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Le mois de juin est celui des visites du pape en Suisse
Bernard Bovigny, de l’Apic
Fribourg, 2 juin 2004 (Apic) La venue de Jean Paul II à Berne, les 5 et 6 juin prochain, intervient 20 ans presque jour pour jour après sa dernière visite en Suisse. Un pape en grande forme avait sillonné le pays, dans un marathon ininterrompu en 9 villes-étapes. Paul VI en 1969, Jean Paul II, dans son projet avorté de 1981, en 1984 et en 2004, ont tous choisi le mois de juin pour se rendre en Suisse.
« La visite de Jean Paul II est celle d’un pasteur qui tient à connaître et à rencontrer des croyants et des hommes de bonne volonté », avaient appelés les évêques suisses, au terme de leur assemblée du 4 au 6 juin 1984 à Pfäffikon (Schwyz), quelques jours avant la venue du pape en Suisse. Cette visite, du 12 au 16 juin, avait suscité plusieurs réactions, dont certaines « regrettables » à en croire la Conférence des évêques suisses, « sans parler de l’exploitation de l’évènement à des fins commerciales ».
C’est que l’événement était de taille. La dernière visite pastorale d’un pape remontait alors à 550 ans. Paul VI s’était bien rendu à Genève, le 10 juin 1969, mais uniquement au siège du COE. La venue de Jean Paul II était déjà prévue en 1981, du 31 mai au 5 juin, mais avait été reportée en raison de l’attentat dont il a été victime le 13 mai de cette même année.
Le voyage-marathon à travers la Suisse
C’est un pape en forme olympique, malgré les suites de l’attentat qui l’a touché trois ans plus tôt, qui était accueilli le 12 juin 1985 à 9h sur la tarmac de l’aéroport de Kloten/Zurich par le président de la Conférence épiscopale suisse, Mgr Henri Schwery, devenu plus tard cardinal, et par le président de la Confédération Léon Schlumpf.
Vers 10h45, Jean Paul II se trouvait déjà à Lugano, au stade du Cornaredo, pour la 2e étape de ce voyage-marathon. Le passage en terre tessinoise est essentiellement marqué par la célébration de l’eucharistie. Au terme du repas de midi, et d’un rapide repos à l’évêché, le pape s’envole pour Genève, la cité de Calvin. Il arrive déjà vers 17h au siège du Conseil oecuménique des Eglises, où l’accueille le secrétaire général du COE, le pasteur Philip Potter. Ce dernier a notamment souligné la contribution de l’Eglise catholique à la promotion de « l’unité visible en une seule foi et en une seule communauté eucharistique dans le culte et la vie commune en Christ ». Il a également rappelé le « Drame des divisions à l’intérieur des Eglises et entre elles » et a appelé à intensifier les efforts « non seulement pour rechercher la justice et la paix, mais aussi pour surmonter les tensions et les divisions qui apparaissent lorsque les chrétiens s’opposent sur les moyens d’instaurer à la fois la paix et la justice ».
Engagement irréversible de l’Eglise catholique dans l’oecuménisme
Une prière et une célébration commune ont rassemblé autour du pape les personnalités et le personnel du COE. Au cours d’une allocution, le pape avait confirmé que « l’engagement de l’Eglise catholique dans le mouvement oecuménique était irréversible et que la recherche de l’unité était une de ses priorités pastorales ». Jean Paul II s’est ensuite rendu au Centre orthodoxe de Chambésy pour un échange de paroles avec le métropolite Damaskinos.
La journée de Jean Paul II ne s’était pas terminée dans la cité du bout du Lac Léman. Tard dans la soirée, après un bref arrêt du train à Lausanne, le pape arrive à Fribourg la catholique. Cette étape, le lendemain 13 juin, sera marquée par une multitude de rencontres. Jean Paul II chantera les laudes avec les religieuses et religieux de Suisse romande à l’église des Cordeliers et leur prononcera une homélie. Plus tard dans la matinée, il rencontrera 2’000 à 3’000 étudiants de l’Université. Avant de devenir pape, il s’y était déjà rendu en 1975 en tant que conférencier à un symposium. Jean Paul II entend le discours d’accueil du recteur Augustin Macheret, puis celui de plusieurs professeurs, avant de prononcer une allocution sur le rôle du théologien, qui « éclaire les questions, nouvelles ou anciennes, en ouvrant le regard à la lumière de Dieu ». La matinée se termine avec un mot d’encouragement aux malades de l’hôpital cantonal, situé près du séminaire diocésain où a logé le pape.
La grande forme malgré le programme chargé
L’après-midi du 13 juin sera consacrée à la messe dans le Parc de la Poya, en compagnie de près de 30’000 participants, puis la rencontre avec la Fédération suisse des Communautés israélites à l’évêché. Malgré un important retard accumulé durant la journée, c’est un Jean Paul ponctuel et en grande forme qui retrouve les jeunes de Suisse romande le soir à la patinoire St-Léonard, pour entendre leurs messages, prier en leur compagnie et leur adresser des mots d’encouragement. Quelques jours plus tard, Mgr Pierre Mamie, évêque de Lausanne, Genève et Fribourg, se rappellera que le pape était « capable de récupérer de ses fatigues en s’isolant quelques minutes », comme il l’a fait après le rapide souper à l’évêché. Lui-même et son auxiliaire, Mgr Gabriel Bullet, avaient de la peine à suivre le rythme imposé par le programme de cette journée interminable.
Le lendemain, 14 juin, la première partie de la matinée a été marquée du sceau de l’oecuménisme, au niveau national cette fois. C’est à Kehrsatz, près de Berne, que Jean Paul II rencontre les représentants des autres Eglises chrétiennes de Suisse dans un Centre oecuménique. A 11h, le pape se retrouve à Berne devant le Conseil fédéral in corpore, où il prononce un discours soulevant des problèmes éthiques actuels. Il invite la Suisse à s’ouvrir toujours davantage: « Il devient nécessaire de ne plus considérer seulement la neutralité comme le moyen de se protéger des turbulences de la grande politique ».
Après la pause de midi à la nonciature, le pape se rend en hélicoptère au Flüeli pour célébrer la messe dans le village natal de Saint Nicolas de Flüe, patron de la Suisse.
Près de 10’000 fidèles amassés à Einsiedeln
C’est à Einsiedeln, le plus important lieu de pèlerinage de Suisse, que Jean Paul II passera la journée du 15 juin, d’abord en compagnie de la conférence des évêques suisses, pour un échange de deux heures, et des représentants du clergé.
L’après-midi de ce même jour sera consacré à la rencontre des conseils pastoraux, des mouvements d’apostolat des laïcs et des oeuvres d’entraide missionnaire. L’église de l’abbaye bénédictine d’Einsiedeln était comble, et une grande foule était massée sur le parvis, pour la célébration de l’eucharistie à 15h30. Près de 10’000 fidèles y ont pris part, ainsi que plus de 20 évêques, de Suisse, France, Allemagne et Autriche. La célébration a également vu la participation du pasteur Philip Potter, secrétaire général du COE, et du prélat orthodoxe Emilianos.
La journée n’était pas pour autant terminée. Jean Paul II s’est encore entretenu avec quelque 80 représentants des médias audio-visuels et écrits, avant de se rendre à l’hôpital régional d’Einsiedeln, où il visitera les patients dans leur chambre.
Avant-dernière étape du périple: Tribschen, près de Lucerne, rejoint le samedi 16 juin en hélicoptère. Le pape a rendez-vous avec les étrangers de Suisse. Ils sont près de 10’000, catholiques ou autres, dont beaucoup en costume national, à acclamer Jean Paul II dans le parc de la villa de Richard Wagner. L’après-midi, une foule de 40’000 fidèles est assemblée à l’Allmend de Lucerne pour la messe destinée aux Suisses allemands, auxquels se sont joints de nombreux germanophones des pays voisins.
Ordination de neuf prêtres à Sion
La dernière journée passée par Jean Paul II sur sol helvétique, le 17 juin 1984, s’est déroulée à Sion en Valais. Elle a été concoctée par l’évêque du lieu, Mgr Henri Schwery. Le matin, la messe célébrée sur l’aérodrome, avec plus de 45’000 participants, a été ponctuée par l’ordination de neuf nouveaux prêtres. Durant l’après-midi, le pape visite la cathédrale de Sion, dédiée à la Vierge. Il reçoit les skieurs valaisans, le champion Pirmin Zurbriggen en tête, qui fêtent ce jour-là le 50e anniversaire de l’Association valaisanne des clubs de ski, et bénit leur drapeau.
Une cérémonie d’adieu ponctuera la venue en Suisse de Jean Paul II dimanche 17 juin à 17h. Le pape a souligné lui-même « le rythme intense de rencontres variées » de cette visite.
De retour à Rome, le pape a désigné son périple comme « un grand voyage dans un petit pays avec des problèmes typiquement helvétiques ». Lors du vol de retour, il a exprimé devant des journalistes sa « satisfaction quant au succès de la visite pastorale à Genève et des rencontres avec les Eglises non-chrétiennes de Suisse ». Quelques jours plus tard, autant le COE que le métropolite Damaskinos, du Centre orthodoxe de Chambésy, ont souligné la contribution positive du voyage du pape au dialogue oecuménique. Durant les six jours de sa visite, Jean Paul II a parcouru neuf villes et prononcé 34 discours.
Note: la plupart des discours et interventions prononcées lors de la visite du pape en 1984 sont regroupés dans l’ouvrage « Jean Paul II en Suisse » aux Editions St-Paul et St-Augustin, d’où sont tirés la plupart des informations contenues dans ce dossier.
(apic/bb)
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