été baptisés, s’y sont mariés ou y ont reçu les ultimes adieux. A côté de l’église Saint-Nicolas de Flue de Chiètres et l’église Saint-Germain de Morat, elle constitue l’un des trois lieux de culte de la paroisse catholique de Morat qui regroupe 23 localités. La direction de Bellechasse maintient du reste des contacts réguliers avec les autorités paroissiales.

Chaque année, l’église de Bellechasse accueille une célébration œcuménique, en alternance avec le temple de Môtier. La présence des jeunes et des enfants, lors des Premières Communions, des Confirmations ou des messes des familles, joue un rôle important dans la réinsertion de la quinzaine de détenus qui assistent régulièrement à la messe, estime Henri Nuoffer. Cet apprivoisement réciproque favorise aussi l’acceptation de la prison au sein de la population vuilléraine.

Tout en contribuant au maintien du patrimoine cantonal par le biais de l’église, les Etablissements de Bellechasse entretiennent 87 immeubles qui représentent 76 millions de francs de valeur-incendie et occupent un architecte à mi-temps. (mjp)

Saint-Maurice: Groupe Saint-Nicolas et Dorothée de Flüe

Fribourg,

(APIC) Le génome humain est-il à vendre? La finance et l’économie à l’heure de la mondialisation, la société émotionnelle en quête de raison: voilà les thèmes de réflexion qu’abordera le groupe Saint Nicolas et Dorothée de Flüe, lors de leur prochaine rencontre, qui aura lieu du 17 au 19 novembre 2000 à Saint Maurice.

Depuis 1994, le groupe Saint-Nicolas et Dorothée de Flüe réfléchit sur l’engagement du chrétien dans le monde. Le groupe rassemble des personnes exerçant des responsabilités dans la société, notamment dans les domaines économique et politique.

Le groupe Saint-Nicolas et Dorothée de Flüe aura sa rencontre de réflexion et de prière du 17 au 19 novembre à Saint-Maurice. Benoît Dubuis, responsable des relations industrielles à l’EPFL et Dominique Lambert, astrophysicien et philosophe, professeur aux Universités de la paix à Namur (Belgique), animeront une rééflexion sur le génome humain.

« La finance et l’économie à l’heure de la mondialisation » aura comme intervenants Justin Weldy, pasteur de l’Eglise d’Angleterre, licencié en droit et en économie de l’Université de Cambridge et Michel Raynaud, directeur pour l’Europe de l’activité polyéthylène du groupe Solvay (Bruxelles).

La troisième réflexion porte sur « la société émotionnelle en quête de raison » avec la participation de Jean Romain, professeur de philosophie à l’Université de Genève, et de Patrick Progin, professeur de philosophie à Saint-Maurice.

Mgr François-Xavier Nguyên Van Thuân, président du Conseil pontifical Justice et Paix sera également un des intervenants de la session. (apic/com/mjp/vb)

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