La Communauté St Jean, communauté nouvelle, née à Fribourg (Suisse) en 1975

APIC-Interview

autour du Père Marie-Dominique Philippe, OP, a connu en 14 ans un rapide

essor, puisqu’elle compte actuellement 250 membres avec les novices. Objet

parfois de controverses, soupçonnée au départ par certains d’être un séminaire parralèle, elle précise peu à peu son visage. Au terme de toute une

évolution canonique, la communauté St Jean a été reconnue définitivement en

juillet 1986 comme « institut religieux clérical de droit diocèsain », sous

la responsabilité de l’évêque d’Autun, actuellement Mgr Raymond Séguy.

St-Jodard: interview du Père Marie-Dominique Philippe, (130789)

fondateur et modérateur de la Communauté St-Jean

Une alternative par rapport à l’intégrisme ?

St-Jodard (France), 13juillet(APIC/Katherine Winiarek) Le Père Marie-Dominique Philippe, 76 ans, fondateur et modérateur de la Communauté St Jean

et qui a été été pendant plus de 30 ans professeur de théologie et de philosophie à l’Université de Fribourg, a présenté à l’agence APIC la Communauté, comment se déroule son expansion et comment il voit son avenir.

APIC : Père Philippe, la Communauté St-Jean est née d’une demande des

étudiants qui suivaient vos cours de philosophie à Fribourg, est-ce que

malgré tout vous acceptez le titre de fondateur ?

Père Marie-Dominique Philippe : Pour moi cela ne signifie par grand chose,

parce que je me suis beaucoup plus considéré comme à leur service, pour essayer de comprendre ce qu’eux-mêmes désiraient, plutôt que d’avoir un plan.

En moi-même, je n’avais pas d’intuition particulière, mais je voyais bien

les grands manques dans l’Eglise! Ces manques je les sentais très fort au

plan doctrinal, mais d’une façon contemplative. Je n’aurais pas, pour moimême, fait quelque chose, mais quand il y a eu un appel de la base, je me

suis dit : « C’est un appel de l’Eglise ». J’ai vu la misère de ces jeunes

qui n’avaient pas d’enseignement qui leur convenait et auquel ils

aspiraient. Ils aspiraient à un enseignement philosophique fort, qui ne

soit pas en dualité avec leur vie chrétienne, avec leur désir de prière et

de contemplation, et ils aspiraient à un enseignement qui puisse se transmettre.

APIC : Qui entre à la commuanuté St Jean ?

Père Philippe : A Fribourg, le recrutement se faisait surtout chez les

étudiants, il fallait suivre mes cours, ici à St-Jodard (Loire), beaucoup

entrent pour la vie religieuse avec le souci second d’être prêtre. C’est

beaucoup moins centré sur ma personne, et beaucoup plus sur la

communauté…

APIC : On vous a souvent reproché de recruter dans les milieux « argentés »!

Père Philippe : A Fribourg, c’était vrai, parce que pour venir à Fribourg,

ce n’était pas si facile que cela! De fait c’est comme cela que les

premiers sont venus. Mais Mgr Séguy quand il est venu nous rendre visite a

voulu se rendre compte d’où venait le recrutement. Il a vu 45 novices et

leur a demandé de quels milieux ils venaient, et bien il a pu constater que

les différents milieux étaient tous représentés en proportions à peu près

égales. Il s’est alors retourné vers moi et m’a dit : « Cela est bien! »

APIC : Vous êtes déjà présents sur 4 continents dans 16 fondations, comment

procédez-vous habituellement pour vos implantations ?

Père Philippe : On a toujours refusé l’appel des laïcs pour une implantation parce qu’on peut avoir des laïcs qui sont mécontents de leur évêque ou

de leurs prêtres, alors on ferait une scission, on veut au contraire essayer de maintenir l’unité. On est là lorsque les évêques nous demandent. On

discute avec eux ce qui nous semble être le plus dans le sens de notre formation : l’enseignement auprès des jeunes (lycées) et auprès des familles

sous forme de retraites. On demande simplement que l’on puisse avoir une

vie religieuse contemplative, de recherche de la vérité.

APIC : Vous pourriez être un vivier où puiser en cas de manque de prêtres ?

Père Philippe : On n’est pas très chaud pour cela, mais voyez à Cotignac

dans le Var ou à Genève, on a accepté des paroisses. Cela n’est pas

directement notre vocation. Moi je mise plus du côté de la doctrine, de

l’enseignement.

APIC : Certains craignent parfois dans d’Eglise que vous représentiez un

retour en arrière par rapport au Concile.

Père Philippe : Pour moi, traditionalistes ou progressistes ont des

catégories qui n’affectent pas la théologie. La théologie chrétienne, c’est

une recherche de la vérité pour mettre toute notre intelligence au service

de la foi et de la parole de Dieu. Le Concile Vatican II demande

l’ouverture au hommes : est-ce pour les suivre ? ou est-ce pour les aider,

pour leur donner un témoignage de vérité et les enseigner en les écoutant,

dans un dialogue ? Si c’est pour les suivre, alors je n’ai pas besoin de

faire de philosophie et de théologie. Si c’est pour les aider il faut au

contraire une philosophie qui regarde l’homme. Et ce qui me semble

terrible, c’est que depuis le Concile on fait moins de philosophie! Ici

j’essaie d’en faire plus…

APIC : N’avez-vous pas joué un rôle d’alternative par rapport à

l’intégrisme, à une époque ?

Père Philippe : C’est vrai que certains jeunes que je voyais s’orienter

vers Ecône, je les ai rattrapé par la peau du dos… Je leur ai dit :

« Qu’est-ce qu vous allez faire là-bas! Chez nous vous resterez fidèles à

l’Eglise, et vous allez vous élargir l’esprit et non vous enfermer ». C’est

vrai que d’une certaine manière on peut servir de plaque tournante parce

que nous aimons le pape, St Thomas, les saints, et que l’on se met à leur

école!

APIC : Comment entrevoyez-vous l’avenir de la communauté ?

Père Philippe : Je n’en sais rien… Nous avons des demandes en quantité

pour fonder des prieurés (7-8 personnes). Le peuple de Dieu a besoin de ces

petites communautés de prière, il a besoin qu’on lui prêche la doctrine.

Nous n’avons pas les même méthodes que les autres, mais c’est pas en

opposition, c’est différent! Dans l’Eglise, il y a toujours eu la vie

religieuse et la vie diocésaine et c’est nécessaire qu’il y ait les deux.

Si j’avais 100 prêtres libres, du jour au lendemain je pourrais les

envoyer. Et des demandes qui datent de 2 ou 3 ans! Mais on voit

actuellement qu’il faut fortifier ce que nous avons fondé, ne pas partir à

la légère… Au début on m’a critiqué au sein de la commuanuté, d’une

critique très douce, en disant que j’allais trop vite! Mais je voulais

qu’il y ait tout de suite des points qui montrent que nous existons.

(apic/kw/bd)

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