Le goût amer du chocolat européen

Afrique de l’Ouest: Mobilisation internationale pour lutter contre l’esclavage des enfants

De notre correspondant pour l’Afrique de l’Ouest, Ibrahima Cissé

Dakar/Abidjan, 8 mai 2001 (APIC) Les enfants réduits en esclavage dans les champs de café et de cacao d’Afrique de l’Ouest donnent un goût amer au chocolat européen. Des fabriquants du vieux continent, des intermédiaires de la filière du cacao et des représentants de la Côte-d’Ivoire, du Ghana et de la Grande-Bretagne ont décidé de créer une commission afin d’identifier et d’éliminer cette pratique dans les chaînes de production.

L’industrie du chocolat a toujours nié jusqu’ici la pratique de l’esclavage et du trafic d’enfants chez ses partenaires africains. La création d’une commission d’enquête de lutte contre ce fléau est une reconnaissance de fait de l’existence du problème. Même si les observateurs et les spécialistes pensent que l’organe de surveillance qui vient d’être mis sur pied aura toutes les peines à aboutir à des résultats concrets.

Réalité courante mais cachée

Selon une enquête, dans le million de plantations de Côte-d’Ivoire, premier pays mondial producteur de cacao, l’esclavage des enfants est monnaie courante dans les régions isolées du pays. Un fabricant de chocolat a déclaré lors de la réunion, qu’il était difficile de localiser avec exactitude la provenance des fèves de cacao et que sa compagnie n’avait jamais constaté d’esclavage d’enfants dans les plantations du Ghana, d’où elle importe son cacao.

Les tenants de l’industrie européenne du chocolat ont décidé de siéger avec les représentants des pays producteurs, à la suite de l’affaire de trafic d’enfants esclaves, découverte à la mi-avril dernier au Bénin. Le trafic de mineurs touche plusieurs pays de l’Afrique de l’Ouest. La crise économique a entraîné une dislocation des familles et a encore appauvri les populations africaines, déjà sans grandes ressources.

Le Bénin, plaque tournante du fléau

La pratique de l’esclavage qui blesse la Convention des droits de l’enfant a pris ces dernières années des proportions inquiétantes, particulièrement au Bénin. Ce pays est considéré comme la plaque tournante du fléau. Des parents démunis confient leurs enfants à des beaux parleurs qui promettent de prendre en charge leur éducation et de leur faire gagner de l’argent, contre le paiement d’une mise de départ de 75 frs à 125 frs. Dans les faits, ces adolescents sont cédés à des exploitants agricoles au Gabon, au Cameroun, au Nigeria ou en Côte d’Ivoire. Ils sont également utilisés comme domestiques dans les villes.

Interrogé par l’APIC, Gabriel Achadé, secrétaire général de la Croix-Rouge locale, a expliqué que « les exploiteurs profitaient de l’habitude culturelle africaine de confier l’éducation de son enfant à un parent éloigné ». Les autorités du pays ont demandé « à ceux qui sont concernés par cette pratique, de tout mettre en œuvre pour l’éradiquer. « Mieux, nous leur avons dit de faire en sorte que ces enfants reçoivent l’éducation nécessaire à leur épanouissement », a précisé Achadé. Selon lui, la Croix-Rouge lance des programmes et projets pour les enfants en situation difficile.

Assistance aux enfants de la rue

Dans le même ordre d’idées, la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge organise des projets d’assistance aux enfants de rue et aux enfants déplacés. Son délégué en Afrique de l’Ouest, le britannique Niels Scott, a déclaré à l’APIC qu’était mené depuis 1996 en Côte-d’Ivoire, un programme d’assistance, de réintégration et de formation socio-professionnelle des enfants de la rue. La fédération compte encore accroître son action dans ce domaine

Niels Scott précise que la protection des enfants faisait partie des activités humanitaires de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. Ces organisations sont du côté des victimes, avec des projets d’intégration, de sensibilisation de leurs parents sur les conséquences de l’abandon de leurs enfants. La fédération alerte en outre les instances et sociétés internationales concernées.

Fin avril, une réunion des responsables Ouest-africains de la Croix-Rouge à Dakar, a élaboré un document destiné à combattre la maltraitance des enfants en Afrique occidentale. Cette région du monde compte plusieurs catégories d’enfants exploités: certains travaillent aux champs, d’autres sont contraints de se prostituer, d’autres encore sont utilisées dans le commerce informel. (apic/ibc/mjp)

webmaster@kath.ch

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/afrique-de-l-ouest-mobilisation-internationale-pour-lutter-contre-l-esclavage-des-enfants/