Lourdes: Témoignage de deux médecins de l’équipe médicale du pèlerinage interdiocésain

« Personne ne se plaint ici »

Par Valérie Bory

Lourdes, 12 mai 2005 (Apic) Le pèlerinage interdiocésain de Suisse romande, du 9 au 13 mai, compte 300 malades qui ne pourraient venir à Lourdes sans les 300 infirmiers/ères, les 300 brancardiers et les 6 médecins qui ont laissé leurs patients pour se mettre bénévolement à disposition du pèlerinage romand, auquel il faut ajouter les pèlerins alémaniques du Haut Valais et du canton de Fribourg.

Francis Rime est un habitué de Lourdes. Il est le médecin chef du pèlerinage et y revient à chaque fois, enthousiasmé par l’immense élan de solidarité et d’espérance qui y règne. « Personne ne se plaint ici », résume- t-il.

Les six médecins, qui exercent dans les différents cantons diocésains du pèlerinage, accompagnent le pèlerinage des malades à Lourdes. Ils travaillent sous la houlette de Francis Rime, médecin-chef à l’Hôpital de Riaz, près de Bulle.

Les malades du pèlerinage sont logés dans l’immense bâtiment à la belle architecture moderne, « L’Accueil Notre Dame », un établissement d’une capacité de 904 lits médicalisés, 72 salariés, une communauté de soeurs de la Charité de Nevers et pour chaque pèlerinage étranger ou français, les bénévoles hospitaliers, infirmiers, brancardiers et les médecins accompagnants et qui utilisent la structure médico-sociale à disposition.

Pour ce pèlerinage interdiocésain, comme d’habitude, les malades ont leurs médicaments, le pharmacien du pèlerinage est sur place, et s’il y a une urgence, le malade est convoyé sur l’Hôpital de Lourdes. « Parmi nos malades, nous avons surtout des maladies chroniques », explique Francis Rime, dues à des accidents neurologiques, sclérose en plaques, séquelle d’accidents cardio vasculaires, ainsi que des cancers, et beaucoup de diabétiques ».

Peu de refus

Les malades sont hébergés en unités de 50 lits pour le Haut Valais, Bas Valais, le Jura et Lausanne-Genève-Fribourg. 280 malades sont hébergés dans l’établissement et une vingtaine, moins lourdement touchés, logent en hôtel. Les six médecins du pèlerinage font 3 visites par jour, dès 7h, dès 11 h, dès 17 h. Un médecin assurant la garde de nuit à tour de rôle.

Avant de se rendre à Lourdes, le malade a d’abord l’aval de son médecin traitant qui envoie un certificat médical au médecin-chef du pèlerinage, Francis Rime, 2 mois avant. « C’est exceptionnel que l’on refuse quelqu’un », précise ce dernier. Il s’agit de cas de handicaps physiques et psychiques très lourds. « Les émotions sont très fortement ressenties par les malades », lors des célébrations et activités du pèlerinage, et particulièrement lors de l’onction des malades, qui a eu lieu pour les pèlerins romands, mercredi 11 mai à l’Eglise Ste-Bernadette, lors d’une belle liturgie, au cours de laquelle les prêtres viennent auprès des malades en les appelant par leur prénom. Suit l’imposition des mains et une prière pour redonner force, dite à chacun (. « Que le Seigneur, vous ayant libéré de tous péchés, vous sauve et vous relève »). Trois malades fortement handicapés ont lu depuis le choeur trois « intentions de prières », actions de grâce à Marie et reconnaissance pour ceux qui les aident et s’occupent de leurs soins pendant le pèlerinage, les hospitaliers bénévoles. Moment prenant.

Pourquoi Francis Rime revient-il à Lourdes à chaque pèlerinage interdiocésain ? La réponse est simple et vertigineuse : « Pour moi, le plaisir spirituel domine tous les autres ».

Un médecin protestant à Lourdes

Le docteur Philippe Mercier, médecin généraliste à Bulle, vient depuis 2 ans et demi aux deux pèlerinages annuels interdiocésains. « Je ne suis pas là en tant que protestant ou catholique, mais en tant qu’homme venant vivre quelque chose, et venant recevoir et donner ». Ce généraliste participe au pèlerinage de Lourdes parce qu’il a « besoin de connaître autre chose. « Lourdes, pour moi, c’est très initiatique par rapport aux gens qui viennent ici pratiquer le catholicisme. Je viens capter un maximum d’émotions. Lourdes, c’est hors du temps On a des malades incurables, pour lesquels, nous, médecins, on est parfaitement conscients de notre impuissance. Eux sont parfaitement conscients de notre impuissance aussi. Mais, il se nous quelque chose entre nous, par rapport à cela ». Continuant: « Chaque malade a en lui une petite lueur d’espoir de faire partie des élus, par rapport aux miracles ». Le médecin pense que le vrai miracle de Lourdes réside dans le fait que « des personnes qui sont pour la plupart entièrement dépendantes viennent recharger leurs batteries.Pour une année de plus ».

Un échange gratuit

Il s’agit de leur offrir « la possibilité d’être moins mal », car pour certains, « leur pathologie est terrible et la plupart d’entre eux sont conscients ». Pour Philippe Mercier, « ce que, longtemps, la médecine a voulu ignorer, à côté de la douleur, c’est le côté conscient de ce genre de patient ». Il ajoute « On ne s’est jamais occupé de cette souffrance là ». Au niveau de la communication non verbale, « avec certains, on se touche, on s’effleure, on sent que quelque chose passe. C’est pour cela que chaque année je vais offrir une semaine en pèlerinage pour ces malades. Ce qu’ils m’apportent, je ne le retrouve pas dans la pratique de tous les jours. Et tous les soignants ou hospitaliers qui sont là le sont parce qu’ils ont voulu y être. C’est un échange gratuit. Il n’y a pas de consultation à tarifer, pas de profit, pas de compétition. Rien du quotidien qui puisse tuer l’affect. Cela vaut la peine de le vivre et je crois qu’il faut une démarche spirituelle dans le vie pour descendre en soi ». VB

Encadré

66 miracles reconnus

Avec la création du Bureau médical en 1883, et du Comité médical international de Lourdes, on étudie les dossiers de guérison sur la base de critères rigoureux. A la fin d’une longue investigation médicale, l’évêque du diocèse d’où vient le malade guéri prend la décision de déclarer une « guérison miraculeuse ». Les déclarations de guérisons consignées fin 2002 dans les archives du Bureau médical sont 6’800. Parmi celles-ci les 66 guérisons inexpliquées par la médecine ont été authentifiées par l’Eglise depuis 1858.

Le Dr Patrick Theillier, responsable du Bureau médical de Lourdes, affirme recevoir de plus en plus de déclarations spontanées de guérison du monde entier. Certaines d’entre elles feront l’objet d’une enquête pour une reconnaissance officielle. Mais à ses yeux, « toutes sont importantes car étant les seules visibles, elles permettent de prendre conscience de toutes les guérisons intérieures et spirituelles, invisibles, qui ont lieu ici à Lourdes, innombrables. »

Des photos des deux médecins Rime et Mercier sont disponibles à l’Agence Apic. (apic/vb/pr)

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