Je viens de regarder sur Youtube le clip «formidable» de Stromae!
Bon, je fais l’exégèse de cette première phrase un peu obscure. Stromae (le verlan, c’est-à-dire l’envers de Maestro!) est un chanteur d’origine et de culture musicale mi-belges, mi rwandaises. Ses chansons ont un succès aussi rapide qu’étonnant depuis quelques mois.
La version filmée d’une d’entre elles «Formidable-forminable» a été regardée 50 millions de fois sur internet. Et c’est vrai que cela en vaut la peine. Ce clip est une véritable prouesse à la fois technique et artistique, car la réalité semble se mélanger à la fiction: Stromae joue et chante dans une rue pluvieuse le rôle de quelqu’un qui est ivre et qui vient de se faire larguer… et qui projette sur les autres son propre désespoir…
Si je parle de cet artiste dans mon blog, c’est peut-être parce que j’ai cru au premier abord que nous partagions quelques convictions semblables. De manières différentes mais qui finalement pourraient se rejoindre, lui et moi voulons tracer quelques traits d’union entre l’Afrique et l’Europe. Stromae s’interroge sur le sens de la vie européenne, qui semble s’écraser contre un mur de non-sens. Derrière ce vide se profile l’autre vide, celui dans lequel l’Afrique semble plonger…
En pensant à Lampedusa, j’ai été curieux de comprendre le message d’un des titres, évocateur s’il en est: «Humains à l’eau». Je n’ai pas compris grand chose, si ce n’est peut-être, derrière les textes désarticulés à la manière hip-hop, des allusions au respect des peuples et de la nature africaine, dont notre genre de vie européenne ne fait aucun cas…
Stromae se profile comme une étoile (filante?) de la nouvelle culture jeune. Bon. Alors de deux choses l’une: Soit il ne dit rien de sensé et c’est déjà un message (terrifiant), soit il dit à sa manière que rien n’a de sens (et c’est tout aussi terrifiant).
En tout cas, pour moi, il est intéressant de mesurer le décalage entre cet artiste qui brille dans un univers musical presque vertigineusement vain et les jeunes de ma colline au Congo, qui se réunissent le mardi et le jeudi soirs autour d’un synthétiseur pourri à batterie défaillante pour répéter le Kyrie de la messe dominicale. Lequel de ces deux univers a le plus de sens?
Guy Luisier
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