Le gouvernement français et de Villepin montrés du doigt
Paris, 1er mars 2006 (Apic) Depuis quatre ans et quelques jours, Ingrid Betancourt est séquestrée par les Forces armées révolutionnaires colombiennes. Avec sans doute plus de 4^000 autres otages dont on parle tellement moins ou pas. Dans « Histoire de coeur ou raison d’Etat? », Jacques Thomet décrit les dessous en dentelle de l’affaire. Il pointe du doigt le Premier ministre de Villepin et le gouvernement français. Selon lui, « les pieds nickelés français ont été à la base de l’échec de l’échange humanitaire qui était en voie de réalisation en 2003 »
Dans une interview recueillie par Christian Michellod, publié mercredi par le quotidien romand « La Liberté », Jacques Thomet lance un véritable pavé dans la mare. Ancien directeur de l’Agence France-Presse (AFP) à Bogota (1999-2004), il dénonce l’attitude de la France dans les tentatives de libération d’Ingrid Betancourt. La conclusion de son enquête: « Les actions intempestives d’hommes politiques français n’ont pas permis, à ce jour, d’abréger le chemin de croix d’Ingrid. Son livre n’a pour l’heure suscité aucune réaction, ni de la part de l’Etat français ni de la famille Betancourt.
L’auteur dénonce l’information à sens unique diffusée depuis le début de cette affaire. Alors qu’Ingrid Betancourt « est une otage parmi 4200 autres personnes séquestrées en Colombie ». Il y a trois semaines, rappelle-t-il, on a retrouvé le cadavre d’une Française, Aïda Duvaltier, enlevée en 2001 par l’EPL, un mouvement maoïste. « L’Etat français ne s’en est jamais occupé. A Paris, sur la façade de l’Hôtel de Ville, on ne voit que le portrait d’Ingrid ».
Qui est à la base de ce comportement? Jacques Thomet pointe du doigt Dominique de Villepin, Premier ministre mais à l’époque de l’enlèvement ministre des Affaires étrangères. « Avec Daniel Parfait, son émissaire en Colombie et ancien ambassadeur de France dans ce pays, ils sont les instigateurs de toute cette pression médiatique ». Et de mentionner que Dominique de Villepin a été le professeur d’Ingrid Betancourt à l’Ecole de sciences politiques de Paris.
Trésor de guerre
En France, poursuit l’auteur, Ingrid est devenue une icône, alors que les sondages électoraux, avant les présidentielles colombiennes pour lesquelles elle était candidate, ne lui donnaient que 0,4% d’intention de vote. « Avec tout le remue-ménage fait par le Gouvernement français, les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie) se sont rapidement rendu compte qu’Ingrid est un trésor de guerre ».
Jacques Thomet parle aussi des milliers de d’autres familles d’otages, désespérées, parce que, dit-il, on ne parle « que d’Ingrid et pas des 4200 autres personnes séquestrées ». Une anecdote. Il y deux semaines, témoigne l’ancien journaliste de l’AFP, « Carmen Brasseur, une cousine de Clara Rojas, l’amie et bras droit d’Ingrid également prisonnière, m’a téléphoné, en pleurant, pour me dire merci. Enfin quelqu’un parlait de Clara. Elle s’est rendue à la Mairie de Paris pour demander qu’on mette sa photo à côté de celle d’Ingrid sur le mur de l’Hôtel de Ville. On lui a répondu que ce n’était pas possible parce que Clara n’était pas une citoyenne d’honneur. Tout cela est très choquant pour les Colombiens ».
Il faut « débetancourtiser » l’affaire
L’auteur du libre assure avoir eu accès à de hautes sources d’informations qui n’étaient jusqu’ici pas connues. « La conclusion, c’est que les pieds nickelés français ont été à la base de l’échec de l’échange humanitaire qui était en voie de réalisation en 2003 ».
« A cause des liens qui unissent Ingrid et Astrid Betancourt à de Villepin et à Daniel Parfait, son émissaire en Colombie et ancien ambassadeur de France dans ce pays, la raison d’Etat a été bafouée ». Mais, aujourd’hui, dit-il, « je crois que la France est en train d’opérer un changement. Elle va adopter le profil suisse, c’est-à-dire la discrétion. Il faut « débetancourtiser » l’affaire. (apic/cm/lib/pr)
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