Italie: Jean Paul II passe ses vacances d’été dans le Val d’Aoste pour la huitième fois

APIC – Reportage

Les villageois d’Introd attendent le pape

Par Walter Müller, agence APIC

Introd, 16 juin 2000 (APIC) Chaque année, en juillet, le pape Jean Paul II quitte l’agitation du Vatican et sa canicule pour le silence et la fraîcheur d’une vallée alpine italienne. En 1988, il a jeté son dévolu sur la petite localité d’Introd et ses 600 âmes, dans le Val d’Aoste francophone. Nature sauvage, simplicité des villageois, nous avons voulu savoir ce qui attirait le chef de l’Eglise catholique dans le hameau haut perché où il se rendra pour la huitième fois du 10 au 22 juillet.

Contraste des paysages! Sur les hauteurs du Grand Saint-Bernard qui culmine à 2’473 mètres, l’Hospice des chanoines de Saint-Augustin offre gîte et protection au randonneur. La route encore bordée de neige part vers le sud. Les villages égrènent des noms à consonance française. En une demi-heure, nous arrivons à la ville d’Aoste, à 580 mètres d’altitude, engoncée dans la montagne et écrasée de chaleur. Avec ses 30’000 habitants et son agitation fébrile, elle a des airs de petite métropole industrielle, engorgée par le trafic vers les tunnels du Mont-Blanc et du Grand Saint-Bernard.

Le charme de la vieille ville et les superbes édifices romains ont cependant de quoi faire descendre de voiture. Nous passons sous le monumental arc de triomphe de l’empereur Auguste, qui rappelle depuis 2000 ans la victoire des légions romaines sur les peuples celtiques venus d’Helvétie. Et par la Porta Praetoria de la cité, de la même époque, elle aussi parfaitement conservée. Comme les autres vestiges romains et médiévaux.

Affinités lointaines

Peut-être n’est-ce pas tout à fait le hasard si l’actuel chef de la papauté, – la seule institution de la Rome ancienne à avoir survécu jusqu’à nos jours – choisit de passer ses rares jours de congé estivaux dans le Val d’Aoste, la plus petite région autonome d’Italie avec ses 3’262 km2 et ses 118’000 habitants.

Au matin du lundi 10 juillet, Jean Paul II sera accueilli sur l’aérodrome valdotain par Mgr Giuseppe Anfossi, évêque d’Aoste, et par les autorités régionales. On montera en voiture puis, après une dizaine de kilomètres direction ouest, la colonne des véhicules obliquera vers le sud pour s’engouffrer dans la montagne.

880 mètres d’altitude. Le convoi arrivera à Introd pour dépasser l’église paroissiale, le château et l’administration communale avant de poursuivre son ascension, où la végétation se raréfie et se fait plus alpestre. Ce n’est qu’au hameau de Combes que l’on mettra pied à terre, sur la place de parc de la maison de vacances des élèves de Don Bosco, à 1’350 mètres d’altitude. Jean Paul II peut se retirera alors dans la maison construite pour lui ces derniers mois. Son état de santé et son âge ne l’autorisent en effet plus à séjourner dans la maison de vacances, louée à des privés, où il avait jusqu’ici l’habitude de prendre ses quartiers.

Nouvel espoir

Les vacances du pape sont une bénédiction pour Introd, explique Osvaldo Naudin, à la tête des destinées de la petite commune depuis 20 ans. « La présence régulière du pape chez nous a changé notre façon de voir l’existence et nous a redonné du courage ». Les habitants sont fiers que le pape choisisse, année après année, le cadre de leur vie quotidienne pour s’y reposer. La commune ne compte ni hôtels, ni pensions. Seulement quelque maisons de vacances louées aux touristes et le camp de jeunesse des Salésiens. « En hiver, la commune utilise la nouvelle maison du pape comme centre de ski de fond, précise Osvaldo Naudin, âgé de 54 ans. Il n’y a pas de chômage à Introd. Les habitants vivent de l’agriculture, de l’artisanat du bois ou travaillent à Aoste ».

Ce qui attire le pape en ce lieu, poursuit le notable, c’est son calme et le grand réseau de promenades et de randonnées des alentours ». Le territoire de la commune jouxte le parc national du Gran Pran Paradiso. Le maire ne nous cache pas qu’Introd a traversé naguère des temps difficiles. Ces années noires ont laissé des traces dans le hameau des Combes. Comptant encore 130 personnes en 1918, il a été frappé par un exode massif à cause de la misère et du manque de perspective économique. L’école a été fermée en 1968 et, depuis, les paysans ne montent qu’en été pour les foins et le bétail.

Après la misère, un nouvel élan

Une courte ballade pour admirer le style des constructions de la région, avec leurs toits de pierre. Si certaines bâtisses tombent en ruines ou sont à l’abandon depuis des décennies, plus d’une demeure a été restaurée avec amour, dans le respect de l’architecture traditionnelle, pour offrir aujourd’hui tout le confort moderne. Osvaldo Naudin n’est pas peu fier d’annoncer que dès l’an prochain, des familles viendront habiter Combes à l’année.

D’autres signes manifestent discrètement la renaissance du hameau: la chapelle de Saint-Laurent rénovée en 1993 et le « musée Jean Paul II », ouvert en 1996 et retraçant les séjours du pape. « Il n’y a pas de magasins de souvenirs; nous ne sommes pas à Naples », sourit Osvaldo Naudin. Ce qui tempère l’optimisme du président de commune, c’est la fermeture du tunnel du Mont-Blanc qui a entraîné un recul de 30% du tourisme. Les entreprises ne peuvent plus répondre aux appels d’offres de Chamonix et enregistrent une perte sèche qui ne pourra pas être compensée avant la réouverture du tunnel. Les pendulaires qui travaillaient sur la France sont également prétérités.

Contacts amicaux avec les villageois

Pio, vieillard souriant qui détient les clés de la chapelle de Combes, assure dans son dialecte, rappelant fort les patois suisses romands, que les choses ont bien changé depuis que le pape vient à Introd. Toute la population se réjouit de sa venue. Lors de ses promenades ou de ses excursions, Jean Paul II croise les villageois, ce qui donne lieu à des échanges sympathiques. Pio raconte que le pape lui a même serré la main en venant à la chapelle de Combes. Une autre fois, Jean Paul II l’avait rencontré qui faisait les foins avec d’autres paysans. Le pape avait voulu traverser les prés fraîchement fanés pour aller les saluer. Mais sa suite l’en avait aussitôt empêché.

Les villageois nouent également des contacts amicaux avec la délégation vaticane forte de 200 personnes, principalement des agents de sécurité italiens et du Vatican, qui accompagnent le pape dans ses vacances et logent à la colonie des salésiens. « On a appris à se connaître au fil des années et on s’apprécie ». Pio ajoute qu’il arrive que les membres de l’escorte du pape passant devant la chapelle s’arrêtent pour déguster avec lui une grappa fait maison. Parmi eux, le secrétaire personnel de Jean Paul II. Comme gardien de la chapelle où le pape vient régulièrement se recueillir et méditer, Pio se sent un peu comme le sacristain de Jean Paul II, durant deux semaines de juillet.

Les inconnus n’ont pas la possibilité d’approcher le pape. La route menant à Combes, totalement refaite voilà trois ans, est bouclée pendant son séjour, mais le musée demeure accessible.

Sanglier et aigles royaux

La région de Combes est parcourue de sentiers, bordée de prairies, de fleurs rares et d’herbes aromatiques. Une faune sauvage, riche et diverse, prospère dans cet environnement préservé. Il n’est pas rare que des sangliers s’approchent de la résidence papale ou que des aigles royaux la survolent. La vue est imprenable sur le massif du Mont-Rose à l’Est et sur le Mont-Blanc à l’Ouest. C’est dans ce cadre idyllique, sur la place de sport de la colonie salésienne, que Jean Paul II va célébrer l’Angélus le 16 juin entouré des habitants d’Introd. Cette cérémonie est toujours très bien revêtue.

Le 22 juillet, avec le départ du pape, le hameau va reprendre son visage habituel et le quotidien va reprendre ses droits. Chacun se réjouissant déjà que le pape revienne à Introd, pour ses prochaines vacances. (apic/wm/traduction: Marie-José Portmann)

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