APIC- Portrait
« Revenir aux sources des textes »
Par jean-Claude Noyé, de l’APIC
Montpellier, 6 août (APIC) Professeur d’hébreu et d’exégèse biblique auprès du Comité diocésain pour les relations avec le judaïsme de Montpellier, Marie Vidal milite pour l’amitié judéo-chrétienne. Elle combat l’antisémitisme, qu’elle juge encore vivace dans l’Eglise catholique, en incitant les chrétiens à relire les Ecritures pour prendre conscience de la judéité de Jésus.
Marie Vidal est décidée à opposer à l’enseignement du mépris celui de l’estime de la communauté juive. En établissant des liens entre les Evangiles et la Tora. Une démarche que lui reprochent certains scientifiques, sous le prétexte que la Torah a été codifiée bien après les Evangiles.
Médecin puis bibliste
Adolescente, Marie Vidal songe à la vie religieuse. Devenue médecin, elle étudie la catéchèse, le grec, l’hébreu et la Bible à l’Institut catholique de Paris. De retour àà Montpellier, sa vielle natale, elle travaille deux années durant au service diocésain de la catéchèse, puis retourne pour deux ans à Paris. Elle complète son cursus à l’Ecole Biblique de Jérusalem.
Ses nombreux séjours dans la cité sainte renforcent son estime profonde du peuple juif. Elle qui durant sa jeunesse n’a jamais entendu de propos antisémites, force lui est de constater que tel n’est plus le cas depuis qu’elle travaille au sein de l’Eglise. « Même à l’école biblique de Jérusalem, tenue par les dominicains, on nous enseignait la théologie classique qui fait du Nouveau Testament l’accomplissement de l’Ancien.
Connaître le peuple juif et cesser de parler en son nom
Marie Vidal cherche à se faire sa propre opinion en consultant directement les sources des textes. Elle suit des sessions à l’université hébraïque de Jérusalem, noue des amitiés dans le monde juif et rencontre des rabbins. « Etudier l’hébreu et la Bible n’est pas, en soi, la caution d ’un amour du peuple juif. Il faut encore le connaître t cesser de vouloir parler en son nom. »
Après deux ouvrages intitulés « Une lecture de l’Evangile à la lumière de la Torah » et « Le juif Jésus et le Shabbat », elle a récemment publié « Quand jésus monte à Jérusalem ». De livres en conférences et interviews, elle pourfend les idées reçues. « Non, les juifs ne sont pas l’affreux peuple déicide qui a tué le Christ. Non, le judaïsme n’est pas une religion de la loi desséchante face à la religion de l’amour qu’est le christianisme ». Marie Vidal s’oppose à l’affirmation qu’il n’y a pas de salut hors de l’Eglise. « Si le christianisme est la meilleure voie pour les baptisés, pourquoi le serait-il forcément aussi pour les autres? »
Une « Bonne Nouvelle » ambiguë
L’exégète débusque les glissements sémantiques qui manifestent le religio-centrisme des chrétiens: Pour elle, même le terme de « Bonne Nouvelle » est ambigu. « Que dirions-nous si les juifs prétendaient nous apporter la lumière de la Torah? ». Si Marie Vidal pense que le judaïsme féconde le christianisme, elle ne croit pas que les chrétiens doivent forcément apporter quelque chose au peuple juif. Face à la lourde responsabilité de l’Eglise catholique « qui a enseigné le mépris des Juifs et l’antijudaïsme, le professeur d’exégèse estime que les chrétiens se doivent d’abord de reconnaître la religion juive.
Ayant rencontré en profondeur un peuple et sa tradition, la bibliste s’est débarrassée de ses fausses certitudes pour s’ouvrir à la « dimension très incarnée des Evangiles ». Elle se voue à présent à enseigner les chrétiens « en toute honnêteté ». « Nous avons une dette envers les juifs que nous ne sommes pas près de rembourser. » Marie Vidal se demande toujours pourquoi on a cultivé pendant 2000 ans une vision négative des juifs. Son objectif est de tout faire pour empêcher que ce qui s’est passé voici 50 ans, avec la Shoa et l’holocauste du peuple juif, ne se reproduise un jour. (apic/jcn/mjp)
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