La première visite d’un pape depuis la séparation

Rome: Anglicans et catholiques célèbrent les 20 ans de la venue du pape en Angleterre

Rome, 2 juin 2002 (APIC) Les catholiques et les anglicans ont célébré, ces derniers jours, le 20ème anniversaire du voyage de Jean Paul II en Angleterre, du 28 mai au 2 juin 1982. Cet événement considéré par les deux Eglises comme « historique », a constitué un pas important dans le dialogue oecuménique. C’était la première visite d’un souverain pontife après la séparation de l’Eglise d’Angleterre d’avec Rome, au 16ème siècle.

Les prémices d’un dialogue entre catholiques et anglicans sont apparues en septembre 1921, alors que Lord Halifax et l’abbé Portal se sont rendus chez le cardinal Mercier, à Malines en Belgique. C’était la première fois que les deux Eglises tentaient de dialoguer de manière officielle. Pendant sept ans, plusieurs personnes se sont consacrées à l’avancée des négociations qui ont toutefois échoué en 1928, sans qu’aucune suite n’y soit immédiatement donnée.

Il a fallu attendre le Concile Vatican II (1962-1965) pour qu’une impulsion soit donnée par les chefs des deux Eglises de l’époque, le pape Paul VI et l’archevêque de Canterbury Michael Ramsey. Après leur rencontre au Vatican, le dialogue s’est progressivement développé à partir de 1970, grâce à la création d’une Commission internationale (l’ARCIC), réunissant des experts catholiques romains et anglicans afin de discuter des points les plus sensibles entre les deux Eglises : l’eucharistie, le sacerdoce et l’autorité.

Un premier « rapport final » publié en 1981, recueillant les diverses études de cette Commission, fut ratifié par les deux parties une dizaine d’années plus tard. Mais dès 1982, le dialogue anglican-catholique prit une nouvelle tournure, grâce à la venue de Jean Paul II en Angleterre, du 28 mai au 2 juin. A l’occasion de cette visite historique – aucun pape n’était venu dans ce pays depuis que Henri VIII se fit élire chef de l’Eglise d’Angleterre, après le refus de Rome de reconnaître la nullité de son mariage -, il rencontra l’archevêque de Canterbury, Robert Runcie. Même si aucun effet sur les relations entre les deux parties ne fut ressenti dans l’immédiat, les rencontres successives entre les deux chefs spirituels – l’actuel archevêque, George Carey, vint à quatre reprises au Vatican ­ marqua l’avancée du dialogue oecuménique.

Dialogue freiné par les ordinations de femmes

Celui-ci fut toutefois freiné au début des années 90 par les premières ordinations de femmes prêtres au sein de la Communion anglicane. Suite à cette décision de certains synodes locaux ­ les anglicans n’ayant pas de « chef spirituel » -, près de 500 prêtres anglicans et autant de laïcs sont passés dans l’Eglise catholique ou orthodoxe. Un bureau a été créé par le Vatican, afin d’étudier les dossiers de ces prêtres, et de leur permettre, pour la plupart, de recevoir l’ordination sacerdotale au sein de l’Eglise catholique.

Malgré cette difficulté, la Commission mixte lancée par Paul VI continua son travail sur un plan théologique. L’un des plus importants ouvrages rédigé par ce groupe de travail fut « le don de l’autorité », publié en 1999. Dans ce document, les auteurs reconnaissent la difficulté de cette question, tout en affirmant clairement que « anglicans et catholiques romains veulent témoigner devant les Eglises et devant le monde que l’autorité correctement exercée est un don de Dieu qui apporte réconciliation et paix à l’humanité ». Jean Paul II avait lui-même fait part de sa disponibilité à revoir le rôle du pape, dans son encyclique « Ut unum sint », publiée en 1995.

« Malgré ces obstacles, nous cherchons à approfondir nos relations pour aller de l’avant sur le chemin du dialogue », a affirmé à l’APIC le père Donald Bolen, chargé des relations avec les anglicans, au sein du Conseil pontifical pour l’unité des chrétiens. « Il nous faut être créatifs dans ce dialogue, sans utiliser de compromis », a-t-il ajouté, précisant que « le dialogue risque d’être encore long et difficile », notamment à cause des divergences de points de vue sur certaines questions de morale.

Retourner aux racines de la chrétienté

Pour sa part, l’évêque Richard Garrard, directeur du centre anglican de Rome ­ fondé en 1966 avec l’encouragement de Paul VI pour favoriser le dialogue entre l’Eglise anglicane et le Saint-Siège -, estime qu’ »il faut retourner aux racines de la chrétienté ». « C’est l’unique moyen pour trouver les bases solides à nos discussions avec Rome ». Il s’est par ailleurs dit satisfait, à cette occasion, de la création d’une Commission mixte, en janvier 2001, ayant pour objectif d’aider la mise en pratique des résultats de l’ARCIC.

Pour cet évêque anglican, marié et père de deux enfants, l’exemple du cardinal John Henry Newman (1801-1890), écrivain et prêtre anglican converti au catholicisme au 19ème siècle, « peut servir de pont aux chrétiens d’aujourd’hui ». Précisant que cet Anglais, qui devint cardinal en 1879, « resta proche de l’esprit anglican après avoir intégré l’Eglise catholique », Richard Garrard a souligné l’importance de sa théologie dans le rapprochement entre les deux Eglises. John H. Newman fut déclaré ’vénérable’ ­ première étape avant la béatification ­ par Jean Paul II en 1991. Ce dernier l’avait par ailleurs qualifié de « champion de la spiritualité anglaise », alors qu’il avait choisi les textes de cet ancien anglican pour les méditations de son chemin de croix en 2001. (imed)

Encadré :

Séparation à cause d’un refus de nullité de mariage

La séparation de l’Eglise d’Angleterre d’avec Rome remonte au 16ème siècle, lorsque le pape Clément VII, refusa de prononcer la nullité de mariage du roi Henri VIII. Ce dernier se fit alors proclamer chef de cette Eglise par l’assemblée de son clergé, en 1531.

Alors que l’Europe était bouleversée par la Réforme, l’anglicanisme se propagea dans les pays sous influence britannique. Aujourd’hui, les diverses Eglises anglicanes, principalement présentes en Angleterre, aux Etats-Unis, au Canada, en Australie et en Afrique, sont autonomes, mais elles réunies officiellement sous le nom de Communion anglicane. Leur chef spirituel « symbolique » est l’archevêque de Canterbury. Chaque Eglise locale est en droit de décider de ses règles comme, par exemple, l’ordination des femmes.

Ayant notamment conservé l’ordination des prêtres et des évêques, l’Eglise anglicane a gardé la même organisation que celle de l’Eglise catholique. Mais en 1896, par l’encyclique « Apostolic Curae », Léon XIII déclara non valides les ordinations anglicanes, pour « absence d’authentique succession apostolique ». Cette question fut et demeure, avec celle de la primauté du pape, la principale source des difficultés entre catholiques et anglicans. (imed)

Encadré:

Exposition sur « L’anglicanisme et la tradition chrétienne occidentale »,

A l’occasion du 20ème anniversaire du voyage de Jean-Paul II en Angleterre, l’Eglise anglicane d’Angleterre organise, en lien avec le Saint-Siège, une exposition sur « L’anglicanisme et la tradition chrétienne occidentale », au sein des musées du Vatican, du 3 juin au 4 juillet. Elle est à la fois sous le patronage du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens et du Centre anglican de Rome.

(apic/imed/bb)

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