catholique Bernard Comte attend de l’Eglise une parole claire

France: Face à l’émoi suscité par l’affaire Touvier, l’historien (010689)

Paris, 1erjuin(APIC/CIP) « Les responsables catholiques ne peuvent se contenter de dire que Touvier ou Mgr Duquaire ne sont pas « l’Eglise », qu’il y

a eu des chrétiens résistants et des évêques protecteurs des juifs, que le

droit d’asile est traditionnel, etc. On attend des prises de positions

claires, en reconnaissant les erreurs, les ambiguïtés ou les perversions,

et en cherchant à corriger ce qu’il en reste ». Cette réaction, publiée par

le journal catholique « La Croix », émane de l’historien catholique lyonnais

Bernard Conte, face à l’émoi que suscite l’arrestation dans un couvent traditionaliste de Nice de Paul Touvier et, plus encore, face au silence de

l’Eglise de France.

Universitaire bien connu à Lyon, spécialiste de l’histoire des chrétiens

dans la Résistance, Bernard Comte a désiré s’exprimer au nom des nombreux

catholiques français qui redoutent que l’affaire Touvier ne soit l’occasion

d’instruire un procès contre l’Eglise de France. Ce qui ne manquera pas de

se produire, estime-t-il, si la hiérarchie ne s’engage pas, dans une déclaration officielle, à apporter toute sa contribution à ce délicat dossier.

Selon Bernard Comte, le bref communiqué publié il y a une semaine par le

cardinal Decourtray, archevêque de Lyon et président de la Conférence épiscopale, ne suffit pas. Il le fait savoir dans un texte « mûrement réfléchi »,

où il s’interroge sur les raisons de la protection dont Touvier a pu

bénéficier. Elles sont apparamment de deux ordres, selon lui: historiques

d’abord, psychologiques ensuite.

« Faute d’intelligence politique »

Raisons historiques: la mentalité qui règnait dans les milieux ecclésiastiques et parmi les croyants (mentalité qui subsiste aujourd’hui encore

dans les franges les plus conservatrices). Si l’Eglise s’est accommodée assez facilement du régime de Vichy, écrit l’historien catholique, c’est parce qu’il était « d’ordre moral, tandis que la république à ses débuts avait

été perçue par l’Eglise comme éminemment spoliatrice, confisquant ses

biens, persécutants les congrégations, encourageant un anticléricalisme

primaire ». Quant au nazisme qui se profilait derrière Vichy, on fit mine de

l’ignorer. C’est faute d’intelligence politique, estime l’historien, que

des hommes d’Eglises – dont le cardinal Gerlier, ancien combattant de Verdun, à l’époque archevêque de Lyon – furent séduits par la main tendue de

Pétain à l’Eglise et que, n’écoutant que leur bon coeur, allèrent jusqu’à

des compromissions aujourd’hui incompréhensibles.

Des raisons psychologiques, aussi, relève Bernard Comte: « C’est dans un

mouvement de charité qu’après la libération certains se sont laissés manipuler par un Touvier excellent comédien ». Si ce dernier n’a pas été livré à

la justice en 1947, à une époque où les exécutions sommaires avaient cessé,

c’est aussi en raison d’un vieux réflexe de l’Eglise, estimant n’avoir pas

de comptes à rendre à l’Etat. L’historien évoque ici la figure de de Mgr

Duquaire, collaborateur du cardinal Gerlier, puis du cardinal Villot son

successeur, « qui se laissa séduire par le jeu subtil du séducteur Touvier.

Un personnage falot, sans doute pas une lumière, qui fit cependant des

pieds et des mains pour rameuter d’anciens résistants afin d’obtenir la

grâce de Touvier ». (apic/cip/pr)

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