Le cheikh Mohammed Tantawi se dit prêt à rencontrer le pape

Le Caire: L’imam de l’université sunnite égyptienne d’Al Azhar prône un islam modéré

Le Caire/Rome, 1er avril 2004 (Apic) L’imam de l’université sunnite égyptienne d’Al Azhar prône un islam modéré. Il s’es est expliqué dans une interview accordée au quotidien l’ »Avvenire ». Autorité du monde sunnite, il redit son approbation pour la loi française sur le voile islamique, s’exprime sur les actions des kamikazes, tout en distinguant ceux qui le sont au nom de l’islam – qu’il condamne – et ceux qui le deviennent dans leur lutte contre l’Etat d’Israël, « parce qu’ils se défendent ».

« L’islam n’est pas une religion fondée sur la mort. Comment peut-on penser qu’Allah nous ait créés pour désirer le renoncement à la vie? » a dit le cheikh Mohammed Tantawi, imam de l’université sunnite égyptienne d’Al Azhar, dans un entretien accordé le 30 mars au quotidien de la Conférence épiscopale italienne.

Ce chef musulman modéré s’est, à cette occasion, également exprimé sur des sujets portant sur la loi française sur le voile, les kamikazes islamistes et palestiniens, et le rôle des médias sur la perception du monde islamique.

L’institution Al Azhar, reconnue et fréquentée par le monde islamique, est un lieu de formation pour les imams sunnites du monde entier – les sunnites représentant 90% des musulmans dans le monde, dont le nombre total est d’un milliard deux cent millions, selon l’Avvenire – et un centre renommé des sciences religieuses islamiques.

« L’islam interdit le suicide et considère la vie humaine comme un bien précieux », a expliqué le cheikh Mohammed Tantawi, répondant à une question sur la prévalence de la « culture de la mort » dans l’islam contemporain. « Les musulmans ont des sentiments similaires à ceux des fidèles des autres religions qui aspirent à une vie pleine et heureuse », a- t-il ajouté.

Nuances

Concernant les terroristes kamikazes, l’Egyptien nommé par le président de son pays à la tête de l’institution arabe datant de 972, a répondu que « l’islam empêchait de faire du mal aux personnes innocentes » et que « celui qui les prenait en ligne de mire n’appartenait à aucune religion ». « Le Coran ne pousse pas à haïr ou à anéantir les autres êtres humains, même de religion différente », a-t-il expliqué.

Pour cette personnalité religieuse modérée faisant autorité dans le monde musulman modéré, « la plupart des musulmans respectent ce principe » et de nombreux responsables islamiques « condamnent les attentats suicides ». Pour lui, ce sont « les médias qui donnent plus d’importance aux propos des groupes armés qu’aux voix des religieux modérés ».

« Les musulmans qui font usage de la violence réagissent souvent aux agressions qu’ils subissent », a-t-il néanmoins poursuivi, précisant également qu’il fallait différencier les kamikazes islamistes des kamikazes palestiniens. Pour lui, les premiers qui ont « des objectifs atroces » et que « l’islam ne reconnaît pas », « instrumentalisent » leur religion, alors que les seconds « luttent pour la défense de leurs droits niés ».

Exaspération provoquée

« L’occupation et les violations quotidiennes subies par le peuple palestinien les poussent à des actions extrêmes, fruit d’une exaspération provoquée par les agressions et la violence d’Israël. L’occident oublie le drame des Palestiniens qui revendiquent leur liberté », a-t-il poursuivi.

Concernant les rapports entre Occident et islam, le porte-parole de l’université du Caire, a soutenu que le dialogue entre les deux « a toujours été ouvert et demeure ouvert ». « Il est important de mettre en évidence les nombreux points qui nous unissent et pas seulement ceux qui nous divisent. Il ne faut pas se laisser conditionner, et ce des deux côtés, par les extrémistes. Je suis convaincu que les personnes de bon sens, occidentaux et musulmans savent se parler et se comprendre ».

Ainsi, Mohammed Tantawi, qui se dit prêt à rencontrer à nouveau Jean Paul II, qu’il « estime », car ce dernier « croit en la paix et en le dialogue », a récemment approuvé la loi française qui prohibe le port du voile islamique dans les lieux publics. « Si le voile est une obligation divine et les musulmanes doivent le porter quand elles vivent en terre islamique, le Coran consent aux croyants qui résident dans des terres non islamiques de s’adapter aux lois et prescriptions locales », a-t-il rappelé dans le quotidien de la Conférence épiscopale italienne.

Positions contestées

Si les positions de l’imam d’Al-Azhar, considéré comme la plus grande autorité sunnite, sont écoutées dans le monde musulman modéré, elles ne sont pas approuvées à l’unanimité, loin de là. D’autres leaders musulmans, tels Yusuf-al-Qaradawi, mufti résidant au Qatar, ou Ali Jumaa, grand mufti égyptien, ont récemment critiqué ses positions sur les kamikazes musulmans ou sur la loi française sur le voile. « Tantawi ne représente que lui-même car il n’a pas consulté les autres uléma », a ainsi lancé Abdel-Sabur Marzuq, secrétaire général du Conseil supérieur des centres d’études islamiques du Caire.

A noter que le Vatican entretient des liens avec cette université depuis l’accord du 28 mai 1998 engageant les deux parties à « promouvoir la compréhension et le respect mutuel entre catholiques et musulmans grâce à un échange d’informations ». Le Comité mixte de dialogue entre le Saint- Siège et les musulmans de l’université d’Al Azhar du Caire se rencontre chaque année le 24 février à Rome ou au Caire pour des conversations bilatérales. Le dernier comité s’est réuni le 25 février 2004. (apic/imedia/pr)

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