APIC – Interview
Les milieux conservateurs le qualifient de « crypto-catholique »
De notre envoyée spéciale à Lviv, Sophie de Ravinel
Lviv, 28 juin 2001 (APIC) Sa présence à Lviv pour assister à la messe en rite byzantin présidée par Jean Paul II, le 27 juin, a fait sensation auprès des journalistes qui suivaient la visite du pape en Ukraine. Le Père Ioann Sviridov, archiprêtre du Patriarcat orthodoxe russe de Moscou, est responsable du programme orthodoxe de Radio Sofia, à Moscou. Rencontre.
En participant à la messe papale, le Père Ioann (Jean) a volontairement passé outre aux interdits du patriarche de Moscou Alexis II. Ce n’est pas la première fois que ce prêtre, accusé il y a déjà plusieurs années par les milieux orthodoxes conservateurs d’être un « crypto-catholique », affronte l’hostilité de ses confrères au sein du clergé russe. A l’époque, le prêtre moscovite – qui collabore avec l’œuvre d’entraide catholique internationale « Aide à l’Eglise en Détresse », déplorait l’existence au sein de son Eglise de minorités « chauvines et anti-oecuméniques » qui rêvent d’instaurer une « monarchie orthodoxe prérévolutionnaire ». Aujourd’hui, les choses ne semblent pas avoir beaucoup changé en Russie.
Agé d’une quarantaine d’années, le Père Jean est un homme au naturel jovial et chaleureux. Il explique à la correspondante de l’APIC à Lviv pourquoi il a décidé avec son assistant à radio Sofia, le Père Innokenty Pavlov, de se rendre à Lviv, fief des catholiques « uniates » d’Ukraine, pour assister à la messe présidée par le pape, le 27 juin.
Autour de quelques verres de vodka ukrainienne, il plaisante en expliquant les raisons de son choix. A la fin de l’entretien, il déclare qu’il va peut-être « envoyer une invitation personnelle au pape pour qu’il se rende à Moscou ».
APIC: Quelles sont les raisons qui vous ont incité à venir à Lviv ?
P. Ioann: Je suis venu ici pour des raisons personnelles, parce que je ne suis pas d’accord avec cette politique du Patriarcat de Moscou qui s’est battu contre la venue du pape en Ukraine. Je souhaitais aussi parler personnellement avec le pape, ce que j’ai pu faire, avec chance. En effet, j’étais dans l’assemblée et des prêtres catholiques qui sont venus de Moscou m’ont reconnu. Ils sont donc venus me chercher pour me proposer de suivre la liturgie en haut du podium.
A la fin de la messe, j’ai eu l’opportunité d’aller saluer Jean Paul II, il m’a reconnu et m’a appelé par mon prénom, cela m’a beaucoup touché. Je l’ai en effet déjà rencontré plusieurs fois, à Rome, avec Irina Alberti (une femme écrivain catholique russe récemment décédée, ndr). Je ne suis pas représentatif de tous les orthodoxes de Moscou. Mais je pense que certains orthodoxes je m’en suis rendu compte au sein du programme de radio que je dirige ont eu une attitude très positive sur le voyage du pape en Ukraine.
APIC: Qu’avez-vous pensé de cette célébration ?
P. Ioann: Il y avait tant de personnes dans cet hippodrome, plus d’un million à mon avis, pour cette grande et belle cérémonie byzantine. J’ai été très impressionné. Une célébration aussi fervente, dans la région, on ne trouve cela qu’en Pologne!
APIC: Quels fruits ce voyage pourra-t-il avoir pour l’Ukraine ?
P. Ioann: Des fruits positifs, très certainement. C’est un grand succès et une possibilité pour ce pays pauvre et cette jeune démocratie, d’avancer sur le chemin de la paix. D’un point de vue pastoral, c’est aussi un grand succès pour la pacification entre les chrétiens.
APIC: Croyez vous que le pape puisse se rendre un jour à Moscou ?
P. Ioann: Je pense que oui. Deux années devraient être nécessaires auparavant pour normaliser les rapports entre le Patriarcat de Moscou et le Saint-Siège. Je pense surtout que ce sera ce pape, Jean Paul II, qui devra s’y rendre, car c’est le premier pape slave et je connais son rêve de se rendre comme un pèlerin sur les lieux où tant de croyants sont morts sous le régime communiste. (apic/sdr/imedia/be)
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