APIC Interview
L’épiscopat déploie le sacerdoce dans une paternité
Rome, jeudi 15 février 2001 (APIC) Mgr Jean Honoré, archevêque émérite de Tours est l’un des rédacteurs du catéchisme de l’Eglise catholique. Au moment d’être distingué par la pourpre cardinalice dans une semaine – il est l’un des évêques qui sera créé cardinal du consistoire du 21 février, il explique à l’agence Zénith que « c’est à l’âge où il faut rendre des comptes que se dévoile la vocation ».
La vocation a donné un sens à l’écoulement de la vie et une unité à la destinée humaine du cardinal Jean Honoré, né à Saint-Brice-en-Coglès, dans l’archidiocèse de Rennes, en 1920. Il a été ordonné prêtre en 1943, est devenu évêque d’Evreux en 1972, puis de Tours en 1981. Il a fait partie de l’équipe de rédaction du Catéchisme de l’Eglise catholique, publié par Jean-Paul II par la Constitution apostolique « Fidei depositum » du 11 octobre 1992 (éd. de poche en français chez Mame-Plon). Il est aussi un spécialiste de Newman
A quatre-vingt ans, Mgr Jean Honoré comprend mieux ce qui a été le fil conducteur de sa vocation, depuis les commencements jusqu’aux mûrissements de l’âge adulte. A l’origine, la vocation n’est qu’un signe, « à peine un appel qui murmure au-dedans, comme le frémissement léger de l’âme », décrit Mgr Honoré. Pour l’enfant qu’il était, encore petit, cela ressemblait à un pressentiment, « comme si Dieu était présent et venait à ma rencontre ». Mgr Honoré se souvient de moments de grande douceur et de paix intérieure. Ces premiers signes ne furent connus que de moi. D’autres me furent donnés que je gardais dans le secret, sans même savoir ce qu’ils voulaient dire et où ils allaient me conduire ».
ZN: Comment avez-vous répondu à l’appel qui « murmurait en vous », alors que vous n’étiez qu’un petit garçon?
Mgr Honoré: J’entrais dans les années de jeunesse assombries par le deuil, puis vint la passion d’apprendre. L’influence paisible d’un prêtre de collège projeta en moi le désir d’une vie donnée comme l’était la sienne. Mais cet appel était un défi. Il m’a fallu, pour me fixer, plusieurs années de débats et de recherche. Et c’est finalement au terme des années secondaires que j’ai pris la décision d’entrer au Séminaire.
ZN: Qu’est-ce qui est central dans le sacerdoce, pour vous? Et qu’est-ce qu’a signifié le nouvel appel de Dieu à être évêque?
Mgr Honoré: Tout sacerdoce se déploie dans une paternitéé. Au sens où la paternité apostolique demande une proximité et une prévenance. L’évêque témoigne d’une paternité spirituelle dans sa dimension la plus forte et la plus large. Il est père dans la foi, pasteur de son Eglise, comptable de tout ce qui doit être fait pour assurer la transmission de l’Evangile et la vitalité des communautés chrétiennes au sein de notre monde.
ZN: Que voudriez-vous qu’un jeune comprenne du rôle de son évêque?
Mgr Honoré: Si l’on comprend cette responsabilité comme celle qui continue la mission des Apôtres, elle ne fait pas la distinction entre les jeunes et les adultes. Tous ont part à cette mission essentielle de l’évêque de dire la foi, de la garder et de la nourrir par les sacrements de l’Eglise. Parce qu’ils sont les enfants gâtés de notre monde frivole et capricieux, les jeunes ont besoin d’abord d’être entendus et compris. L’évêque prend le temps pour de rejoindre et d’écouter ceux qui collaborent avec lui, les prêtres et les chrétiens de tous bords eux.
J’ai toujours souhité faire comprendre aux jeunes que la vie mérite d’être vécue, que l’avenir est devant eux, et que, pour vivre pleinement, l’évangile de Jésus-Christ est un atout, une chance qu’il ne faut pas trop vite mettre à l’écart. Le plus dur, je l’avoue, est de parler de l’Eglise, en dépassant les préjugés et le refus. Les rassemblements de jeunes les aident à franchir un nouveau seuil après la fête collective au grand soleil, les ouvre à la pénombre d’un monde plus intérieur et plus en retrait, celui de la foi personnelle.
ZN: Est-ce un nouveau « oui » qui vous est demandé avec le chapeau de cardinal?
Mgr Honoré: Le fait de devenir cardinal ne change rien d’essentiel dans le sacerdoce du prêtre ou de l’évêque. Cette dignité requiert d’abord d’être disponible auprès de l’évêque de Rome dans le ministère d’unité qui est le sien. Dans l’Eglise de tous les continents. Il ne faut pas oublier que le rouge cardinalice est le symbole du martyre. L’engagement de la foi peut aller, dans le tragique des événements, jusqu’à accepter de souffrir et de mourir au nom du Christ. On ne peut pas transiger sur les convictions religieuses, pour autant qu’elles aient un caractère d’absolu. On ne peut pas non plus les renier. Il y va de l’honneur d’être homme.
ZN: Vous avez travaillé au « Catéchisme de l’Eglise catholique ». Comment conseillez-vous à la jeune génération de l’aborder?
Mgr Honoré: Je le dis clairement. Le Catéchisme de l’Eglise catholique n’a pas été fait particulièrement pour des jeunes. Il répond au besoin de tout chrétien de mieux maîtriser ses connaissances religieuses. Pour l’aborder, il faut avoir déjà franchi une première étape d’initiation à la foi catholique. C’est l’Evangile qu’il faut d’abord connaître, car il fait rencontrer le visage du Christ.
Les formules du Catéchisme de l’Eglise passent au-dessus de la tête des jeunes qui ne sont pas encore ancrés dans la foi. Elles leur font à penser à une algèbre de mots, compliquée à plaisir, très loin de leur pensée et de leur attente. Il faut laisser au sentiment religieux le temps de mûrir. J’ajoute encore que l’on n’ouvre pas le catéchisme pour en tourner les pages. On ne peut pas zapper, ni courir sur un texte comme on flirte avec Internet. Il s’agit d’un tout autre enjeu. Le mieux serait d’étudier un chapitre et de l’étudier à plusieurs, en groupe. De joindre aussi à la réflexion des temps de prière silencieuse. (apic/zn/mjp)
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