Mariage précoce et forcé, un avenir gâché

Cameroun : Les mariages précoces, le calvaire des jeunes filles

De notre correspondant à Douala, Martin Luther Mbita

Douala, 27 juin 2001 (APIC) Le phénomène du mariage précoce est très fréquent en Afrique de l’Ouest. Le Cameroun ne fait de loin pas exception. Une étude récente démontre que 43 % des femmes mariées, âgées actuellement entre 25 et 29 ans, ont été forcées d’épouser des hommes qui triplent leur âge, et ceci avant 18 ans. Histoire de trois jeunes Camerounaises, Marietou, Oussena et Habiba, vendues ou données en mariage à l’âge de 12 ou 13 ans.

Aujourd’hui Marietou, Oussena et Habiba ont entre 15 et 16 ans et errent à travers les rues de Douala et Yaoundé afin de récolter un peu d’argent pour vivre. A peine pubères, elles ont été vendues comme des esclaves en mariage avec des amis de leurs parents.

Marietou avait douze ans lorsqu`elle a été proposée en mariage par son père qui a échangé sa fille contre une dette (50’000 francs CFA) qu’il devait à un ami de 42 ans. Marietou devient alors une bonne esclave de maison: vaisselle, cuisine, marché, et un an plus tard, à peine pubère, elle connaîtra déjà l’acte sexuel.

Son époux Ali ne lui fait aucun cadeau : bastonnades, viol, brutalités, tout y passe. Ses parents n’ont plus rien à dire, leur fille est mariée. Le reste leur importe peu. Deux ans après ce calvaire, Marietou s’enfuit, avec l’aide d’une de ses tantes. Mais croyant fuir la galère, elle tombe dans la misère à Yaoundé. Elle doit vendre les beignets de sa tante pour survivre. Si elle ne le fait pas, elle n’a pas droit au repas.

Son époux a tenté en vain de la faire revenir à Ngaoundéré, la région où il habite. Finalement il s’est résigné, car selon la tradition musulmane, la petite Marietou est désormais souillée.

Promise en mariage avant sa naissance

Oussena a été proposée en mariage par son père à un de ses amis avant même sa naissance. Sa mère était enceinte lorsque son papa a fait cette promesse à son ami au cas où l’enfant serait de sexe féminin. A 13 ans, comme promis, la petite Oussena est envoyée en mariage chez Haminou, un homme richissime.

Oussena supporte mal la vie commune avec un homme de 48 ans, soit plus âgé que son père. Après avoir été battue et violée, elle s’enfuit six mois après son mariage pour aller épouser celui que son cœur a choisi. Mais l’idylle ne va pas durer, car Ibrahim, son nouvel époux, trouvera la mort quelques mois après leur mariage.

Persécutée par Haminou son premier époux, elle quitte Garoua pour Yaoundé, la capitale politique du Cameroun. Accueillie par un membre de sa famille, elle vend des cacahuètes dans les rues de la capitale et garde toujours l’espoir de trouver encore l’homme de sa vie à 15 ans.

Habiba issue d’une famille pauvre, elle a été contrainte au mariage à l’âge de 13 ans pour subvenir aux besoins de sa famille. Ousmanou, un homme âgé de 50 ans, lui a fait subir un calvaire qui ira jusqu’à l’excision. Un an après le mariage elle s’enfuit pour se retrouver à Douala, capitale économique du Cameroun. Habiba a tenté plusieurs suicides. Aujourd’hui, elle travaille comme domestique chez un haut cadre de la fonction publique. Elle a perdu le goût à la vie et dit ne plus rien attendre d’un homme.

Aucune sanction contre les mariages précoces

Les mariages précoces et forcés s’observent particulièrement dans les milieux musulmans du fait que l’Islam, en envoyant les filles vierges en mariage, espère dresser des garde-fous pour « protéger » les jeunes filles.

Une enquête montre que ce sont les adolescentes des zones rurales qui sont le plus souvent victimes des mariages précoces. Selon l’UNICEF, la législation camerounaise encourage l’émancipation précoce des jeunes filles. Premièrement, en permettant qu’elles se marient à 16 ans. Et deuxièmement parce que aucune sanction n’est prise à l’encontre des parents qui offrent ou vendent leurs enfants de 13 ans à des personnes bien plus âgées. (apic/mbt/iac)

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